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société

Et si on renonçait à faire des gosses pour sauver la planète ?

Parce que nous serons presque 10 milliards d’êtres humains sur Terre d’ici 2050, certains ont opté pour un choix radical : la grève des ventres.
Photo : REUTERS

Nous y sommes tellement habitués que l’information est passée inaperçue. Mi-janvier, on a appris que le taux de fécondité de la France avait encore baissé. Une mauvaise nouvelle pour les économistes qui se demandent qui va payer les retraites des vieux – qui, eux, sont de plus en plus nombreux. Mais une très bonne nouvelle pour tous ceux qui militent pour l’extinction volontaire de l’espèce humaine.

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Car oui, il y en a. « Arrêtez dès maintenant de vous reproduire comme n’importe quelle tribu de primates arboricoles. Et d’ici moins d’un siècle, toute souffrance humaine aura disparu de la surface de la terre ! », lance ainsi Théophile de Giraud. Le message est clair : il est antinataliste, autrement dit opposé à la reproduction chez les humains. Parce que si l’Homme est un loup pour l’Homme, il l’est aussi pour la planète. Et ce, même sans conduire un 4X4 ou mettre du plastique dans la poubelle jaune : le simple fait de vivre et de respirer impacte l’environnement.

Alors, Théophile de Giraud en est persuadé : pour sauver la Terre, il faut renoncer à faire des gosses. Philosophe et écrivain, dandy néopunk tendance anar’, il est le chef de file européen du « Mouvement pour l’Extinction Volontaire de l’Humanité » - VHEMT en anglais, à prononcer « véhément » - , fondé par l’Américain Les U. Knight dans les années 90. Théophile de Giraud est aussi l’auteur d’un manifeste antinataliste, L’art de guillotiner les procréateurs, un ouvrage théorico-délirant aux accents rabelaisiens, où l’on peut lire des choses comme : « voici venu le temps de bander l’accusation contre les véritables artisans de tous les malheurs, charcutant jour après jour notre misérable humanité : les géniteurs ! ». Son credo ? La grève des ventres. Et l’activisme provocateur, comme lorsqu’il distribue des préservatifs devant la Basilique du Sacré-Cœur, à Montmartre, en lançant à des touristes éberlués : « save the planet, make no baby ! ».

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« Je suis VHEMT parce que je me préoccupe de l’avenir de cette planète qui étouffe déjà par notre présence » - Ludmila, 32 ans.

Le mouvement VHEMT se dit à la fois écologique, philosophique et non-violent. Écologique, par son souci, donc, de protéger l’environnement. Philosophique, par son « intention éthique » de stopper la reproduction humaine. Et non-violent, car farouchement hostile à toute forme de coercition. « Nous sommes absolument pacifiques, insiste Théophile de Giraud, et également contre toute politique fasciste ou despotique ». Traduction : le collectif milite pour un éveil des consciences, par pour la stérilisation forcée, l’avortement obligatoire ou l’enfant unique. Ouf.

Si le mouvement de Les. U Knight a connu ses heures de gloires médiatiques dans les années 90, il est aujourd’hui principalement virtuel. Quelque 10 000 anglophones en discutent sur la Toile. Dont une poignée de Français adeptes du slogan phare du mouvement : « puissions-nous vivre longtemps… et disparaître ». Parmi eux, Ludmila, 32 ans, qui a fondé avec son mari une petite entreprise de peinture en bâtiment. Elle a l’impression d’avoir toujours su qu’elle n’aurait pas d’enfant mais à la vingtaine, elle s’est rapprochée du mouvement VHEMT, qui l’a aidé à structurer sa pensée. C’est d’abord la dimension « égoïste » de l’enfantement qui la gène : « pourquoi imposer la vie, et ses tourments, à quelqu’un qui n’a rien demandé ? ». Mais, surtout, son caractère anti-écolo : « je suis VHEMT parce que je me préoccupe de l’avenir de cette planète qui étouffe déjà par notre présence », ajoute-t-elle en citant le cri d’alarme lancé en novembre dernier par 15 000 scientifiques dénonçant les conséquences désastreuses de la surpopulation.

« Avoir un enfant a un coût écologique comparable à 620 trajets Paris-New York », Yves Cochet, membre d’Europe-Ecologie-les Verts

Ceux-là aussi sont formels : pour sauver la planète, il faudrait faire moins de gamins. Car, si l’on en croit Yves Cochet, membre d’Europe-Ecologie-Les Verts, avoir un enfant aurait « un coût écologique comparable à 620 trajets Paris-New York ». Vu comme ça, évidemment, ça fait réfléchir…

L’année dernière, une étude suédoise recensait quatre mesures individuelles vraiment utiles pour réduire son empreinte carbone : un régime alimentaire végétarien, éviter de voyager par avion, ne pas avoir de voiture et… faire moins d'enfants. Spoiler alert : cette dernière serait la plus efficace. Ainsi, quand vous choisissez de pas utiliser de voiture, vous évitez d’émettre l’équivalent de 2,4 tonnes de CO2 par an. Alors qu’un enfant en moins réduit les émissions de CO2 de l’ordre de 58,6 tonnes par an ! « Une famille américaine qui choisit d'avoir moins d'enfants contribue au même niveau de réduction des émissions de CO2 que 684 adolescents qui décident de recycler systématiquement leurs déchets pendant le restant de leur vie", affirment les scientifiques suédois.

À ce stade, la question s’impose : doit-on réellement arrêter de faire des enfants ? Oui et non. Car tout dépend de nos modes de vie, comme l’a expliqué la géopolitologue Virginie Raisson au micro de France Inter : « la question du nombre des hommes masque celle - centrale et critique - du partage de la planète, c'est-à-dire de l’espace disponible et des ressources nécessaires pour répondre aux besoins de sa population ». Concrètement, un Africain émet 2,4 tonnes de CO2 par an, quand un Américain, lui, en produit 20 tonnes ! Au fond, nous pouvons tout à fait croître et nous multiplier sans complexe… à condition de changer de nos habitudes. Bref, entre un enfant et 4X4, il faut donc choisir…