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N'importe quoi

Qu’est-ce qui se passera si la nouvelle génération n’achète jamais de maison?

« Nous devons commencer à voir l'immobilier comme une ressource naturelle et à créer une infrastructure pour déterminer qui peut y accéder. »
Payer le loyer est déjà difficile. Photo : Flickr, Sascha Pohflepp

Si vous cherchez des indices d'une imminente chute de la civilisation telle que nous la connaissons (soyons honnêtes, nous le faisons tous), le fait que la génération Y ne s'achète pas de maison n'occupe peut-être pas le premier rang de votre liste pour l'instant. Toutefois, nos économies modernes comptent sur l'entrée sur le marché immobilier de la jeune génération. C'est à la fois un moteur économique, un plan de retraite et un matériau indispensable pour bâtir une communauté. Que se passe-t-il si une génération trouve que c'est trop cher et passe son tour?

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VICE a demandé à deux experts – Paul Kershaw, professeur de sciences politiques à l'UBC School of Population, et Moshe Milevsky, professeur de finances à la Schulich School of Business de l'Université York – d'imaginer les conséquences d'un refus de s'acheter une maison de toute une génération. Même si ce n'est pas un coup fatal à l'économie mondiale, ils sont d'avis qu'il ne nous rendrait pas la vie facile.

VICE : Si une génération refuse d'acheter, quelles sont les conséquences pour la génération qui essaient de tirer profit de leur investissement?
Paul Kershaw : Il y a un effet domino dans la relation entre le groupe qui accède au marché immobilier pour la première fois et celui qui vend. Si le premier n'entre pas sur le marché, il est possible que les ventes et les autres secteurs connexes connaissent un ralentissement, ce qui aura des conséquences sur le prix de vente des maisons.

Moshe Milevsky : Je ne pense pas que nous verrons l'effondrement qui inquiète les gens. Le marché immobilier est une ressource naturelle de grande valeur. Beaucoup de groupes dans le monde aimeraient avoir ça et gagnent l'accès à l'argent nécessaire pour se le permettre. Ils voudront toujours nous le prendre. Je ne pense pas qu'ils abandonneront.

Nous devons commencer à voir l'immobilier comme une ressource naturelle et à créer une infrastructure pour déterminer qui peut y accéder. À qui est-ce qu'elle appartient? Celui qui offre le plus ou la population qui habite ici et qui lui a donné sa valeur?

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Les familles choisissent souvent d'acheter plutôt que de louer en raison de la stabilité et la qualité de vie. Que se passe-t-il si on arrête d'acheter?
Moshe Milevsky : Le tissu social dans la population active se désagrège. C'est très important pour le Canada d'offrir plus que des salaires élevés pour nous maintenir ici. La dernière chose qu'on veut, c'est d'être réduit à un marché du travail et d'échange de marchandises. Ce qui le prévient, c'est notre lien avec notre communauté. Si la jeune génération n'a pas les moyens d'acquérir une propriété et s'en désintéresse, elle est plus susceptible de quitter le pays.

Les gens pourraient perdre ce qui les ancre dans une région donnée. Je veux que le parc dans mon voisinage soit propre, vert et bien entretenu. Si on ne vit à un endroit que temporairement, est-ce qu'on s'intéresse à l'environnement au-delà de nos besoins immédiats? Il y a aussi la nature transitoire des politiques. Qui sont vos représentants si les communautés changent?

Paul Kershaw : Si on tourne le dos à la propriété, on tourne aussi le dos à l'occasion la plus sûre de fonder une famille et d'avoir des enfants dans une même garderie, école et communauté. La propriété représente aussi une voie d'accès au quartier et aux espaces de jeu. Rester locataire dans une grande ville n'offre pas ce dont les familles ont besoin. Ce ne sont pas les jeunes dans la vingtaine qui quittent les grandes villes, ce sont ceux dont l'horloge biologique commence son tic-tac.

Si la location devient plus courante chez les adultes, on devra améliorer les systèmes comme celui des garderies. Je veux que mon enfant reste dans la même garderie pendant plusieurs années. Je ne veux pas passer d'un quartier à l'autre parce que les propriétaires m'évincent pour faire place à des locataires qui paient davantage. Nous avons besoin de penser aux façons de rendre la location plus sécuritaire.

La propriété est lentement devenue non seulement l'endroit où habiter, mais le principal investissement de toute une génération. Qu'arrive-t-il à notre retraite dans un monde où les gens n'investissent plus dans l'immobilier?
Paul Kershaw : Les gens ont compté sur l'immobilier pour contribuer à leur retraite. Pour aider à la planification de la retraite, le Canada subventionne le marché de l'immobilier depuis longtemps au moyen de l'accès à la propriété, ce dont on ne parle pas. Si vous vendez une propriété qui a été votre résidence principale, vous ne payez aucune taxe sur votre profit. Vous pouvez placer cet argent dans un REER qui sera libre d'impôt et vous en servir pour une mise de fonds. Au total, ces sommes s'élèvent à des milliards. Les locataires n'en profitent pas. Ils ne reçoivent rien des profits quand ils quittent leur logement. Il n'y a aucun allègement fiscal pour eux. Nous devrons réfléchir aux moyens de soutenir un groupe de locataires et à la façon dont ils pourront gagner du capital pour leur retraite.

Moshe Milevsky : Il y a un parallèle à faire avec l'évolution de l'investissement. Les gens voulaient auparavant se procurer des actions d'une bonne compagnie, mais, au fil du temps, ils se sont rendu compte que c'est une stratégie dangereuse. On doit avoir un portefeuille diversifié. Appliquons ce principe à l'immobilier : il y a 20 ans, les gens pensaient qu'investir dans une propriété suffisait, mais ce n'est qu'une maison, dans une ville, dans un pays. Même si l'immobilier est un bon investissement, je préfère y investir par l'intermédiaire d'un fonds. Ou conclure une entente : on partagerait en parts égales les profits de la vente d'une maison à Toronto et d'une maison à Edmonton.

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