FYI.

This story is over 5 years old.

Art

Le MIT expose 17 ans de spam par email

Le duo libanais Joana Hadjithomas & Khalil Joreige a exploité les 4000 spams de leur collection de courriers indésirables.
Joana Hadjithomas & Khalil Joreige, The Trophy Room (2014). Installation view: I Must First Apologize...,MIT List Visual Arts Center, February 19-April 17, 2016. Photo: Peter Harris 

Même si aujourd’hui, nos boîtes de réceptions filtrent généralement les spams, nos anciennes expériences étaient peuplées de scams —cyber-arnaques — d’argent et autres rampant dans nos comptes. Ces temps d’un Internet sauvage ont servi de point de départ aux artistes libanais Joana Hadjithomas et Khalil Joreige pour « I Must First Apologize… », au MIT List Visual Arts Center.

L’exposition présente une série d’œuvres basées sur l’immense archive de quelque 4000 spams que le duo collectionne depuis 1999. À travers différents médiums — vidéo, sculpture, photographie, installation — Hadjithomas et Joreige interrogent notre relation aux images et à la narration, tentant de comprendre pourquoi on croit aux récits fictifs par le prisme des scams.

Publicité

Joana Hadjithomas & Khalil Joreige, The Trophy Room (2014). Vue d'exposition : I Must First Apologize…, MIT List Visual Arts Center, 2016. Photo : Peter Harris 

Joreige a expliqué à The Creators Project les motivations derrière l’utilisation des scams comme matière artistique : « Les scams sont une manifestations qui interroge notre relation aux images, le contexte, le milieu politique. Les scams se basent eux-mêmes sur une réalité plausible ancrée dans l’actualité ou des événements réels, se référant aux conflits actuels. Ils dessinent un carte des conflits contemporains et suggèrent donc une manière alternative d’écrire l’histoire d’un pays ou d’une région… Et en disent ainsi long sur le monde contemporain. »

Joana Hadjithomas & Khalil Joreige, The Rumor of the World (2014).  Vue d'exposition : I Must First Apologize…, MIT List Visual Arts Center, 2016. Photo : Peter Harris 

L’une des pièces phare de l’exposition est une installation, The Rumor of the World, consistant en une série de vidéos diffusées sur 13 écrans. Chacune met en scène un comédien récitant un scam des archives d’Hadjithomas et Joreige Comme c’est souvent le cas avec ces emails, les « voix » derrière le scam se présentent comme des figures publiques réelles ou fictives afin de donner du crédit à leur histoire. Tranchant avec la nature désincarnée des emails, les vidéos confrontent le spectateur avec la représentation physique vous baratinant, modifiant complètement la relation avec ces scams.

« Nous avons décidé de rendre cette virtualité physique par le biais des comédiens, de donner corps à ces scams ; de les utiliser comme un matériau propre. Nous avons demandé à 38 comédiens amateurs d’incarner ces scams, d’incarner les histoires qu’ils contiennent, de leur donner un visage et une voix », raconte Joreige à The Creators Project. « Comme pour le théâtre, une sorte de transfert émerge entre la mise en scène et le public où le spectateur adhère plus à la performance du comédien qu’à la réalité. Le temps d’un instant, le monologue semble crédible, jusqu’à ce que le personnage mentionne le mot argent, qui dissout la croyance et brouille la limite entre vérité et mensonge, fiction et documentaire. »

Joana Hadjithomas & Khalil Joreige, The Trophy Room (2014). Vue d'exposition : I Must First Apologize…, MIT List Visual Arts Center, 2016. Photo : Peter Harris 

The Trophy Room, une autre partie de l’exposition, traite de ceux appelés « scam-baiters », des individus qui servent d’appât pour scammer les scammers. À la place des données bancaires, ces gens harponne les scammers en leur faisant faire des choses ridicules au nom de la « construction de confiance » avant de répondre à la requête du scammer, comme une forme de revanche. The Trophy Room montre des extraits d’interactions réelles entre des scammers et des scam-baiters. Parmi l’un des échanges, on peut voir un scam-baiter qui a convaincu un scammer de sculpter en miniature deux rats affalés sur un sofa, qui ne remplit pas les attentes du scam-baiter et le scammer promet alors d’en refaire, désespéré de gagner la confiance du scam-baiter.

Joana Hadjithomas & Khalil Joreige, It’s All Real, Omar and Younes (2014). Vue d'exposition : I Must First Apologize…, MIT List Visual Arts Center, 2016. Photo : Peter Harris 

« I Must First Apologize… » est à voir au MIT List Visual Arts Center, à Cambridge, dans le Massachusetts aux États-Unis, jusqu’au 17 avril 2016. Cliquez ici pour voir d’autres réalisations de Joana Hadjithomas & Khalil Joreige.