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Crime

Il y a des voleurs de homards en série dans les Maritimes

Les provinces de l'est sont aux prises avec un possible cartel de crustacés

On a tous ri un bon coup quand la ville de Québec a lancé au début du mois une alerte publique pour sensibiliser la population aux vols de souffleuses à neige. C'est vrai que tous les jours, il y a plein de trucs inusités qui se font voler. Mais en ce moment, il y a quelque chose de vraiment bizarre qui se passe dans les Maritimes, et personne ne semble vraiment en parler : les vols de homards. Et ce n'est pas juste des queues de homards congelées au IGA. Il y a du monde qui vole des bateaux ou des gros camions réfrigérés et même des cages de homards au fond de la mer.

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Au cours des 15 derniers mois, plus de 1 million de dollars de homards ont été volés au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse :

Décembre 2015 : 8 400 $ (à Yarmouth, N.-É.);

Janvier 2016 : 31 000 $ (à Cap Sable, N.-É.) et 6 000 $, volés en deux occasions (à Saulnierville, N.-É.);

Juillet 2016 : 1 000 000 $ (!!!) de homards congelés, volés par des Québécois au Nouveau-Brunswick;

Février 2017: 6 000 $, volés à deux frères en deux semaines (Port-Mouton, N.-É.) et 4 000 $ volés dans un entrepôt (Port l'Hébert, N.-É.).

Pourquoi voler du homard?

Je ne sais pas si vous avez fait un tour chez votre poissonnier récemment, mais le homard, c'est fucking cher. À moins de vivre comme un despote (ou d'habiter dans les Maritimes et d'avoir accès à un McLobster), il y a de bonnes chances que le homard ne soit pas votre lunch du mardi. La cause principale de son prix élevé n'est pas que la demande excède l'offre. Le homard dans les régions qui en produisent est relativement abordable. Ce qui fait que ton homard vapeur te coûte 60 $ dans un steak house (à part le fait que les steak houses, c'est pour les losers), c'est que c'est vraiment dur de les garder en vie. Le homard cuit après sa mort manque cruellement de goût et du homard congelé, c'est dégueulasse. Il y a donc toute une chaîne d'achat à mettre en marche si on veut servir du homard qui en vaut la peine. Le pêcheur attrape le homard, qu'il vend ensuite à un intermédiaire qui transporte les bêtes vivantes et les vend à un fournisseur, qui lui les vend à son tour à des restos et des poissonneries, qui vous le vendent finalement.

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Des homards meurent à chaque étape de l'opération et il faut inclure ce coût-là dans le prix de vente. Quand on achète un homard au resto, on paye donc pour celui qu'on s'apprête à manger, mais aussi pour ses frères d'armes, morts au combat. C'est pour ça qu'un homard qui coûte 6 $ la livre en saison au quai vaut 60 $ au restaurant.

Qui peut commettre un crime de si haute envergure?

Quand on tient compte de tout ce que ça prend pour qu'un homard arrive dans notre assiette, on comprend que ces voleurs sont des professionnels, qui doivent bien connaître l'industrie.

Comment procèdent-ils? Dès que le homard est sorti de l'eau, le décompte est lancé. Et se débarrasser d'un million de dollars de homard, c'est vraiment tough. Les acheteurs sont certainement connus avant de voler les homards. La cargaison doit être traitée comme de la marchandise chaude : pas question de faire du porte-à-porte en essayant de se débarrasser de centaines de homards vivants.

Le modus operandi semble plutôt similaire chaque fois : on vole un camion dans une ville, du homard se fait voler dans une autre ville. Finalement, on retrouve le camion, vide, quelques jours plus tard dans une troisième ville.

Mais pour aller prendre des casiers à homards, il faut être décidé : il y a souvent des gardes et des caméras de sécurité aux quais. Dans une entrevue avec le Queens County Advance, Donaldson Fisher, un pêcheur de homard de Port-Mouton, en Nouvelle-Écosse, explique que les dudes se mettent des wetsuits, ils plongent dans l'eau glacée en plein milieu de la nuit, coupent les cordes pour remonter les cages à la surface et les mettent dans des camions réfrigérés. Il affirme aussi qu'en vérifiant ses caméras, il a constaté que tout le processus pour voler 300 livres de homards leur a pris 45 minutes. Les voleurs sont même revenus quelques jours plus tard pour en voler plus, mais ils n'ont rien trouvé.

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A-t-on ici affaire à un cartel de homard?

Pour l'instant, rien n'indique que le vol d'un million de dollars de homards congelés soit lié aux autres. Trois Québécois ont été arrêtés pour ce vol-là et ont aussi été accusés de vol d'autres denrées précieuses comme du poulet et des couches pour bébés.

Les pêcheurs de homards des Maritimes commencent tout de même à s'inquiéter et la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) a conseillé aux pêcheurs de sécuriser leurs prises. Nous avons contacté la GRC en Nouvelle-Écosse pour savoir s'ils allaient lancer une opération de grande envergure. Des vols aussi spectaculaires nécessiteraient l'intervention de la SWAT des océans, du FBI des fonds marins… non?

« On a constaté un peu moins de dix vols en 15 mois. C'est préoccupant, mais on ne traite pas ça avec une attention spéciale, et on traite chaque vol comme étant indépendant », a répondu la relationniste média de la GRC en Nouvelle-Écosse.

La GRC n'a toujours pas lancé d'alerte publique par rapport aux vols de homards dans les Maritimes; il faut croire que Québec tient plus à ses souffleuses que les provinces de l'est ne tiennent à leurs homards. On continuera de garder un œil sur la situation. J'aurais peut-être un conseil à leur donner s'ils veulent trouver les homards : garder un œil sur les cargaisons de beurre à l'ail.

Billy Eff est sur internet et .