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Music

Un neurologue a découvert pourquoi certaines personnes n’aiment pas la musique

Entre 3 et 5 % de la population souffrent d'anhédonie musicale, et ça n'a rien à voir avec Drake.

Non, ceux qui n'aiment pas la musique ne sont pas des « incultes », des « weirdos » ou des « fonctionnaires » qui n'ont jamais connu un seul moment de plaisir dans leur vie.

Être insensible à la musique porte un nom dans la communauté scientifique : l'« anhédonie » musicale. Une nouvelle étude a révélé que 3 à 5 % de la population était soumise à ce symptôme unique, soit une absence de connexions cérébrales entre la zone qui traite les sons et la zone de récompense.

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L'anhédonie généralisée – l'incapacité à ressentir du plaisir – se retrouve notamment chez les dépressifs, les schizophrènes et les gens atteints de la maladie de Parkinson. L'anhédonie musicale est, elle, très spécifique; elle peut être présente chez des personnes tout à fait saines sur le plan de la santé et des émotions. Simplement, elles n'ont aucune expérience émotive à l'écoute de la musique.

Robert Zatorre, chercheur à l'université de McGill à Montréal, s'intéresse aux relations entre la musique et le cerveau et collabore depuis quelques années avec une équipe qui mène des recherches sur l'anhédonie à Barcelone.

Ensemble, ils ont réussi à identifier l'anhédonie musicale en 2013, puis ont étudié dans une recherche parallèle les réponses physiologiques des sujets qui se disaient insensibles aux mélodies. À l'écoute d'un morceau plutôt intense, un patient typique pourrait voir son rythme cardiaque s'accélérer, ou ressentir un frisson traverser sa peau, par exemple. Chez les patients insensibles à la musique, aucune réponse physiologique n'a été enregistrée.

Comme d'autres études l'ont déjà démontré, les zones de récompense et le système auditif du cerveau s'activent et se lient lorsqu'une mélodie se fait entendre. Les chercheurs ont voulu vérifier l'hypothèse selon laquelle ces connexions seraient absentes dans le cas de l'anhédonie musicale.

À Barcelone, des chercheurs ont séparé 45 sujets sains en trois groupes : ceux qui sont à fond sur la musique, ceux qui s'en foutent complètement, et ceux qui se situent quelque part entre les deux. Ils se sont assurés que les « zones de récompense » des sujets d'études étaient fonctionnelles. Pour ce faire, ils ont eu recours à un jeu où il est possible de gagner ou de perdre de l'argent. Un gain stimule automatiquement la zone de récompense - raison pour laquelle le jeu est si addictif.

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Les chercheurs ont ensuite observé la réponse neurologique des sujets à la musique à l'aide de la résonance magnétique. Ils ont confirmé leur hypothèse de départ, celle de l'absence de connexions. Ils ont également constaté que les mélomanes montraient une interaction accrue entre les zones de récompense et le système auditif.

Qu'est-ce qui pourrait donc expliquer cette absence de connexions entre les zones cérébrales ?

« Je dis toujours à mes étudiants : tu sais que tu as fait une bonne expérience si à la fin tu obtiens plus de questions que de réponses », blague Zatorre.

Selon lui, la réponse pourrait se trouver dans l'anatomie du cerveau. L'équipe de chercheurs étudie désormais les différences entre les canaux qui relient les régions cérébrales. Ils s'intéressent donc à la matière blanche, qui joue ici un rôle important. « Les données ont déjà été recueillies lors de la résonance magnétique de la plus récente étude », précise Zatorre. « Il ne reste qu'à en analyser les données. »

En étudiant les émotions dans le cerveau, on pourrait éventuellement mieux comprendre comment l'accès au système de la récompense fonctionne.

« Il y a différentes voies pour accéder à l'activité du système de la récompense. Si cette voie est bloquée, peut-être qu'on peut la débloquer ? Chez les personnes qui ont une anhédonie généralisée, comme les personnes déprimées ou atteintes de la maladie de Parkinson, peut-être qu'on pourrait trouver une façon de débloquer l'accès au système de la récompense, notamment en utilisant la musique », croit Robert Zatorre.

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