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FRANCE

Le point sur l’enquête des attentats du 13 novembre : Abaaoud caché dans un buisson à Aubervilliers, Abdeslam en pleurs vers la Belgique

Les derniers éléments connus de l’enquête révèlent que Salah Abdeslam s’est fait contrôler 3 fois par la police le lendemain des attaques et qu’Abdelhamid Abaaoud s’est caché pendant 4 jours dans un buisson à Aubervilliers.
Pierre Longeray
Paris, FR
Le buisson où se serait caché Abdelhamid Abaaoud (Image via Google Street View)

« [Salah] pleurait et criait en racontant ce qui était arrivé. » C'est ce qu'a confié aux policiers belges Hamza Attou, un des deux hommes responsables d'avoir rapatrié Salah Abdeslam de Paris à Bruxelles dans le 14 novembre — le lendemain des attaques contre la capitale française qui ont fait 130 morts.

Ce lundi matin, plusieurs médias belges dont le journal Le Soir, révèlent le contenu du PV d'audition d'Attou, grâce auquel on comprend mieux le retour de Salah Abdeslam à Bruxelles depuis Paris. Dans la voiture, en compagnie d'Attou et d'Abdeslam, on retrouve aussi Mohammed Amri — un autre Belge, toujours écroué comme Attou.

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« [Salah] nous a dit qu'il avait commis les attentats de Paris, qu'il était la dixième personne à accomplir ces attentats, » explique Attou à la police belge et précise qu'Abdeslam lui faisait « pitié » à force de pleurer. Abdeslam a aussi demandé à de multiples reprises à ses chauffeurs de ne pas le « balancer » et aurait menacé de faire sauter la voiture s'ils ne l'aidaient pas.

Avant de convaincre Attou et Amri de venir le chercher, Abdeslam avait essayé de demander à un de ses cousins qui vit à Paris de l'aider — ce qui a donné lieu à une conversation téléphonique surréaliste. Le Parisien révèle qu'Abedslam supplie son cousin de venir le chercher « à Châtillon dans le 92 [sud de Paris]. » Mais son cousin refuse en lui disant, « Je ne sais pas si t'es au courant, mais il y a des attentats. » Ce à quoi Abdeslam répond alors, « Ah ouais, il y a des attentats ? ».

Abdeslam contrôlé 3 fois le lendemain des attentats

Après le refus de son cousin, Abdeslam contacte donc Attou et Amri, qui viennent le récupérer près d'un McDonalds parisien aux alentours de 6 heures du matin, le samedi 14 novembre. Direction Bruxelles, et Abdeslam demande aux deux hommes de prendre des petites routes pour éviter les contrôles de police. Mais ils se perdent et se retrouvent sur l'autoroute.

Le convoi va alors se faire contrôler à trois reprises par la police avant d'arriver en Belgique. C'est ce qu'a dit à l'AFP une source proche de l'enquête belge, recoupant des informations données par Le Parisien.

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Au premier contrôle, le policier français demande aux trois occupants de la voiture s'ils ont « consommé ». Abdeslam est sur la banquette arrière et ne dit rien. Amri et Attou avouent que « oui » puisqu'ils viennent de partager un joint. Le policier leur explique que « ce n'est pas bien, mais que ce n'est pas la priorité aujourd'hui » selon les dires d'Attou. Puis le policier leur demande de circuler.

Un peu plus tard dans la matinée du 14 novembre, nouveau contrôle. On demande cette fois-ci leurs papiers aux trois hommes, qu'ils fournissent aux policiers français. Puis on les laisse repartir — Salah Abdeslam n'est en effet pas encore recherché par toutes les polices d'Europe. Il n'a pas encore été identifié comme l'un des principaux suspects des attaques. Avant d'arriver à la frontière belge, près de Cambrai, troisième contrôle. Salah Abdeslam va fournir une adresse à Molenbeek, à Bruxelles, où il comptait se rendre. Encore une fois, les trois hommes peuvent repartir.

Quatre jours dans un buisson

Un autre personnage clé des attentats, Abdelhamid Abaaoud (présenté comme l'organisateur de ces attaques simultanées), fait aussi l'objet d'une étonnante découverte révélée par le Parisien ce dimanche. Le journal affirme qu'après les attaques, Abaaoud a passé 4 jours caché dans un buisson à Aubervilliers.

Le 16 novembre, un témoin indique qu'Abaaoud pourrait se cacher dans ce que les enquêteurs appellent un « igloo végétal » en Seine-Saint-Denis, qui jouxte l'A 86. Le buisson est plutôt vaste — 25 m2. On y trouve un matelas en mousse et un sommier de fortune fabriqué avec des palettes de bois. Le lendemain, le 17, les policiers décident d'installer une caméra pour observer la potentielle planque d'Abaaoud. À 20 h 10, une jeune femme s'approche des fourrées : c'est Hasna Aït Boulahcen, la cousine d'Abaaoud.

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EXCLUSIF. Le 19 novembre, les policiers… par leparisien

Juste après son arrivée, un homme sort de la végétation, c'est Abaaoud. Puis un deuxième homme non-identifié s'avance. Le trio part à pied, alors que les policiers les surveillent de loin — craignant qu'ils portent des gilets explosifs. Le petit groupe monte alors dans un taxi, direction Saint-Denis, rue Corbillon, où se situe l'appartement prêté par Jawad Bendaoud. Sur les coups de 4 heures du matin, le Raid intervient dans l'appartement. Boulahcen, Abaaoud et un troisième homme non-identifié sont tués dans l'assaut.

Interpellations en Belgique

Les médias belges indiquent ce lundi matin que la police serait à la recherche d'un nouveau suspect important — alors que deux frères et un de leur ami ont été interpellés ce dimanche soir rue de la Clé à Bruxelles. Deux autres individus ont été privés de leur liberté suite à des perquisitions réalisées à Bruxelles et à Laeken ce dimanche soir et lundi matin. Ces  personnes ont été remises en liberté ce lundi ont déclaré en fin d'après midi les autorités belges.

La justice belge chercherait un homme qui aurait coordonné les attentats depuis la Belgique, puisque de nombreux contacts téléphoniques ont eu lieu entre les deux pays le soir des attaques.

Le Parisien encore révélait ce dimanche que les deux commandos terroristes — du Bataclan et des terrasses — étaient en contact avec des interlocuteurs restés en Belgique. Dans un téléphone retrouvé à proximité du Bataclan, on peut lire un texto envoyé à 21 h 42 vers la Belgique, « On est partis, on commence. » Un assaillant des terrasses aurait aussi appelé un autre numéro localisé en Belgique dans la soirée.

Dans un autre article du dossier du Parisien consacré à l'enquête, on apprend que la police française suspecte un nouveau Français, connu des services de renseignement, d'avoir coordonné l'attaque du Bataclan. Un survivant du Bataclan avait confié aux enquêteurs, que « le plus grand des deux terroristes » de la salle de concert — Ismaël Omar Mostefaï — a demandé à son complice — Samy Amimour — s'il « comptait appeler Souleymane ». Amimour répond que non, qu'ils vont faire ça « à leur sauce ».

L'évocation de ce « Souleymane » attise la curiosité des enquêteurs, qui connaissent un djihadiste français originaire de Drancy (comme Amimour) qui se fait appeler comme cela. Il s'agit de Charaffe El-Mouadan, âgé de 27 ans et parti en Syrie à l'été 2013. En 2012, El-Mouadan avait été mis en examen pour « association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme », avec Samy Amimour. Les deux hommes — amis d'enfance — avaient évoqué à plusieurs reprises le projet d'aller faire le djihad en Afghanistan ou au Yémen.

Suivez Pierre Longeray sur Twitter : @PLongeray

Le buisson où se serait caché Abdelhamid Abaaoud (Image via Google Street View)