Marseille, Beyrouth ou Tel Aviv
Toutes les photos sont publiées avec l'aimable autorisation de Céline Villegas.

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Culture

Marseille, Beyrouth ou Tel Aviv

Saurez-vous retrouver dans quelle ville méditerranéenne ont été prises les photos de Céline Villegas ?

Née dans le sud de la France et ayant des origines italiennes, j’ai régulièrement passé, enfant, mes vacances sur la Côte d’Azur et en Italie. J’ai également voyagé dans plusieurs pays du pourtour méditerranéen et j’éprouve quasi irrémédiablement une joie enfantine dès que je suis entourée de pins parasols, de cigales, d’une chaleur étouffante et de plats baignant dans l’huile d’olive, avec vue sur une mer bleu cobalt depuis des rives escarpées. Ok, la Méditerranée ne se résume à ça pour moi non plus mais j’ai tendance à manifester un intérêt particulier pour tout ce qui y a trait.

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C’est donc avec une attention tout à fait partiale que je me suis attardée sur la série de la photographe franco-chilienne Céline Villegas lorsque j’ai épluché le programme du festival de la jeune photographie européenne Circulation(s), qui a lieu en ce moment-même au Centquatre, à Paris. Les clichés lumineux et colorés de Balnearios Plus Ultra ont été pris à Marseille, Beyrouth et Tel Aviv. Si je connais bien la première et ai visité la seconde, je ne sais pas franchement à quoi ressemble la troisième. Et pourtant, lorsque l’on regarde ces images, il est parfois difficile, en l’absence d’indication géographique dans les légendes, d’affirmer avec certitude où a été prise telle ou telle photo.

La série prend alors une dimension abstraite et onirique assez captivante. J’ai contacté Villegas, qui est attachée de production à France Inter par intermittence et photographe globe-trotteuse le reste du temps, pour en savoir plus.

The Creators Project : Bonjour Céline. Comment est né le projet Balnearios Plus Ultra ? L’avez vous pensé en amont ou s’est-il construit au fil de vos voyages ?

Céline Villegas : Cette série s'est vraiment construite au fil de mes voyages. Lorsque j’ai passé du temps à Beyrouth en 2013, j’ai beaucoup arpenté la corniche et entamé un travail sur l’aspect balnéaire de la ville. Puis, lors de mes différents séjours à Marseille, j’ai commencé à percevoir des similitudes entre les deux villes et à photographier très spontanément le même genre d’espaces. J’ai ensuite continué avec Tel Aviv puis d’autres séjours à Beyrouth et Marseille jusqu’en 2015, cette fois-ci avec la conscience du travail en série.

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Comment avez-vous réalisé cette série ?

J'ai commencé avec du négatif 24x36 et je suis très rapidement passée au moyen format argentique (6x7) qui se prête bien à ce genre de prises de vues. Il s’agit très simplement de photographies prises sur le vif, rien n'étant jamais mis en scène car on m’a parfois posé la question. Ce travail est le fruit de beaucoup d’heures de marches solitaires et d’attente, en bordure de ces villes.

Pourquoi Marseille, Beyrouth et Tel Aviv en particulier ?

Je les perçois comme trois grandes villes tourmentées, qu’il s’agisse de “situations” économiques, sociales ou géopolitiques. J’ai eu envie de les raconter d’une manière différente, sans être trop frontale, en cherchant un peu de poésie et d’humour dans ces réalités complexes. Ce sont aussi des villes que j’aime beaucoup, chacune pour des raisons différentes.

Lorsque l’on regarde les photos de “Balnearios Plus Ultra”, il est souvent difficile de situer les clichés et c’est ce qui fait, à mes yeux, la force de ce projet. Est-ce un parti pris, puisque vous ne légendez pas vos photos ? Quelles similarités voyez-vous entre ces trois villes balnéaires ?

Oui tout à fait, c’est un parti pris, le lieu exact de prise de vue n'a pas tant d'importance pour moi. J’ai simplement cherché à montrer quelque chose d'universel dans ces paysages urbains. L’important pour moi est que l’on entre dans une réalité particulière dans chacune de ces images. Plus que des portraits, ce sont des rêveries. Bien entendu, j’ai trouvé des similitudes dans ces corps qui s’abandonnent, dans la lumière, l’architecture, les formes géométriques et la manière dont le balnéaire s’intègre si bien dans l’urbain. Mais, je ne pense pas que la comparaison puisse aller plus loin car ce sont des villes très différentes au fond.

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Vous qui êtes née à Lyon, qui vivez à Paris et avez des origines chiliennes, que représente pour vous la Méditerranée ?

La Méditerranée représente pour moi une douceur de vivre et une ouverture sur le monde. Du fait de mes origines, je me sens bien partout mais il est vrai que les villes méditerranéennes sont très agréables à vivre et à photographier. J’aime aussi le brassage et le désordre de ces villes, liées à la présence des ports.

D’où vient cet attrait pour le portrait de villes ?

J’ai beaucoup photographié Buenos Aires entre 2007 et 2009 lorsque j’y habitais et beaucoup de choses s’y sont débloquées pour moi en matière de photographie.  Il y a quelque chose d’assez magique dans cette ville, tout comme à Beyrouth. D’ailleurs le nom de la série Balnearios Plus Ultra est un clin d’oeil à la capitale argentine, car il s’agit du nom d’un club balnéaire qui a existé dans les années 30 au bord du Rio de la Plata. Depuis, j’aime prendre le temps de photographier les villes qui m’inspirent et de calquer mon imaginaire sur elles. Je poursuis aujourd’hui ce travail dans d’autres villes, comme le Havre et Tanger mais je raconte aussi les villes à travers des prismes particuliers, comme celui des Cafés con piernas à Santiago du Chili.

Comment en êtes-vous venue à la photo ?

J’ai grandi dans un environnement familial où la photographie était très présente. J’ai des souvenirs de laboratoire photo improvisé dans la salle de bain et je me souviens précisemment de ma première photographie argentique, je devais avoir 5 ans. Mais ce n’est que fin 2012, alors que je travaillais dans un tout autre secteur et que j’avais fait des études de sciences politiques, que j’ai décidé de m’y consacrer pleinement car cela commençait à prendre beaucoup de place dans ma vie. Entre temps j’ai toujours eu un appareil photo dans mon sac.

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Qui ou qu'est-ce qui vous inspire ?

J’admire le travail des photographes latino-américains que sont Sergio Larrain, Graciela Itúrbide, ou Manuel Álvarez Bravo. Je m’intéresse également beaucoup au photojournalisme et à certain(e)s photographes contemporain(e)s comme Vivian Sassen par exemple. Mais je  pense que la peinture et le cinéma restent de très belles sources d’inspiration pour les photographes.

Pour retrouver Balnearios Plus Ultra et les autres séries de Céline Villegas, allez faire un tour sur son site. Pour voir le reste de la programmation du festival Circulation(s) au Centquatre, à Paris, c'est par là.