L’armée australienne a commandé plus d’un millier de véhicules blindés de type Hawkei à l’entreprise française Thales, dans un contrat qui s’élève à 1,3 milliard de dollars australiens (soit 817 millions d’euros), a annoncé ce lundi matin le Premier ministre australien Malcolm Turnbull.
L’Australie se dote ainsi à l’horizon 2017 d’un véhicule polyvalent, adapté aussi bien à des missions humanitaires qu’à une intervention en zone de guerre. La question est de savoir où ces Hawkei vont rouler. Le pays n’a pas de frontière terrestre et il n’est pas spécialement menacé sur son territoire.
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Une « coque en V » pour détourner la puissance des mines
Ce nouveau véhicule pèse sept tonnes, peut transporter 6 soldats, rouler à 110 kilomètres à l’heure et même être hélitreuillé. Il est également résistant aux explosions de mines et aux tirs d’armes légères. Le nom Hawkei fait référence à une espèce de serpent répandue en Australie, l’Acanthophis hawkei.
Ce véhicule « est fait pour être mobile, déployable, et quand même offrir une protection efficace aux engins explosifs improvisés (EEI), » explique Corentin Brustlein, chercheur et coordonnateur du Centre des études de sécurité à l’Institut français des relations internationales (IFRI).
La vidéo de présentation du Hawkei par Thales.
Les Hawkei sont en effet plus petits que les blindés Bushmaster qu’utilisait précédemment l’armée australienne, qui eux pouvaient transporter 10 soldats. Ces derniers, également produits par la filiale australienne de Thales depuis 2004, ont été déployés en Afghanistan ou encore en Irak.
« Les Australiens se sont fait une spécialité de ce type de camions fortement blindés. C’est un héritage de la guerre d’Irak, dans laquelle ils étaient impliqués, » rappelle Corentin Brustlein. « Mais le blindage prend de la masse, et ces camions sont hauts sur roue, visibles et lents. »
Au contraire, les nouveaux Hawkei peuvent servir « pour tous les types de missions, » selon le chercheur. Ils possèdent, tout comme les Bushmaster, ce que l’on appelle “une coque en V”, qui détourne l’énergie libérée par les mines sur lesquelles sont susceptibles de rouler les véhicules.
Capacité de réaction rapide
Le contrat mentionne la livraison de 1 100 véhicules et plus de 1 000 remorques. La production de ces 4×4, qui aura lieu dans la ville de Bendigo (sud-est de l’Australie), doit se dérouler sur trois ans et demi à partir du milieu de l’année 2017, avec une première livraison estimée pour fin 2017.
Tout comme les États-Unis, qui ont acheté fin août 55 000 nouveaux véhicules blindés en remplacement des Humvee, l’Australie investit aujourd’hui dans un véhicule qui répond aux nouveaux besoins des armées dans les conflits modernes : protéger les troupes des bombes disposées sur les routes, tout en traversant des tronçons ennemis rapidement.
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« La réalité, c’est que les engins explosifs improvisés (EEI) sont une caractéristique du champ de bataille moderne, et indépendamment du contexte dans lequel la force australienne de défense (ADF) opère actuellement, ce type de menace va de manière presque certaine être présente. Ces véhicules sont capables d’intervenir sur tout terrain, » a déclaré le Premier ministre Turnbull lors de l’annonce du contrat lundi.
L’Australie est membre de la coalition menée par les États-Unis qui mène des bombardements contre l’État islamique en Syrie et en Irak. Mais le Premier ministre a nié vouloir que son pays s’implique plus dans les conflits mondiaux. « Ce n’est pas le message que j’envoie, » a-t-il dit lors de la conférence de presse lundi.
« Cette déclaration du Premier ministre était faite pour rassurer l’opinion publique, notamment sur le fait que l’Australie n’engagera pas plus de forces terrestres en Irak, » analyse Corentin Brustlein.
Le but de l’Australie ? « Avoir une capacité de réaction rapide, grâce à des véhicules polyvalents, » selon le chercheur. « La zone d’intérêt de l’Australie, c’est l’Océanie et l’Asie du sud-est, souvent touchées par des catastrophes naturelles. [Ces véhicules] peuvent soutenir l’aide humanitaire, en reliant des villages éloignés les uns des autres par exemple. Mais ils permettent aussi d’aller au Yemen, ou de rester en Irak si nécessaire. »
Modernisation générale des forces armées australiennes
La ministre australienne de la défense Marise Payne a également estimé que ce véhicule construit en Australie pourrait être exporté facilement à l’avenir. « Le fait que c’est un véhicule plus léger que le traditionnel Bushmaster, qu’il possède un degré de mobilité dans les zones à très haut risque, et un degré significatif de résistance balistique et de résistance aux explosions […] signifie qu’il devrait être très attractif pour le marché international, » a-t-elle déclaré.
Selon le gouvernement australien, le projet devrait par ailleurs permettre la création de 170 emplois.
Cet achat s’inscrit dans un mouvement général de modernisation des forces armées australiennes, alors que le pays avait renforcé son armée de l’air en achetant de nouveaux avions de chasse américains, et souhaite également renouveler sa flotte de sous-marins. « Pour l’Australie, [l’achat des Hawkei] est un contrat non négligeable, mais ce n’est pas grand-chose à côté de ces grands programmes, » nuance Corentin Brustlein. « L’achat de sous-marins ou de nouveaux chasseurs correspondent plus aux ambitions australiennes : pouvoir agir de manière plus autonome en cas de besoin. »
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Image via Thales