Depuis plusieurs millénaires, les humains cohabitent avec les chiens. Nous les avons amenés partout avec nous, et ils ont montré leur capacité d’adaptation peu commune, ce qui leur a valu la particularité d’être surnommés nos meilleurs amis.
D’après les plans de différentes agences spatiales, ainsi que du programme de SpaceX, il sera possible pour les humains de s’installer sur Mars dès 2024. J’en ai assez de la Terre et j’ai très hâte de plier bagage et de m’acheter un condo spatial, question d’embourgeoiser une nouvelle planète. Mais je fais quoi avec mon chien? Est-ce que je pourrai l’amener avec moi?
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Il y a, bien entendu, déjà eu des chiens dans l’espace, comme Laïka, la chienne errante russe qui a été le premier être vivant à orbiter autour la terre (bien qu’elle soit morte très rapidement après le décollage). Mais amener dans l’espace un chien pour sa compagnie, plutôt que pour des raisons scientifiques, n’a jamais encore été fait.
C’est déjà hyper compliqué de se déplacer sur Terre avec son animal de compagnie. Ça ne doit donc forcément pas être une partie de plaisir de lui faire faire un voyage interstellaire, me confirme Nicole Buckley : « En tant que propriétaire de deux chiens, je peux te dire que je ne leur ferais pas vivre ça. »
Mme Buckley est experte scientifique en chef du département des sciences de la vie, à l’Agence spatiale canadienne. Jointe par téléphone, elle m’explique que c’est surtout le trajet qui poserait problème. « Au moment du décollage, lorsque les astronautes quittent la Terre, ils sont exposés à une pression de 3 g, et ça peut aller jusqu’à 5 ou 6 g en atterrissant [un avion de ligne au décollage : environ 0,4 g, NDLR]. C’est extrêmement dur sur le corps, même pour des gens entraînés, donc, pour un animal de compagnie, ça serait presque insupportable. De plus, ça a des effets sur les os et ça peut causer des problèmes cardiovasculaires, comme on le constate et le mesure sur les humains. » De plus, nos compagnons à quatre pattes seraient soumis à des quantités importantes de radiation qui pourraient être très nocives, voire mortelles.
Être confiné dans un espace restreint loin de toute civilisation est très difficile. Ça a des conséquences physiques importantes, mais aussi sociales, souligne Mme Buckley. Des études sont présentement menées sur la culture que se créent les astronautes, notamment dans la Station spatiale internationale. Les interactions sociales dans l’espace sont complètement différentes lorsqu’on est privé des choses qui stimulent nos sens et, au final, nous rendent humains. C’est à ce titre que les animaux de compagnie, ou même les fleurs et les plantes, pourraient être bénéfiques. « On a envoyé de jeunes plants d’épinette blanche dans l’espace pour voir comment la gravité affecterait leur croissance. On a une vidéo d’un astronaute qui travaillait avec un des plants, et d’autres astronautes sont rentrés dans la pièce, juste pour venir sentir l’épinette! me raconte Mme Buckley. Vous êtes là-haut dans un environnement stérile avec très peu d’odeurs. Sentir le plant était apaisant pour eux, et cela montre comment des objets terrestres peuvent amener du réconfort aux cosmonautes en mission. »
C’est certain qu’on voudrait amener nos amis canins avec nous sur Mars, mais il ne faut pas oublier que les premières décennies que passera l’Homme sur la planète rouge ne seront pas particulièrement luxueuses ou confortables. Mars ne nous offrant aucune des ressources qui nous sont essentielles, comme de l’eau ou de la nourriture, la logistique d’accueil des humains sera un vrai casse-tête. L’espace sera limité et à peu près tout, des vivres à l’oxygène, sera rationné. On imagine donc que ce n’est pas, pour l’instant, dans les plans d’Elon Musk de construire un parc à chiens sur Mars.
« L’environnement dans l’espace est très différent de celui sur Terre. C’est isolé, confiné et extrême. Il faudrait s’assurer d’avoir assez de nourriture, de trouver un moyen de disposer des déchets animaux; il y a beaucoup d’enjeux environnementaux auxquels il faudrait penser », fait remarquer Mme Buckley. « Mais, d’un point de vue socioculturel, on ne sait pas si nos animaux de compagnies pourraient combler les mêmes besoins en nous dans l’espace que sur Terre. »
La NASA a révélé la semaine dernière que le robot Curiosity avait découvert des preuves de l’existence de molécules organiques sur Mars il y a plusieurs milliards d’années. Bien que ces molécules soient essentielles à la vie telle qu’on la connaît, leur existence ne prouve en rien qu’il y a autrefois eu présence de vie sur la planète rouge.
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Donc, pour un certain temps, il sera impossible d’amener nos toutous avec nous dans des colonies extraterrestres, du moins jusqu’à ce que la technologie soit plus avancée et que les humains soient bien implantés sur d’autres planètes. Je ne suis pas certain de vouloir y aller de sitôt, finalement.
Mais, pour ceux qui auraient besoin dans l’espace du soutien émotif qu’apporte un animal de compagnie, d’autres solutions existent, d’après Mme Buckley. « Il y a au Japon un robot de zoothérapie, qui s’appelle Paro. Il est interactif, j’en ai tenu un, et j’en veux absolument un dans ma vie! » me confie la scientifique en riant. « Ça serait certainement une solution de rechange plus avantageuse que de soumettre à un grand stress un pauvre petit animal. »