En tournée avec La Souris Déglinguée

Cet article est extrait du numéro du « Jour malade » Le livre Week-ends sauvages retrace dix ans de concerts de La Souris déglinguée, entre 1981 et 1990. Ce sont des années fondatrices et essentielles pour le groupe punk rock français, créé dès 1976 mais « officiellement » fondé en 1979, et qui connaîtra son heure de gloire au cours des années 1980, en plein creuset du rock dit alternatif.

Dès janvier 1981, le groupe s'est momentanément grillé sur Paris et sa banlieue suite aux incidents de leur concert à l'Opéra Night – incidents dus à un public particulièrement agité ce soir-là. C'est pourquoi le groupe a alors décidé de multiplier les déplacements en province et, semaines après semaines, s'est vu contraint d'enchaîner les tournées. Inlassablement. Vite, les membres du groupe se sont adjoint les services d'Olivier Claisse, lequel a dû quitter son poste de barman au bar Le Rose Bonbon pour devenir le photographe-chauffeur plus ou moins attitré du groupe.

Quoique 100 % parisien de par sa composition et par une grande partie de ses textes, lesquels font référence à certains quartiers intramuros, à la banlieue ou à des « personnalités » typiquement parisiennes, le groupe a cependant parlé à toute une partie de la jeunesse française des années 1980. Le groupe aimait à évoquer des sujets tels que l'amitié, les bandes, la drogue ou encore la montée du chômage. En réalité, les trucs dont parlait le jeune groupe étaient les sujets abordés quotidiennement par la jeunesse française au sortir de la décennie 1970, plutôt morose.

Aussi, le groupe drainait autour de lui un noyau de fans pas mal énervés et incontrôlables regroupés sous le nom d'International Raya Fan Club (IRFC), qui les suivaient de date en date. En parallèle, le groupe a sorti de nombreux disques – sept albums entre 1981 et 1991 – et bénéficié de soutiens de qualité de la part de la presse rock. En bref, leur présence simultanée sur pas mal de fronts, et leur succès en sus, en ont fait le groupe phare de ces années en France, avec à ses côtés des formations un peu plus jeunes telles que O.T.H., les Garçons bouchers, les Washington Dead Cats ou Bérurier noir. Musicalement, le groupe naviguait toutefois assez loin des autres et mêlait des influences nombreuses et diverses ; plus que « rock alternatif », ils aimaient à simplement se revendiquer rock'n'roll.

Avec le recul, il serait juste de dire que La Souris déglinguée constitue le groupe emblématique de la France des années 1980. En effet, c'est eux que l'on invitait à toutes les émissions de radio ou de télé sur le thème du « rock français » ou de « la jeunesse actuelle », ou que l'on faisait jouer partout, et sur des scènes de plus en plus importantes – notamment à L'Olympia. En 1988, au faîte de leur carrière, les garçons de LSD se sont même embarqués dans une tournée à des milliers de kilomètres de Paris et sa banlieue, au Canada.

Le groupe a réussi à ne jamais être récupéré par telle ou telle mouvance particulière du rock'n'roll. C'est aussi cela qui a toujours participé à sa longévité. À leurs débuts, la foule qui venait les voir jouer était composée de skins et de punks, puis vite, elle s'est mélangée à des teddy boys, des psychos ou divers éléments issus de diverses fractions autonomes. Cet assortiment hétéroclite, typique des années 1980, a façonné la réputation des concerts de LSD : la rumeur courait qu'ils étaient chauds avant, mais aussi pendant et après. Néanmoins, il existait tout de même une certaine volonté de cohabitation autour du groupe et de sa musique. Aujourd'hui, presque 30 ans plus tard, cette génération a dépassé la cinquantaine – et de fait, plus personne ne risque rien.

Les photos d'Olivier Claisse publiées dans le livre étaient, pour la plupart, absolument inédites jusqu'à aujourd'hui. À travers elles, nous avons voulu dresser le panorama d'une époque. C'est pourquoi je pense que ceux qui ont vécu ces années vont s'y retrouver. Quant aux plus jeunes, ils s'apprêtent à découvrir un vrai groupe de rock, intègre et persévérant, qualités qui lui valent d'exister encore après toutes ces années. Toutes les photos proviennent du livre* Week-ends sauvages, édité chez *Serious Publishing.