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Einstein avait raison : on a bel et bien détecté des ondes gravitationnelles

Les prédictions d'Einstein sont confirmées par le projet LIGO. Décidément, le bonhomme avait du flair.

Depuis quelques jours, la communauté scientifique retient son souffle dans l'attente d'un événement de première importance : l'annonce de la détection d'ondes gravitationnelles issues de la collision de deux trous noirs stellaires, situés à plus de 400 megaparsecs (1,3 milliards d'années lumière), par le détecteur LIGO.

Cet événement a été confirmé aujourd'hui lors d'une conférence de presse, et dans une publication dans le journal Physical Review Letters réunissant plus de 1000 auteurs : des ondes gravitationnelles ont bel et bien été détectées par LIGO le 14 septembre 2015. Les trous noirs qui ont provoqué l'événement font respectivement 36 et 29 fois la taille de notre soleil, et ont fusionné en créant un puits gravitationnel supermassif (62 masses solaires), selon les estimations de l'équipe LIGO.

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La rumeur court depuis septembre 2015 chez les physiciens et les journalistes scientifiques, après que le cosmologiste Lawrence Krauss a laissé échappé un tweet malheureux :

Rumor of a gravitational wave detection at LIGO detector. Amazing if true. Will post details if it survives.

Lawrence M. KraussSeptember 25, 2015

Comme il s'agissait vraisemblablement moins d'une information en bonne et due forme que d'une manière de laisser entendre qu'il était dans le secret des dieux, son intervention a été prise avec prudence. D'ailleurs, les membres du projet LIGO (Laser Interferometer Gravitational-Wave Observatory) ont refusé de confirmer ou d'infirmer la nouvelle, annonçant qu'ils n'avaient pas fini d'analyser leurs données.

Plusieurs hypothèses ont alors été proposées. Soit l'onde gravitationnelle détectée était en fait un artefact observationnel (comme dans le cas de BICEP2 en janvier 2015), dissuadant les scientifiques de communiquer à son sujet, soit LIGO avait effectivement fait une découverte excitante qui exigeait de nombreuses vérifications avant de pouvoir conclure quoi que ce soit. Mais les physiciens sont des gens comme les autres ; ils ont parfois du mal à retenir leur langue et leur enthousiasme, en soirée, après quelques verres de vin.

Les deux détecteurs de LIGO, à Hanford, Washington, et à Livingston, en Louisiane, ont travaillé sans relâche entre 2002 et 2010 sans pour autant détecter directement des ondes gravitationnelles, ces oscillations de l'espace-temps prédites par Einstein dans le cadre de sa théorie de la relativité générale. Jusque là, nos instruments n'étaient pas assez puissants pour l'on puisse envisager de manière optimiste la probabilité d'une observation de ce genre. Mais cela a changé récemment, après que les détecteurs LIGO aient subi une mise à niveau pour la bagatelle de 200 millions de dollars en septembre 2015. Ils étaient désormais trois fois plus sensibles que leurs prédécesseurs.

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Ce petit rafraichissement des installations a d'ailleurs suffi à convaincre des membres de la communauté scientifique qu'une découverte était imminente. En d'autres termes, de nombreux physiciens s'attendaient au succès de LIGO avant même que Lawrence Krauss ne lance de rumeur.

Celle-ci s'est encore renforcée lorsque le magazine Science a communiqué la nouvelle de la fuite d'un mail du physicien Cliff Burgess. Le mail en question attestait qu'un article sur le sujet allait être publié dans Nature le 11 février 2016 et accompagné d'une conférence de presse. La tentative de Science de court-circuiter son rival n'aura guère fonctionné puisque la découverte sera publiée dans une série d'articles dans Physical Review Letters et Astrophysical Journal.

Pourquoi cet événement est-il si formidable ? L'espace-temps est courbé par la distribution de la matière et de l'énergie ; cette courbure elle-même va se propager sous forme d'ondulations (comme les vaguelettes provoquées par des ricochets dans l'eau), en particulier lorsqu'un corps très massif et très dense se déplace.

Ces ondulations, ce sont les ondes gravitationnelles. Parce qu'elles sont infinitésimales et se déplacent à la vitesse de la lumière, elles sont également très difficiles à détecter. Où elles l'étaient, jusqu'en 2015. À présent que nous sommes certains de pouvoir compter sur elles pour avancer nos connaissances en astronomie, des perspectives vertigineuses dans l'étude des trous noirs, des étoiles à neutrons ou encore des supernovae sont ouvertes.

Bien joué, LIGO.