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Alcool

Le gouvernement du Québec aide enfin les producteurs de fort

Les distillateurs québécois pourront enfin nous faire goûter leurs produits et nous vendre des bouteilles à la propriété, sans enfreindre la loi.

Avec le dépôt du budget 2017-2018, le ministre québécois des Finances Carlos Leitão répond aux demandes des distillateurs locaux, plus nombreux que jamais.

Jusqu'à maintenant, les titulaires de permis de distillateur n'avaient qu'un seul client au Québec : la Société des alcools du Québec (SAQ). Avec ce projet de loi déposé mardi, ceux qui produisent l'alcool sur place auront le droit de « vendre leurs produits sur les lieux de fabrication, pour consommation dans un autre endroit », peut-on lire dans le budget. On permet aussi la dégustation sur la propriété.

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Le producteur de brandy de pommes de Rougemont, Michel Jodoin, attend cette nouvelle depuis 1999. En fait, il n'y croyait plus vraiment. Dans sa cave, il y a des centaines de litres d'eau-de-vie millésimée qui prennent la poussière. Un certain tonneau contient même du brandy produit par son père dans les années 70. Il n'était pas question qu'il se retrouve un jour sur les tablettes de la SAQ.

« On attendait juste ça pour vendre ces bouteilles à la propriété, dit le distillateur. Les étiquettes sont prêtes! Y a pas une journée où l'on ne se fait pas demander notre brandy au comptoir. Ça va faire du bien de rafraîchir la Loi sur la Régie des alcools, des courses et des jeux. »

En effet, certains passages de ce document concernant les alcools distillés datent du temps de la prohibition, dans les années 20.

Le budget annonce aussi des mesures concrètes pour stimuler cette petite industrie. L'État fournira une aide qui correspond à 14 % des ventes pour « les spiritueux entièrement composés d'un alcool distillé par le fabricant, exclusivement à partir de matières premières québécoises ». Ce coup de pouce sera de 4 % pour les spiritueux composés partiellement de produits locaux.

De plus, pour encourager la production d'alcools vieillis, tels que le whisky, une bonification de deux dollars par bouteille sera ajoutée aux produits exclusivement québécois vieillis trois ans ou plus.

Il existe aujourd'hui 33 détenteurs de permis de distillation, partout sur le territoire de la province. « Au cours des cinq dernières années, les ventes de spiritueux du Québec, par l'entremise de la SAQ, ont crû de près de 30 % en moyenne annuellement », lit-on dans le budget.

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« On a fait beaucoup de représentation depuis deux ans, dit le secrétaire général de l'Association des microdistilleries du Québec, Jean-Patrick Laflamme. Les distillateurs sont des gens qui font des petits lots, par passion. C'est une façon d'occuper le territoire et de stimuler le tourisme. »

Les distillateurs avaient été laissés de côté lors du dépôt du projet de loi 88, sur le développement de l'industrie des boissons alcooliques artisanales, en décembre 2015. Le document adopté au mois de mai 2016 permettait aux brasseurs de vendre sur place, et aux producteurs d'alcools (sauf les distillateurs) de proposer leurs produits en épicerie.

Lancée en 2014, la distillerie Cirka est fin prête pour ce nouveau changement de législation. Dès l'ouverture, son local était muni d'une salle de dégustation, largement inutilisée jusqu'à maintenant.

« Pour certaines entreprises aux États-Unis, la vente sur place représente jusqu'à 40 % des revenus, dit le copropriétaire, Paul Cirka. Mais au-delà des profits, cette annonce nous donne plus de liberté. La liberté de faire des plus petits lots expérimentaux qui ne devront pas nécessairement être approuvés par la SAQ. »

Toutefois, le budget stipule que « seuls les produits fabriqués sur place et obtenus auprès de la Société des alcools du Québec pourront être ainsi vendus ». On ne se sait donc pas si les producteurs doivent d'abord vendre leur alcool à la SAQ, avant de le racheter, pour ensuite le mettre en marché à la propriété.

Le ministère des Finances n'a pas répondu à nos demandes.

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