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Ray Allen et l'art de lâcher prise

Ray Allen était l'un des plus grands scoreurs de son époque, et il est ensuite devenu un champion en ne gardant que l'essentiel de son jeu.
Photo by By Paul Keleher via Wikimedia Commons

« Je pensais qu'il était déjà à la retraite ». Voilà ce qu'a déclaré Rajon Rondo quand on lui a demandé son avis sur l'annonce de la retraite de Ray Allen mardi. On peut remettre en question le tact de Rondo, mais c'était aussi une réponse raisonnable pour le meneur des Bulls ou pour n'importe qui ayant appris cette information mardi. Allen n'a pas joué de match NBA depuis le 15 juin 2014, soit le cinquième et dernier match de la défaite du Miami Heat contre les San Antonio Spurs en finale. Plus tard cet été-là, LeBron James quittera Miami pour revenir aux Cleveland Cavaliers. Certaines rumeurs envoyaient aussi Ray Allen là-bas, mais au lieu de cela, il a fait l'impasse sur la première partie de la saison et s'est demandé où il pouvait bien encore jouer. Puis il s'est pris la deuxième partie de la saison pour continuer à réfléchir là-dessus. Allen n'a pas joué la saison dernière, à 40 ans : comme Rajon Rondo, on a tous compris ce que ça signifiait.

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Mais si l'annonce de Ray Allen était plus une confirmation qu'autre chose, il fallait tout de même la faire. La plupart des joueurs n'ont pas la chance de pouvoir annoncer leur retraite, le temps et l'usure le font pour eux, et la fin devient évidente. Allen a fêté ses 41 ans cet été, mais il avait une bonne raison pour faire l'annonce de sa retraite : cela semblait crédible qu'il puisse encore jouer une saison ou deux. Peut-être pas comme le joueur qu'il était au début de sa carrière, quand il était l'un des scoreurs les plus faciles et efficaces de la ligue. Et même peut-être pas forcément comme le joueur qu'il était durant le second acte, quand il a gracieusement dépouillé son jeu pour s'intégrer au milieu de multiples stars, une première fois à Boston, puis à Miami. Mais jusqu'à mardi et l'annonce de son désintérêt pour la balle orange, cela semblait imprudent d'imaginer qu'Allen n'aurait pas pu contribuer d'une façon ou d'une autre à la ligue.

C'est facile d'oublier à quel point Ray Allen était monstrueux quand il était au sommet de sa carrière. Il a toujours eu ce shoot-éclair, des premiers aux derniers moments de sa carrière, et c'est l'une des meilleures raisons pour croire qu'Allen pourrait très bien revenir sur sa décision, faire du vélo elliptique pendant deux semaines et aller jouer une vingtaine de minutes de basket pour n'importe quelle équipe NBA pour le reste de la saison, voire pour plusieurs saisons, selon sa volonté. Il n'y a pas besoin de décrire son shoot en réalité : c'était le shoot parfait. Tout le monde s'entraîne pour atteindre la perfection de ce geste. Personne durant la carrière d'Allen n'avait un shoot aussi esthétique que lui, et son aisance de métronome avait beaucoup à voir avec le fait que personne ne shootait autant que lui, dans des gymnases vides, avant et après les matches et les entraînements. C'était l'arme principale d'Allen mais c'était aussi le travail de toute une vie, et, indéniablement, un chef d'œuvre.

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Mais c'était, pendant la première décennie de la carrière de Ray Allen, juste une des armes d'un arsenal technique cohérent et équilibré. Le shoot créait les circonstances pour des pénétrations éclairs. Les capacités athlétiques qui ont permis à Allen d'affiner ce shoot parfait se traduisaient aussi dans ses violentes finitions au cercle. Tout faisait sens, tout était smooth et homogène, mais Allen pouvait aussi venir vous dunker dans la gueule à tout moment.

— SLAM Magazine (@SLAMonline)November 1, 2016

Ray Allen était le meilleur shooteur d'élite d'une époque qui semble bien loin désormais : ses 269 trois points en 2005-06 ont été un record NBA à l'époque, mais celui-ci a été dépassé à trois reprises par Stephen Curry à chaque fois. Le record tient à 402 trois points en une saison désormais, ce qui fait que Curry shoote 1,33 fois plus qu'Allen quand il était à son top niveau. C'est son génie qui l'a fait se maintenir à ce niveau aussi longtemps. La chose dont il faut se souvenir à propos d'Allen, et la chose qui sautait aux yeux quand il a commencé à affiner son jeu pour n'en garder que l'essentiel, c'est que tout ce qu'il faisait dépendait de tout le reste, tout tenait parfaitement ensemble.

Les basketteurs NBA ont souvent du mal à gérer la vieillesse. Beaucoup ont gardé les mêmes tendances stupides, répètent bêtement les mêmes gestes qui les ont menés au plus haut-niveau, mais qui désormais ne sont plus aussi efficaces. Il n'y a qu'à voir Kobe sur la fin, détruisant tout en essayant de créer, maltraitant son propre corps, simplement parce qu'il ne voulait rien changer à son jeu. C'est comme ça qu'un basketteur peut finir, et c'est une voie tragicomique pour une ancienne superstar.

Ce qui est exceptionnel avec Allen, à la fois quand il était en pleine possession de ses moyens et par la suite, c'est qu'il était discrètement brillant, et qu'il a réussi à bien gérer son déclin. Certains aspects de son jeu sont partis, parfois à cause du temps qui passe, et il les a laissés partir. Et il a continué de gagner de cette façon, en gardant ce qu'il pouvait aussi longtemps qu'il le pouvait, et en choisissant ses combats, évitant ceux qu'il ne pouvait pas gagner. C'était assez logique du coup qu'il sache mieux que nous à quel moment il allait abandonner le basket. Et c'est assez logique aussi, qu'il s'en soit rendu compte un peu avant tout le monde.