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Zika

Le monde se met en alerte face au virus Zika

Sonnette d’alarme tirée par l’OMS, premiers cas signalés en Europe et autorités françaises appelant les femmes enceintes à ne pas se rendre dans les zones infectées, le virus inquiète désormais hors du foyer sud-américain.
Moustique Aedes (Image via Wikimedia Commons / Centers for Disease Control and Prevention)

Très présent à travers l'Amérique du Sud, le virus Zika inquiète désormais l'Europe où plusieurs cas importés par des voyageurs ont été signalés ces dernières semaines. Ce virus proche de la dengue et du chikungunya se transmet uniquement par l'intermédiaire des moustiques Aedes, qui réapparaîtront dans le sud de l'Europe au printemps prochain.

Ce jeudi, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a tiré la sonnette d'alarme concernant ce virus qui mobilise déjà 220 000 soldats au Brésil et fait l'objet de nombreuses alertes gouvernementales. D'après des responsables de l'OMS cités par le New York Times ce jeudi, le virus Zika « se répand désormais de manière explosive » en Amérique Latine, et pourrait affecter 3 à 4 millions de personnes à terme.

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Lors d'une réunion avec ses équipes de santé tenue ce mardi, le président américain Barack Obama a insisté sur la « nécessité » de développer des tests permettant de repérer le virus Zika ainsi que des vaccins, tout en informant les Américains sur ce virus. La Maison Blanche a plusieurs fois expliqué qu'il y a de grandes probabilités que le virus Zika s'installe prochainement aux États-Unis.

Ce jeudi, la ministre française de la Santé, Marisol Touraine, a formellement déconseillé aux femmes enceintes de se rendre dans les zones où sévit le virus Zika. Les départements d'outre-mer — notamment la Guyane et la Martinique — sont concernés par cette mise en garde.

Face à cette épidémie qu'elle juge « sérieuse », la ministre s'est dite « préoccupée » par certains effets de cette maladie sur le corps humain.

« Ce virus est suspecté de causer des troubles pour le foetus, et de déboucher sur des cas de microcéphalie », nous a expliqué le Dr Jose Muñoz, un médecin spécialisé dans les maladies tropicales à l'Hôpital Clinique de Barcelone et chercheur à l'institut ISGlobal.

Dans un entretien téléphonique accordé à VICE News ce jeudi après-midi, le Dr Muñoz évoque de « fortes suspicions » du corps médical concernant le lien entre ce virus et la microcéphalie qui affecte les nouveau-nés.

« Le lien de causalité n'a pas encore été prouvé », nous a-t-il indiqué, « mais les premières conclusions devraient être rendues d'ici quelques semaines, quelques mois tout au plus. »

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La microcéphalie est une malformation physique qui se manifeste par une boîte crânienne beaucoup plus petite que la moyenne à la naissance, entraînant un handicap intellectuel et moteur, voire la mort de l'enfant. Plus de 3 800 cas de microcéphalie ont été enregistrés au Brésil ces neuf derniers mois, contre à peine 150 cas pour l'ensemble de l'année 2014.

Au-delà des effets sur les nouveau-nés, le virus Zika peut également affecter les enfants et les adultes. Dans certains cas, ce virus peur provoquer le syndrome de Guillain-Barré, une maladie encore très peu connue qui entraîne des paralysies musculaires importantes.

Craintes en Europe

Ailleurs en Europe, des mises en garde concernant le virus Zika ont été lancées, notamment par les autorités allemandes, britanniques et portugaises. La Direction générale de la santé au Portugal (DGS) a par exemple invité les touristes se rendant dans les pays concernés à « se protéger des moustiques en choisissant des vêtements appropriés, des répulsifs, préférer les environnements climatisés et suivre les recommandations des autorités locales ».

« Le virus Zika est proche de la dengue, du chikungunya et de la fièvre jaune », nous a expliqué le Dr Muñoz. Ce virus se transmet exclusivement par l'intermédiaire des moustiques Aedes, lors d'un processus de contamination assez simple : le moustique pique un individu contaminé, porte ensuite le virus qu'il transmet à un autre individu à la prochaine piqûre.

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« En Europe, c'est le moustique Aedes Albopictus — que l'on appelle aussi "moustique tigre" — qui risque de transmettre le virus Zika », nous a expliqué le Dr Muñoz. Très présent autour du bassin méditerranéen, ce moustique réapparaît généralement au printemps. « Mais avec cet hiver très étrange, les températures douces, il y a des chances pour que ce moustique apparaisse à certains endroits », souligne le spécialiste.

Les symptômes du virus Zika sont très proches de ceux de la dengue. Les personnes infectées se plaignent de fortes fièvres, d'éruptions cutanées et de conjonctivite. Dans 70 à 80 pour cent des cas, les individus infectés par le Zika ne présentent aucun symptôme, ce qui complique davantage les campagnes de dépistage.

Si tous les cas recensés à travers l'Europe sont pour l'instant des cas « importés » — c'est-à-dire des voyageurs contaminés lors d'un séjour dans les zones infectées — le retour des moustiques tigres pourrait aider le virus à s'installer, créant ainsi les premiers foyers autonomes de Zika sur ce continent.

Depuis sa découverte en 1947 dans une forêt d'Ouganda (Afrique), le virus Zika n'a cessé de se propager en faisant cap vers l'est. D'après un récent article publié par des chercheurs de la Lancaster University, des cas de Zika ont par la suite été observés en Malaisie, Indonésie et au Pakistan à la fin des années 1970, puis dans des îles du Pacifique telles que la Micronésie en 2007 et en Polynésie Française en 2013, pour finalement apparaître au Brésil en mai 2015.

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À l'approche du carnaval de Rio, et à quelques mois seulement des prochains Jeux Olympiques qui seront organisés autour de Rio, le Brésil est au coeur d'une épidémie qui s'étend à tout le continent. Afin de prévenir d'éventuelles déformations chez les nouveau-nés, plusieurs pays d'Amérique du Sud ont récemment appelé les couples à « reporter leur grossesse ».

À lire : Le virus Zika se répand très rapidement à travers le continent américain

Dès les premiers mois de l'épidémie observée au Brésil, les autorités sanitaires européennes ont pris très au sérieux la menace sanitaire que constitue Zika. En août dernier, une importante opération de pulvérisation d'insecticide a par exemple été menée dans le parc floral de Vincennes (est de Paris). Des moustiques tigres y avaient été aperçus.

Si le virus Zika a « de grandes chances » de se propager en Europe dans les prochains mois, cette épidémie pourrait être de moins grande ampleur que celle qui touche actuellement l'Amérique Latine d'après le Dr Muñoz.

« Nous prenons en compte deux paramètres pour établir nos scénarios : le nombre de cas importés et les résultats de nos programmes de surveillance des moustiques », nous explique le Dr Muñoz. En Espagne, les habitants peuvent signaler la présence de moustiques tigres grâce à l'application mobile Atrapa el Tigre (en français « Attrape le tigre »).

D'autres facteurs pourraient aussi limiter la propagation de ce virus en Europe. « Par exemple, nous ne savons pas encore si le moustique tigre présent chez nous est capable de transporter le virus de la même manière que les autres moustiques d'Amérique latine. » nous indique le Dr Muñoz.

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Dans un communiqué publié ce jeudi, l'OMS a annoncé qu'une réunion de crise du Comité international des urgences sanitaires aura lieu à Genève (Suisse) le 1er février prochain. Aux vu des dernières données disponibles, ce comité sera alors chargé d'établir si oui ou non le virus Zika doit être ajouté à la liste des priorités de l'OMS.


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Moustique Aedes (Image via Wikimedia Commons / Centers for Disease Control and Prevention)