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Crime

Beaucoup de questions après des fuites sur un nouveau porte-avions chinois

Cette semaine, un média d’État chinois a fait une bourde en diffusant accidentellement un reportage qui mentionnait la construction d’un nouveau porte-avions.
Photo via Wikimedia Commons

Cette semaine, un média d'État chinois a fait une bourde en diffusant accidentellement un reportage qui mentionnait la construction d'un nouveau porte-avions à Dalian, une ville en bord de Mer de Chine orientale, non loin de la frontière avec la Corée du Nord. À Dalian on trouve un immense chantier naval où sont construits différents types de navires, dont des navires de guerre.

Dans un moment d'excitation enthousiaste, un officiel du gouvernement a laissé échapper qu'une entreprise de Dalian était vraiment très, très, très, contente d'avoir « décroché un contrat pour la construction du second porte-avions chinois ».

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Le hic, c'est que l'information était techniquement « secrète ».

Les autorités ont rapidement essayé d'effacer le sujet des pages des sites médias ou des réseaux sociaux. Ils n'ont pas été suffisamment rapides pour empêcher le grand public de se passionner pour cette affaire.

L'idée d'un deuxième (voire d'un troisième et même d'un quatrième) porte-avions chinois n'est pas un scoop, on est au courant que le pays y pense depuis un certain temps. La Chine a donc déjà un porte-avions, un vaisseau construit par les Soviétiques, qui a été vendu par l'Ukraine en tant qu'épave. Ils ont mis des années à le retaper.

Cette nouvelle est donc un non événement, sauf à considérer que cette histoire de fuite est une nouvelle en soi. Toutefois, ce sujet revenant sur la table, des questions surgissent sur le sens des porte-avions Chinois, et de l'attitude des pays étrangers face à cette force. Faut-il se terrer dans des abris atomiques ou parfaire son mandarin ?

Pourquoi des porte-avions chinois ? La réponse est la suivante : personne n'en sait fichtre rien.

C'est que l'ambition chinoise en la matière va devoir mûrir pendant des décennies. Et les programmes militaires à long terme du pays ne sont pas imperméables aux débats politiques, budgétaires et universitaires qui sont la plaie de toutes les armées du monde.

Il faut des années et des années pour mettre au point une force aéronautique navale. Pas mal de pays ont des porte-avions, mais peu sont capables de les exploiter au maximum de leurs capacités. Les technologies impliquées dans le fonctionnement d'un porte-avions sont complexes et pointues. Par exemple, les catapultes à vapeur des porte-avions américains qui servent à propulser les avions sur le pont coûtent un bras et sont très sophistiquées. Le Brésil et la France sont les seuls pays, avec les États-Unis, à savoir construire et utiliser une catapulte à vapeur. Il y a davantage de pays qui ont préféré une autre prouesse technique : des sous-marins nucléaires capables de lancer des missiles depuis les profondeurs.

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Et encore on ne parle là que des décollages. Les atterrissages c'est encore autre chose. Il faut des pilotes capables de quasi s'écraser sur une plateforme ridiculement petite, flottante et en mouvement au beau milieu d'un océan.

Le bâtiment ne se suffit pas à lui-même. On ne peut pas faire naviguer un porte-avions seul. Il lui faut un entourage non négligeable, composé de sous-marins, de navires pour l'encadrer, et d'avions de patrouille pour le protéger d'éventuelles attaques. Ces éléments de soutien ont besoin de ravitaillement et notamment de faire le plein régulièrement. Une marine complète doit donc se cordonner dans ses opérations, avec des éléments qui croisent dans d'autres mers, et avec des forces terrestres. Ce niveau de coopération et la complexité d'une telle chaîne de commandement est un véritable défi que la Chine ne peut pas relever en prenant exemple sur une autre nation possédant un porte-avions, les divergences entre les nations, sur les plans tactiques et stratégiques sont trop importantes.. Il lui faudra donc écrire son propre manuel.

Enfin, la Chine va sûrement débattre de ce qu'elle veut mettre dans ses porte-avions. Les discussions vont certainement rapidement porter sur le type de propulsion : conventionnel ou nucléaire ? Quel type d'avions ? Quel armement ? Comment adapter les aéronefs à un lancement depuis le pont ? Le genre de détails qui prendront des années voire des décennies à être mis au point.

Le plus intéressant avec cette histoire de porte-avions, c'est de voir ce qui se joue politiquement derrière cette dépense gargantuesque, comment la Chine entend exploiter cet outil d'un prestige militaire nouveau.

Mais ça, c'est une autre histoire qu'on se garde pour un autre jour - peut-être pour une prochaine fuite accidentelle dans les médias chinois.

Suivez Ryan Faith sur Twitter: @Operation_Ryan

Photo via Wikimedia Commons