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Sexe

J’ai passé 4 heures à essayer d’atteindre l'orgasme intégral

Ma quête de la jouissance transcendantale, dont me parlent les femmes (et parfois les hommes).
J’ai passé 4 heures à essayer d’atteindre l'orgasme intégral
Photo par Becca Tapert via Unsplash

Ces derniers temps, quand mes partenaires ou mes amies féminines me décrivent leurs orgasmes, j’ai plutôt du mal à m’identifier à ce qu’elles me racontent. Souvent, elles parlent d’expériences qui remplissent tout le corps, avec des sensations de picotement aux extrémités qui peuvent rester jusque dans les 30 minutes qui suivent. Non seulement mes orgasmes ont une zone plus restreinte et sont plus brefs, mais leur puissance semble également diminuer avec les semaines. Ne vous méprenez pas, ça vaut toujours mieux que de se casser une jambe. Mais ils sont loins de la jouissance transcendantale dont me parlent les femmes (et parfois les mecs). En fait c’est toujours le même mec, celui qui va au Burning Man chaque année.

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Mes orgasmes tout sauf survoltés m’ont déjà poussé à penser que je serais un bon candidat pour une thérapie de testostérone - ils sont un des nombreux symptômes qu’on associe à un taux bas d’androgène. Cela dit, quand on a testé mon niveau de « testo », il est en fait apparu qu’il était d’un bon standing pour un mec de mon âge.

Cette conclusion signifiait que j’allais devoir regarder plus loin que l’ordonnance de mon médecin afin d’obtenir un boost orgasmique. Au cours de ma quête, je suis tombé sur une professionnelle du tantrisme basé à Manhattan qui proposait un truc appelé « orgasme intégral ». Grâce au site de Michiko, j’ai conclu qu’elle employait diverses méthodes - dont des exercices de respiration, d’étirement, sonores, visuels, et de massage - pour aider ses clients à atteindre chez eux, de différentes manières, « des orgasmes plus complets et plus forts ». Le site internet prévenait qu’une session durait 3 heures.

25 années d’expérience et 1000 clients orgasmiques, les références étaient tentantes. Mais en étant une sorte de sceptique et de matérialiste de la métaphysique, j’étais déjà prédisposé à mener mon enquête quelque part d’autre. Mais là, j’ai vu une vidéo appelée « Ma*Star*Bation », dans laquelle une Michiko béate brandit un synthétiseur. Le clip et la chanson étaient délicieusement idiots, complètement farfelus, tellement à l’opposé de ce à quoi je m’attendais d’une professionnelle du tantrisme qu’en dépit de moi-même, j’ai immédiatement pris rendez-vous.

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J’arrive devant un immeuble de Manhattan particulièrement sordide et je sonne à l’interphone « Michiko ». Quelques minutes plus tard, elle m’ouvre avec un grand sourire, me fait un bref câlin et me conduit en haut d’une cage d’escalier plutôt crasseuse et déprimante. Elle me conseille vivement d’utiliser les toilettes communes dans l’entrée. « Kiki » me prévient qu’elles ne sont « pas très propres ». Je sors des toilettes parfaitement décrites et la suit dans une pièce de 10 mètres carrés qui contient une table de massage et qui est envahie par de la fumée d’encens.

Kiki m’invite à m’asseoir en face d’elle, les jambes croisées, sur le peu d’espace qu’il reste par terre. Elle me demande si je fais face à des problèmes. Je lui réponds que je cherche à retrouver la puissance orgasmique et elle me dit qu’elle peut m’aider. Elle poursuit en me disant qu’elle travaille avec des gens seuls et avec des couples. Avant que je puisse lui demander comment on peut faire rentrer plus de deux personnes dans cette petite boîte, elle me demande de me déshabiller et je me retrouve au beau milieu d’une séance guidée de relaxation.

Kiki se met elle-même en bikini, d’un bleu vif comme ses cheveux et sa robe, qui rend l’environnement encore plus terne. Elle a une voix tellement douce que j’ai du mal à pleinement recevoir ses instructions avec le son de la musique d’ambiance. « Relâche tes épaules », « Laisse de l’espace entre tes côtes ». Il y a aussi son bal chantant et deux personnes bourrées qui braillent en bas de la rue.

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Elle me guide à travers une série d’étirements des jambes et d’exercices de respiration de plus en plus périlleux puis m'indique un procédé dans lequel je dois compresser de l’énergie à travers mon corps pour accomplir une sorte de circuit énergétique. Il y a mon « circuit de base », qui comprend l’anus, les organes génitaux, le nombril, le diaphragme, le cou et la langue. Après plusieurs circuits passés à verrouiller cette énergie, nous passons à l’exercice d’échauffement suivant.

Le Kundalini est décrit par l’expert américain en religions comparées Joseph Campbell comme comme une énergie féminine latente qui s’enroule autour de la base de la colonne vertébrale (cf : le yoga Kundalini). Kiki me fait me mettre dans une position qui selon elle va m’ « élever ». J’avais déjà entendu parler du yoga Kundalini avant. Avec mes bras sur les côtés, ma tête et mes jambes à 15 centimètres au-dessus du sol, Kiki me guide à travers plusieurs représentations mentales qui vont m’aider plus tard, selon elle. Un autre exercice consiste à fixer l’autre dans les yeux - une expérience intense avec qui que ce soit, encore plus avec une mystérieuse inconnue en bikini - et dont le point culminant est de placer la paume de sa main sur le coeur de l’autre et de « s’injecter de l’énergie » à tour de rôle.

Il est difficile de savoir quoi faire avec des instructions du style « rassemble l’énergie dans ta main et injecte-la moi dans la poitrine » mais je dois maîtriser le truc parce que dès que j’essaye, Kiki convulse, ses yeux tourbillonnent et son sourire s’agrandit. C’est le même genre de réaction que j’ai le souvenir d’avoir du temps où mes orgasmes tiraient de tous les côtés. Je veux retrouver ce sentiment.

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« Maintenant à toi de recevoir mon énergie », dit-elle.

Après plus d’une heure d’exercices intenses de préparation, j’espérais et je m’attendais à ressentir une ruée d’énergie dans la poitrine au moment de son lâcher. Malheureusement ça n’a pas été le cas - et je n’ai pas pensé que ça apporterait quelque chose de faire semblant. Après environ 5 tentatives de dons et de réceptions possibles mais involontaires d’énergie, j’ai pu voir que, je ne faisais pas les choses correctement.

« Essaye d’imiter ce que je fais », dit Kiki, qui frémit alors que je jette un sort sur à bout portant sur son sternum. Je savais que la simulation du succès était une stratégie efficace dans de nombreux domaines mais je n’aurais pas pensé que cela s’appliquait au tantrisme sexuel. Je fais de mon mieux pour imiter ses frissonnements d’extase en utilisant le meilleur de mes maigres capacités. Peu après, Kiki me demande de monter sur la table.

S’en est suivi un long et pesant massage effectué par des gestes petits et légers, accompagné par de remarquables bruits de bouche de Kiki. Une énergie sexuelle s’est brièvement manifestée pendant cette heure où j’avais la tête vers le bas, mais elle est repartie avant que je ne me retourne.

Après m’être mis sur le dos, Kiki me masse puis embrasse mes pieds, mes chevilles, mes mollets et mes cuisses pendant un moment. Pendant qu’elle m’embrasse, elle place les doigts de sa main droite sur mon chakra majeur - une zone qui correspond en gros au périnée - et les doigts de sa main gauche sur mon chakra sacré, qui s’aligne sur l’élastique de mon caleçon.

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Très déterminée, Kiki fait vibrer ses doigts sur ces deux points pendant une quantité de temps considérable. J’ai eu l’impression qu’elle s’attendait à ce que j’aie une réaction, apparemment dure à provoquer. Alors qu’elle continue à me prodiguer ses bons soins les plus honnêtes, elle place ma main sur sa poitrine mais il est devenu très clair que tout ce qui était censé se produire ne se produirait pas.

« Est-ce que la plupart de tes clients ont une réaction à ce stade » ? C’est la question que je lui pose alors que je me rends compte que la quatrième heure de notre session est bien entamée.

Elle me dit que oui, et de la manière la plus gentille possible, confirme que je suis effectivement un client difficile. Kiki a bien fait ses devoirs, et s’est renseignée sur mes exploits les plus lascifs réalisés au nom du journalisme. « Je pense que c’est peut-être parce que tu as beaucoup fait l’amour », dit-elle, cherchant une explication. « La plupart des clients ressentent plus ce que je fais ».

Ces clients, il faut le dire, claquent pas mal d’argent. Pas moi. La session que j’ai eu gratuitement coûte ordinairement 340 $. Vu qu’ils mettent sur la table de l’argent dûment gagné, je me demande si ses clients qui paient sont plus ouverts que moi et si du coup ils sont plus réceptifs à l’énergie qu’offre Kiki (ou pas). Mais là, d’un coup, je ressens une sorte de picotement, puis un genre de bourdonnement dans mon bras droit puis dans mon bras gauche. Je suis épaté par ce progrès, j’en parle à Kiki, tout excité, qui redouble d’efforts. Est-ce que je suis sur le point d’être converti en un convaincu des énergies subtiles ? Est-ce que je suis sur le point d’avoir un incroyable orgasme intégral ? Suis-je sur le point de faire des excuses à ma propre mère et à mon meilleur ami - qui pratiquent tous deux le reiki - pour m’être gentiment moqué de toutes leurs expériences ?

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Cependant au bout de 10 minutes, le sentiment d’être agrippé à une barrière électrique de basse puissance s’évapore. Je commence à me faire une raison sur le fait que je suis un moldu et que j’ai escaladé une longue piste de ski pour une toute petite glissade.

« Je veux essayer une dernière chose », dit Kiki, qui se rend compte à quel point il se fait tard.

Elle m’invite à m’asseoir en tailleur par terre. Elle me demande mon consentement - que je donne de tout mon coeur - pour s’asseoir sur mes genoux. Les fans du Kamasutra reconnaîtront la position du lotus. Le projet est de pousser ma poitrine contre la sienne, de manière à injecter directement l’énergie de mon coeur dans le sien. Elle stocke ensuite cette énergie dans son chakra sacré - celui dans l’aine - avant de me la réinjecter directement. À ce stade, je dois la stocker dans le chakra de mon coeur et lui renvoyer de façon à créer un circuit.

Kiki a été incroyablement gentille et bienveillante envers moi, tellement qu’il est possible que je me sois convaincu à sentir quelque chose, mais en vérité, je pense que j’étais simplement très excité à l’idée de faire pression sur le corps d’une autre personne, presque nue elle aussi.

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