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La fête est finie : Zac Carper de FIDLAR nous a parlé de son nouvel album et de sa nouvelle vie

« Je prenais de l'héro et de la meth en même temps. J’étais arrivé à ce niveau de folie. Je serais devenu une épave si j'avais continué. »

Toutes les photos sont d'Alice Baxley

Personne ne vous prévient jamais de l’énorme bordel auquel vous aurez à faire face afin d'accéder à l'âge adulte. Zac Carper, le leader du groupe de skatepunk californien FIDLAR, en a fait les frais. Désormais sobre et âgé de 28 ans, il a survécu à l'enfer des drogues et de la dépendance à l'alcool, le vieux poncif du rocker auto-destructeur. En 2013, les morceaux « sous influence » de FIDLAR, un groupe jusqu’alors inconnu, sont devenus tellement populaires qu’il leur a suffit d’un seul album pour tourner à travers le monde avec des groupes comme Pixies et les Hives. Trois ans à balancer les mêmes singles ultra efficaces et à diffuser un message très clair : faire la fête jusqu’à en crever. Mais pour Carper, cette fête permanente devenue leur marque de fabrique s’est essoufflée et ils s’en sont finalement lassés. Après l'avoir réalisé, il a pris la décision d’entrer en cure de désintoxication pour venir à bout de ses addictions à l’héroïne, au crack et à la méthamphétamine. Si leur premier album était une fête sans fin, leur second, Too, est la méchante gueule de bois qui s’en suit.

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Bien que leurs nouveaux morceaux conservent la même énergie que tout bon morceau de FIDLAR, il n’est plus question d’entendre vociférer « je bois de la bière, va te faire foutre » ou « j’ai plein de coke dans le cerveau. » Cette fois-ci, les Californiens tombent le masque et reviennent sur terre. Souvent, quand un musicien se remet de son addiction et devient clean, son groupe ne tient pas le choc. Mais la sobriété de Carper a permis de laisser place à un FIDLAR encore plus honnête et à fleur de peau, oui, n'ayons pas peur des mots, un FILDAR mature. Il est parfois nécessaire d’en arriver à gerber sur sa propre ombre pour réaliser qu’il y a un problème latent. On a passé quelques minutes avec Zac pour qu'il nous parle de la nouvelle orientation du groupe, de leur public adolescent, de sa jeunesse à Hawaï et du retour des guitares.

Noisey : Salut Zac. Too est votre second album, deux ans après le premier. Qu’est-ce qui a pris autant de temps ?
Zac Carper : On a vécu une expérience assez dingue. On a sorti notre premier album et on est parti en tournée pendant 3 ans ! On a eu beaucoup de hauts et de bas. On a beaucoup fait la fête, et au bout d’un moment, quand tu fais trop la fête, tu finis par t’en lasser…

C’est marrant de la part de FIDLAR qui est considéré comme LE groupe de fêtards par excellence.
Je sais !

Il vous est arrivé quoi après ? Vous avez eu besoin d’aller voir ailleurs pour retrouver l’inspiration ?
Oui, bizarrement. Quand on a fait le premier album, on buvait beaucoup et on prenait beaucoup de drogues, donc il a été très influencé par notre environnement. Contrairement à ce que l’on a pu nous dire, on n’a jamais enregistré un album pour faire la fête. J’ai juste écrit des morceaux sur l’alcool et la drogue parce que j'en consommais beaucoup à ce moment-là.

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Ce nouvel album se concentre presque uniquement sur le fait que tu redeviennes sobre. Ce thème revient souvent dans les paroles. Tu veux m’en parler un peu ?
Il était moins question d’être sobre que d’essayer de faire face à la vie sans avoir besoin de prendre de l’héroïne ou de la meth. Tu vois ce que je veux dire ? Ca m'a servi de béquilles pour affronter la vie.

Ouah. La meth et l’héroïne sont des drogues relativement différentes.
Ouais, je sais. Ce qui est encore plus dingue, c’est que je les prenais en même temps. J’étais arrivé à ce niveau de folie. J’étais complètement à la ramasse. Et je devais avoir un bon timing, parce que je pouvais tripper sous speed pendant une semaine d’affilé, alors que je ne mettais que 8 heures à redescendre après une prise d’héroïne. C’était hyper étrange. Et puis je finissais par m’injecter plus de speed que d’habitude et je restais défoncé pendant 2 ou 3 semaines. J’étais vraiment une épave. J’ai dû prendre un peu de temps pour moi, pour savoir où j’en étais.

Tu as composé pendant le traitement ?
J’ai beaucoup écrit à ce moment-là, en particulier quand on était sur la route. Le plus dur, c’est l’après-traitement. Ce qu’ils ne te disent pas quand tu prends ton traitement c’est que dès que tu arrêtes, tu deviens complètement fou.

Ouais, tu te sens protégé quand tu es encore en cure, mais le retour dans le monde des adultes ensuite, c’est une autre histoire.
Ouais, quand j’ai arrêté le traitement, je fumais deux paquets de clopes par jour. J’ai eu une lésion de la colonne vertébrale, j’ai souffert de douleurs permanentes pendant au moins 8 mois, et en plus de ça, je devais faire face à une vie totalement différente après le traitement.

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Comment le reste du groupe a réagi à tout ça ? Ils faisaient quoi pendant que tu étais en cure de désintox ?
Ils faisaient leurs propres trucs. On a tous besoin de passer du temps loin les uns des autres, pour prendre du recul. C’est bizarre, quand tu montes ton groupe, t’es avec tes meilleurs potes, tu veux que vous viviez le truc à fond. Je me suis toujours dit que je ne voulais pas qu'on devienne comme tous ces groupes où les membres finissent par ne plus pouvoir se piffrer.

C’est très courant.
Ouais, c’est ce que tout le monde dit. Mais, en fait, on s’entend toujours hyper bien. On a surmonté nos problèmes. C’est la même chose quand tu as des colocataires, tu les adores, mais au bout d’un moment, tu as aussi envie d’être tout seul.

Ce nouvel album est assez sombre. Par exemple, ce passage : « I got drunk and barfed on my shadow » [« je me la suis collé et j’ai gerbé sur ma propre ombre »]. J’ai l’impression que c’est une métaphore, comme quoi il est maintenant temps de redevenir sobre. Après, j’interprète peut-être trop.
Non, ça m’arrive souvent. Ca résume assez bien ma vie.

Vous avez joué avec les Pixies. C’était comment ? On ne pense pas forcément aux Pixies quand on écoute FIDLAR.
Ouais, c’est ce que Frank Black m’a dit. Le premier soir où il nous a vu jouer, il m’a fait : « Avec Pixies on oscille entre des trucs calmes et plus brutaux, un schéma calme/fort/calme. Mais vous c’est plutôt fort/plus fort/EXTRÊME. »

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La majorité des fans de FIDLAR sont des ados. J’ai jamais vu autant d’ados de ma vie qu’à votre concert. Ils faisaient des tonnes de selfies dans le pit. J’avais l’impression que c’était le premier concert pour beaucoup de ces kids. Ca te fait quoi d’avoir une fan-base aussi jeune et loyale ?
Ouais, c’est bizarre qu’il y ait tous ces ados quand même. Je ne pense pas qu’ils pigent tout de suite les paroles. C’est vraiment étrange, parce que comme tu l’as dit, on a pas mal de morceaux sombres. Même sur le premier album. Mais ces kids se pointent à nos concerts et passent un super bon moment, c’est assez drôle. J’aime bien quand ils s’éclatent, ça rend le concert encore plus fun. Ca me rappelle la première fois où j’ai déménagé à Los Angeles, et tous les concerts auxquels j’ai assisté plus jeune. J’allais voir les Black Lips, j’étais intenable. C’était comme aller dans une rave, tu vois ? Tu ressens un truc dingue. J’ai grandi à Hawaï, c’était infernal. Il n’y avait même pas de disquaire sur l’île. La seule chose qu’on avait c’était la radio, donc j’ai grandi en écoutant Green Day, Blink-182 et Sublime. J’ai découvert Black Flag après mes 21 ans…

Putain.
Je ne savais absolument pas ce que c’était. À Hawaï, tout le monde se fout de ce genre de trucs. J’écoutais ce qui passait à la radio, c’était tout ce que j’avais.

Le son de FIDLAR pourrait être la combinaison de tous ces groupes. En quoi Too est différent du premier album et du reste ?
Le procédé d’écriture était complètement différent. Il y a beaucoup plus d’émotions dans cet album. Quand je l’ai fait écouter à ma soeur, elle m’a répondu « C’est un putain d’album emo, mec. » Il y a beaucoup d’émotions et de vérités sur ce disque, alors que sur le premier, on cherchait plus à s’extraire de la réalité.

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Tu es sobre aujourd’hui ?
Oui, ça fait un bail que je n’ai pas bu.

C’est cool, félicitations.
Merci. Après je sais pas. Je suis sobre mais je ne sais pas si ça va durer, c’est tout le problème… Mais bon, comme je te l’ai dit, quand tu commences à prendre vraiment beaucoup de drogues, tu t'en lasses. Comme tout. C’est devenu très chiant pour moi, je ne me déplaçais jamais sans avoir un dealer à proximité. J’étais totalement pris au piège.

Ca a l’air d’être crevant cette vie…
Ouais, surtout quand t'es en tournée. Je me suis fait tellement de fix d’héro dans le van… Et j’ai dû me piquer tellement de fois avant de me dire que j’irais bien mieux sans ça… C’était ça le plus dur. J’ai tout arrêté et j’ai dû reprendre ma vie en main. J’ai écrit beaucoup de morceaux là-dessus.

Quelle part de cet album a été écrite quand tu étais sobre ?
90%, je dirais.

La scène skate-punk de LA. est plutôt cool actuellement avec des groupes comme Wavves, Audacity, The Orwells. FIDLAR se situe où par rapport à eux ?
FIDLAR est plutôt antisocial, on ne traîne pas avec les autres groupes. Mais j’aime le fait que les gens se mettent à jouer à nouveau du rock. C’est vraiment ce qui me plaît, en particulier à Los Angeles. La musique bien lourde, avec beaucoup de guitares revient en force. Quand on a commencé FIDLAR, on ne rentrait dans aucune case. On n’était pas du tout dans les délires surf-punk et Burger Records, ni dans la scène garage du moment. On était trop punk pour le garage et trop garage pour le punk. On était le cul entre deux chaise, on ne savait pas où se foutre.

C’est idiot de vouloir classer un groupe dans un genre à tout prix.
Ouais, c’est has-been de faire ça. Surtout en Europe, les kids là-bas ne se revendiquent plus d’aucun genre. Ils écoutent tout.

Quel est ton morceau favori du nouvel album ?
« 40 oz » est hyper fun à jouer. On n’a pas encore beaucoup joué nos nouveaux morceaux en live. On en a fait quelques uns comme « Punk » par exemple, et quand on le joue ça ressemble à une putain de bonne jam session.

Le morceau « West Coast » est vraiment à la croisée de l’ancien et du nouveau FIDLAR.
Ouais, c’est un morceau super blink-182.

Et ouais, la boucle est bouclée ! Bryn Lovitt reste sobre sur Twitter.