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Glassine a sorti un album entièrement composé de sons enregistrés dans des magasins de musique

Danny Greenwald s'est amusé à traîner dans tous les Guitar Center des États-Unis pour enregistrer des types en train d'essayer du matos et en faire un disque. Interview et écoute intégrale.

Le monde entier l’attendait, le voici enfin : le premier disque composé à partir de sons enregistrés à Guitar Center, la plus grosse chaine de magasins de musique aux États-Unis. Et ce qui est encore plus fou, c’est que ce n’est pas le premier.

Danny Greenwald, un musicien de 30 ans originaire du Maryland plus connu sous le nom de Glassine, a enregistré des tonnes de gens chez Guitar Center pendant qu’ils essayaient des instruments. Après avoir fait le tri parmi les 40 heures de sons qu'il avait emmagasiné, il les a samplé et agencé pour créér sept morceaux atmosphériques. Mais Danny n’est pas le seul à avoir eu cette brillante idée, d’autres ont déjà tenté l’expérience comme Noah Wall, dont l’album reste le plus accessible (à mi-chemin entre une version amateur de Soloing Alanis Morrissette et les shreds de Creed).

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No Stairway (en référence à Wayne’s World, vous l'aurez compris) est disponible sur Bandcamp et la cassette sortira bientôt sur Patient Sounds. On en a profité pour demander à Glassine ce que ça faisait d’enregistrer un album à Guitar Center.

Noisey : Tu fais quoi dans la vie ?
Danny/Glassine : Je suis éducateur spécialisé dans une école primaire. Je passe mes journées avec des gosses qui m’appellent Docteur Greenwald. C’est hyper bizarre de se faire appeler docteur.

Tu préfères Wayne’s World ou Wayne’s World 2 ?
Wayne’s World sans hésitation. Après Wayne’s World 2 défonce aussi, surtout avec l’indien à moitié à poil et Jim Morrisson. Et aussi le moment où Christopher Walken se pointe au concert et dit : « Ma copine est à l'intérieur » et que Chris Farley lui répond : « Il y a les copines de pas mal de gens à l'intérieur. »

C’est quoi ta scène préférée des deux films confondus ?
Celle où Wayne fait : « Un râtelier à fusils… Mais j'ai même pas un flingue et il faudrait que j'en aie au moins 10 pour remplir ce truc. Qu'est-ce que je vais faire avec un râtelier à fusils ? »

Tu peux nous expliquer comment tu as procédé à l’enregistrement de l’album ? Les gens savaient que tu les enregistrais ou pas ? Tu as fait plusieurs magasins de musique ?
Tout s'est fait de manière très spontanée. Je suis allé à Guitar Center avec mon iPhone et j’ai enregistré les gens qui essayaient des instruments. Non, je ne l'ai pas fait avec du matériel pro. Je voulais faire ça icognito. Je recherchais les sons qui pouvaient m’être utiles. Et tous les sons que j’ai récupéré n’étaient pas forcément cool. J’ai commencé le projet à Brooklyn, et après j’ai bougé à Baltimore. Donc j’ai enregistré à deux endroits. Je pouvais passer des heures dans les magasins de musique. Ensuite, quand je revenais chez moi, je triais tout ce que j’avais recueillis. Un peu comme quand t’es enfant et que tu vas demander des bonbons pour Halloween, tu gardes les Twix et tu balances les trucs bizarres à la liqueur. Je classais les sons, je les faisais passer sur un quatre-pistes puis je créais des boucles et je sélectionnais des sons hyper particuliers pour en faire des patches. Puis je faisais encore plus de boucles, je les faisais passer par quelques vieilles pédales, je me refaisais du café et je poursuivais mon expérience. Pour finir, j’ai tout enregistré sur Pro Tools, sans aucun plug-in. Enfin, j’ai juste utilisé un equalizer. Je me suis surtout servi de l’ordinateur pour finaliser le truc. Le disque a été fait à 99 % sans ordinateur.

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Comment tu as monté tout ça ?
J’ai pas mal bidouillé, j’ai essayé de marier des sons qui n’étaient pas du tout compatibles à première vue. Je pensais souvent avoir bouclé un morceau, mais en fait je me rappelais d’un son que j'avais en stock et que je voulais à tout prix intégrer, donc je devais reprendre ma composition et l’ajouter. Le montage et l’enregistrement étaient des étapes liées, puisque mon studio s’apparentait finalement à un instrument.

Tu achètes souvent à Guitar Center ?
Non, jamais. Déjà, parce que j’utilise quasiment le même matériel depuis que je suis au lycée et aussi parce que à chaque fois que tu te pointes dans ce genre de magasins, les vendeurs te sautent dessus. J’ai jamais été chez un concessionnaire de voitures d’occasion, mais je pense que c’est à peu près la même chose.

T’as envoyé ton album à Guitar Center ?
Non, je ne leur ai rien envoyé. Les gens me disent que je devrais quand même le faire. Un musicien dont je suis fan m’a dit que la société pourrait sans doute même me payer une campagne d'affichage.

Ton album se situe où par rapport à celui de Noah Wall ? Sinon, tu connais d’autres albums enregistrés à Guitar Center ? T’en penses quoi ?
Je n’aime pas Guitar Center, je trouve que l’acoustique est mauvaise, et qu’esthétiquement comme commercialement ils ne sont pas bons. Je suis allé dans un endroit pas très plaisant à première vue et j’en ai extrait la beauté. J’ai essayé d’y apporter de la légèreté. Je voulais attraper le détail au vol, je me suis servi de toutes ces petites nuances. Je ne sais pas ce qui a motivé Noah à sortir ce genre d’album. Mais il a eu une idée géniale. Nos albums restent très différents je suppose. Après, je ne savais pas que des albums avaient déjà été enregistrés à Guitar Center avant de sortir No Stairway. Avec Patient Sounds, le label de No Stairway, on a seulement eu connaissance de l’album de Noah au moment où on réglait les derniers détails de la sortie. C’était complètement fortuit, mais ça m’a foutu les boules de savoir qu’un album au concept similaire sortait au même moment. Je n’avais presque plus envie de sortir mon album. On a contacté Noah pour l’avertir de notre projet et lui dire que notre production était tout à fait indépendante de la sienne. Il était très enthousiaste, il nous a soutenu. Sa réaction, et les autres échos qu’on a reçu, nous ont poussé à continuer. Donc on a sorti l’album.

Mise à part ton expérience au Guitar Center, il y a d’autres albums que tu aimes qui ont été enregistrés de la même manière ?
J’utilise les prises de son pour créer une certaine ambiance. Il y a pas mal d’autres artistes que j’apprécie parce qu’ils arrivent à recréer des paysages sonores, par exemple Jason Urick, Grouper, William Basinski, Boards of Canada… Je ne sais pas exactement comment ils s’y prennent mais ils m’ont influencé dans ma manière d’enregistrer. Joni Mitchell aussi.

Tu as d’autres projets musicaux ?
Ouais, je joue dans The Hens. C’est principalement un projet solo, mais d’autres personnes contribuent aussi. Quand on joue à plusieurs, on se met dans le salon et on reprend des morceaux de Dire Straits.

Tu vas sortir ton album en ligne uniquement, il n’y aura pas de format physique ?
L’album sort officiellement sur Patient Sounds le 6 août, mais vous pouvez déjà le télécharger sur Bandcamp. On a aussi fait de très jolies cassettes.

Tu attends quelque chose en particulier de cet album ?
Ouais, j’espère qu’un jour Phil Elvrum, Jason Urick, Grouper, Bjork ou MF DOOM l’écouteront. Et j’espère qu’ils se diront « putain, il faut vraiment que je bosse avec ce type ». Et qu’ils envoient un mail pour une collaboration à mon agent. Qui est en l’occurrence ma mère. Et j'adorerais vraiment jouer au Waynestock 2016.