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J'ai survécu à une tournée avec Danzig

Le leader des Cancer Bats nous raconte son expérience de tournée avec le Evil Elvis : « croyez-le ou non, mais il est bien plus cool que Lemmy. »

J'ai vu mon premier concert à l'âge de 15 ans. C'était au Concert Hall de Toronto, en 1993, et c'était hyper flippant. J'étais là, petit, maigrichon, avec mes lunettes rondes et des cheveux qui m'arrivaient au menton, coincé au milieu d'une foule de bikers, de metalheads, de goths, de punks et de skinheads. Depuis le balcon, je regardais tous ces mecs, qui avaient l'air de faire 1m90 et de peser 100 kilos se jeter les uns sur les autres, je voyais les poings et les Docs voler au-dessus de leurs têtes. Au-dessus d'eux se tenait un type d'à peine 1m60 aux biceps exorbitants, vêtu d'un T-shirt résille et hululant des histoires de pactes sanglants et de sacrifices à Satan. Et bien qu'il arrive à peine aux épaules de tous les mecs dans la fosse, il était dix, vingt, cent fois plus flippant qu'eux. Ce mec, c'était Glenn Danzig.

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Si pas malheur, vous ne savez pas qui est Glenn Danzig, prenez note : Glenn Danzig est le chanteur/compositeur/fondateur des Misfits, le légendaire groupe punk du New Jersey (qui est aujourd'hui devenu une vaste blague et une énorme affaire commerciale, menée par osn ex-acolyte Jerry Only). Il est aussi le chanteur/compositeur/fondateur de Samhain, groupe à peine moins légendaire, et de Danzig, groupe de blues-metal sans qui les années 90 n'auraient pas tout à fait été les années 90. Glenn Danzig est également connu en tant qu'auteur et éditeur de bandes-dessinées érotiques, ami proche d'Henry Rollins, musicien classique, personnage de la série Aqua Teen Hunger Force, féru de musculation, grand consommateur de litière pour chat et choix initial pour le rôle de Wolverine au cinéma (prends ça, Hugh Jackman).

De fait, Glenn Danzig est, depuis un peu plus de 35 ans, un des personnages les plus fascinants de la scène musicale. Son physique musculeux, sa voix profonde et son obsession pour l'occulte en ont fait une icône, mais aussi -fatalement- une des cibles favorites de la Société-Internet, épinglant régulièrement ses frasques, ses dérapages et son caractère ingérable. Les Cancer Bats viennent de rentrer d'un mois de tournée avec Danzig - un rêve d'adolescent devenu réalité pour ce groupe metalcore de Toronto. Je suis allé discuter avec leur chanteur, Liam Cormier, pour savoir si tout s'était bien passé - étrangement, lui et ses camarades sont rentrés en un seul morceau et plus fans que jamais du Evil Elvis.

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A photo posted by Cancer Bats (@cancerbats) on Dec 12, 2014 at 10:32am PST

Noisey : Ok, alors c'était comment de tourner avec Danzig ?
Liam Cormier : C'était comme de revenir dans les années 90 - tu sais, ce truc où tu te dis qu'il y aura peut être de la baston au concert, peut-être des skins Nazis, cette vibe un peu agressive et flippante. Il n'y a pas eu de débordements au final, mais vu que l'affiche c'était Danzig, Pennywise et nous, le pit était quand même très 90's, si tu vois ce que je veux dire. J'avais déjà vu Pennywise une paire de fois et, à chaque fois, le pit était ultra-agressif. Il y a eu quelques bastons durant la tournée, mais pas tant que ça. Cela dit, ça restait globalement très agressif. Tous les bourrins des 90's sont revenus botter des culs.

Justement, le fait qu'il y ait Pennywise à l'affiche, ça n'a pas un peu divisé le public ?
C'est difficile à dire - tout le monde dans le public portait des T-shirts des Misfits. Mais il y avait des goths qui étaient là uniquement pour Danzig, c'est certain. Cela dit j'en ai vu chanter sur Pennywise, alors bon… Du coup, c'était cool, tout le monde était soudé. Nous, on ne savait pas si on allait réussir à trouver notre place au milieu de tout ça. Quand on est en tournée avec un groupe metal, on est considérés comme des punks, et quand on tourne avec des groupes punk, on nous dit qu'on fait du metal. On se demandait : « Est-ce qu'on doit jouer plus punk pour le public de Pennywise ou plus metal pour les fans de Danzig ? » Au bout du deuxième concert, on a compris que c'était notre côté metal qui fonctionnait le mieux et on a envoyé la dose.

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Comment est-ce que vous avez atterri sur cette tournée ?
C'est Tim Borror, l'agent de Danzig, qui nous l'a proposé. On avait déjà tournée avec quelques-uns des groupes dont il s'occupe, notamment Gwar. Le fait qu'on soit un groupe assez peu connu mais avec déjà pas mal d'expérience quand même a joué en notre faveur, j'imagine. Pas mal de gens plus âgés nous ont découverts en accompagnant leurs gosses à un concert de Billy Talent ou Alexisonfire, et ils sont revenus sur cette tournée, en emmenant leurs gosses, cette fois-ci.

Quelle a été votre réaction quand on vous a proposé cette tournée ?
On a sauté au plafond. Mais c'était un plan de dernière minute - comme souvent sur ce genre de tournées. Toutes les dates étaient bookées et on avait 24 heures pour donner notre réponse. On était en Europe à ce moment là - il nous restait encore quelques concerts à faire et, juste derrière, on devait enchaîner avec une tournée sur la côte Ouest des États-Unis. Si on acceptait la tournée avec Danzig et Pennywise, on devait donc annuler toutes ces dates. Mais on s'est dit que nos fans seraient plus qu'heureux de nous voir avec Danzig et Pennywise, pour quelques dollars de plus.

L'idée de tourner avec Glenn Danzig ne vous faisait pas peur ? Le type a quand même une sale réputation.
On raconte beaucoup de choses sur lui. Mais on avait vécu la même chose quand on a bossé avec Ross Robinson. Il y avait tellement d'histoires dingues qui circulaient sur lui. Pour tout dire, on était nettement plus flippés à l'idée d'enregistrer avec lui que de tourner avec Danzig. Et puis un jour, Danzig est passé nous voir et nous a fait : « Salut les gars, ça roule ? » Il a été hyper cool avec nous. Donc, je ne sais pas s'il était bien luné sur cette tournée ou si il nous aimait bien, mais ça s'est très bien passé. Tout son groupe était cool aussi. Tommy Victor de Prong a pas mal traîné avec nous et Johnny Kelly, le batteur, regardait notre concert chaque soir depuis le côté de la scène. Ils faisaient leur soundcheck ensemble. Ils venaient toujours nous chercher pour dîner avec eux le soir. Ils n'ont fait aucun plan « rock star » de toute la tournée. Glenn est juste un type tout ce qu'il y a de plus normal. Très calme, plutôt discret. À Kansas City, un fan s'est ramené avec toute sa collection de disques et Glenn était là, assis par terre, à tout signer. Le mec avait genre 40 ou 50 disques. Et il a tout signé. Crois-moi, le type est vraiment très cool.

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Tu as pu discuter un peu avec lui ?
Un peu, mais c'était toujours assez bref. On se croisait ici et là, il s'arrêtait pour nous demander comment ça allait, si notre jour off s'était bien passé, ce genre de choses.

Ça t'a déçu qu'il soit aussi sympa ? Ou soulagé ?
Ça m'a soulagé, clairement. Parce que des tournées avec des mecs pas très cools, j'en ai fait. J'ai bossé pour un groupe qui avait tourné avec Motörhead, par exemple, et c'était un tout autre délire. Personne ne parlait à Lemmy et Lemmy ne parlait à personne. Donc oui, croyez-le ou non, mais Glenn Danzig est bien plus cool que Lemmy. Et sur scène, le mec défonce tout ! Il est intenable. Si j'ai ne serait-ce que la moitié de son énergie à 60 ans, j'aurai de la chance, beaucoup de chance.

C'est vrai qu'il a l'air de toujours bien se porter.
Carrément. On avait entendu le contraire - qu'il perdait ses cheveux, tout ça. Mais non, le mec est d'équerre. Chaque soir, ils jouaient quasiment deux heures et il courait tout le long. C'est pour ça que je trouve leur truc d'interdire les photos un peu con. D'un côté, je le comprends, mais de l'autre, je me dis que ce serait l'occasion de faire taire tous les rageux et de montrer à quel point il assure sur scène. C'est important pour la nouvelle génération, qui ne s'informe que par Internet et qui du coup, se fait son opinion à coups de ragots. S'ils voyaient des photos ou des vidéos, il capteraient tout de suite que le mec est toujours au top. Et sa voix est toujours aussi géniale.

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Justement, à propos de cette interdiction de photographier ou de filmer. Sur la première date de la tournée, ce type qui avait envoyé de la farine à la tronche d'Adam Levine de Maroon 5 a essayé de se prendre en photo avec Glenn. Et Glenn lui a fait une prise d'étranglement. Vous en avez pensé quoi ?
Il y avait une seule règle sur la tournée : pas de photos. Comme je te l'ai dit, d'un côté je trouve ça con, mais de l'autre, je le comprends. Je n'ai pas envie de voir des gens scotchés à leur téléphone pendant tout le concert. Allez plutôt dans le pit en découdre avec les skins ! Amusez-vous ! J'ai eu la chance de connaître les concerts sans téléphones portables. J'avais 25 ans quand j'ai eu mon premier portable. Je ne m'en sers pas des masses. Et sûrement pas pour filmer prendre des photos en concert. C'est un comportement qui me désespère. Il y a des concerts où les deux premiers rangs ne font que ça. Enfin bon, pour en revenir à l'incident… Il y a des gens qui sont prêts à tout pour se faire connaître et ce type en fait partie. Il m'a l'air d'être un parfait crétin. Il a cherché la merde, il l'a trouvée. Cela dit, Glenn l'a étranglé non pas parce qu'il essayait de prendre une photo, mais parce qu'il se comportait comme un gros connard.

Il y avait d'autres règles comme celle-là sur la tournée ? Du genre « toute personne surprise en train d'écouter un disque des Misfits post-1983 ou en train de lire le comics Henry & Glenn Forever sera virée de la tournée » ?
Non, rien de ce genre. C'était cool. Il y a même eu des soirs où ils passaient des vieux Misfits entre les concerts. Je faisais du skate quand j'étais gamin et j'ai découvert les Misfits via les articles publiés dans le magazine Thrasher. Je me demandais à chaque fois : « Putain, mais c'est qui ces mecs ? » Mais à la base, je suis surtout fan de Danzig. De là, j'ai découvert Samhain, puis je suis revenu aux Misfits. Mais c'est vraiment Danzig que je préfère. Ils ont d'ailleurs joué pas mal de nouveaux morceaux sur la tournée qui font très très mal.

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Quel est ton album favori de Danzig ?
Les quatre premiers. Les trois premiers, c'est évident, mais je trouve qu'il y a vraiment plein de tubes sur le 4ème aussi. Ce que j'ai préféré sur cette tournée, c'est quand Danzig demandait au public les morceaux qu'il voulait entendre. Il était là avec sa grosse voix : « Vous voulez qu'on en fasse du premier album ? Du deuxième ? » Et les gens hurlaient. Alors il donnait des titres. « Vous voulez quoi ? 'Snakes Of Christ' ? » Et là les gens ne réagissaient pas et on devenait fous parce que nous, on voulait qu'il la joue ! Et il enchaînait avec un morceau du premier album ou en balançant : « Nique la set-list, on va tout jouer ! » C'était tellement génial.

Avec Cancer Bats, vous faites des reprises de Black Sabbath sous le nom Bat Sabbath. Vous n'avez pensé faire pareil avec Danzig, ne vous rebaptisant Canzig ?
Tu sais quoi ? Deux jours avant qu'on nous propose la tournée, on jouait « Twist Of Cain » en sound check et on se disait que ce serait cool de le reprendre. Et juste après, on nous invite sur la tournée. C'était un signe des dieux, mec. Mais après avoir tourné avec Danzig, on a réalisé que non, on ne pouvait pas la reprendre. Déjà, parce qu'ils la jouent beaucoup mieux que nous, et ensuite parce que Glenn est très protecteur avec ses morceaux. Paradoxalement, il s'apprête à sortir un disque de reprises. Ils en ont fait quelques-unes sur la tournée, d'ailleurs, comme « N.I.B. » de Black Sabbath - mais ils la jouent façon Danzig. Il le disait sur scène d'ailleurs : « On va la jouer façon Danzig ». C'était cool.

Il y a un morceau sur votre dernier album, Searching For Zero, qui me fait un peu penser à Danzig : « Beelzebub ».
Ça reste une grosse influence, c'est certain ! On a quelques morceaux dans cette vibe là. Danzig et Type O Negative sont deux de nos plus grosses influences. Des morceaux comme « Darkness Lives », c'est du pur Danzig. Peu de groupes réussissent à composer des morceaux aussi complexes et efficaces à la fois. C'est surtout cet aspect là qui nous a influencé.

Cam Lindsay est sur Twitter.