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Music

Invalide ? Plutôt crever !

L'incroyable parcours de Talli Osborne, la punkette sans bras de Toronto à qui NOFX a dédié une chanson.

Talli Osborne est née sans bras, et avec la plupart des os de ses jambes en moins, mais ça ne l'empêche pas de détester le terme « invalide ». « Invalide voudrait dire que je ne peux rien faire, mais la vérité c'est que je fais des tas de trucs. Je les fais différemment, mais je peux quasiment faire tout ce que font les autres. J'ai des besoins spéciaux, mais comme tout le monde je pense. C'est juste que les miens sont plus voyants. » Mesurant un peu plus d'un mètre lorsque sa crête rose est dressée, Talli est une figure de la scène punk de Toronto. Elle joue dans des groupes et bouge aux concerts depuis plus de 10 ans et est même montée sur scène aux côtés de Lagwagon, NOFX et Against Me!

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Aujourd'hui, Talli est une personne sociable et confiante, mais ça n'a pas toujours été le cas. Pendant l'adolescence, Talli en a bavé. Marginalisée par son entourage, elle a désespérément cherché à s'intégrer. Jusqu'à ses 19 ans, elle utilisait des prothèses, par choix esthétique. Même si Talli était capable de marcher et de s'en sortir sans, les prothèses la faisaient passer pour une personne valide. Et bien que cette étape est été importante pour Talli, elle a également entraîné quelques complications.

« La plupart des gens qui utilisent des membres artificiels n'ont pas de jambes ou alors ont juste un fémur ou alors ils n'ont pas de pieds. Le truc c'est que moi j'avais des pieds alors il me fallait des sortes d'échasses. Ces prothèses étaient compliquées à obtenir et donnaient en plus très chaud. Je suais comme jamais quand j'en portais. C'était dégueu et inconfortable. En plus, j'étais en équilibre instable et rien que le fait de marcher sur un caillou pouvait me faire tomber. Et une fois par terre, c'était mission impossible pour se relever. » Ce n'est qu'au moment de son entrée à l'université que Talli a décidé d'abandonner les prothèses. Elle était alors sur le point de trouver un groupe de potes qui partageait les mêmes centres d'intérêt qu'elle et qui allait la soutenir.

« Beaucoup de kids déménagent dans une grande ville et trouvent ensuite une nouvelle famille. J'avais des amis quand j'étais ado mais ce n'était pas pareil. Dans ma résidence, j'avais enfin des gens qui me ressemblaient. On a commencé à traîner ensemble parce qu'on avait les cheveux colorés, parce qu'on était ceux qui écoutaient de la musique très fort dans nos chambres. Quand je vivais chez mes parents, ils me disaient tout le temps de mettre mes prothèses quand je sortais, pour ne pas mettre les gens mal à l'aise, mais au milieu de mes nouveaux potes, je n'en ressentais pas du tout le besoin. »

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Après quelques semaines à la fac, Talli abandonne complètement ses prothèses. Pile au moment où elle commence à traîner dans la communauté punk de Toronto.

« Le punk a toujours été un refuge pour les gens qui ne trouvent leur place nulle part ailleurs.

C'est là que je me suis senti complètement acceptée, quand j'ai abandonné les prothèses et que j'ai commencé à aller voir de plus en plus de concerts… Je ne veux pas dire que c'était une seconde naissance, parce que c'est nase, mais c'est à ce moment que j'ai commencé à être ce que je suis aujourd'hui.

»

Le soutien que Talli a trouvé parmi les punks lui a donné confiance, une confiance qui s'est étendue à sa vie personnelle et professionnelle. Elle s'est intéressée à la mode et a développé un style unique. Elle a perfectionné son don : pouvoir écrire avec la langue. Elle s'est aussi mise à parler avec les musiciens. C'est lors d'un concert de NOFX qu'elle a parlé pour la première fois à son chanteur préféré, Fat Mike. Une rencontre qui a bouleversé sa vie.

« J'étais déterminé à parler à Fat Mike et on a passé un moment après son concert de Toronto. Deux ou trois mois plus tard, un pote a réussi à mettre la main sur une copie promo de leur nouvel album. Il m'a appelé et m'a dit que le groupe avait composé un morceau sur moi, enfin c'est ce qu'il croyait. Et il me l'a fait écouter au téléphone. Au début, j'arrivais pas à y croire. On avait parlé si peu de temps… Puis j'ai envoyé un email à l'adresse sur le site de NOFX et Fat Mike m'a répondu. J'imagine que je l'avais marqué. C'était le compliment ultime. »

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​Le titre

«

She's Nubs

»

figure sur

The War on Errorism

de NOFX. La chanson a hissé Talli au rang de célébrité parmi les fans de NOFX. Peu de temps après, elle a commencé à attirer l'attention des médias et à répondre à des interviews sur son expérience, avec le groupe et dans sa vie perso. Les retours ont tous été extrêmement positifs. Toutes les choses qui avaient fait de Talli Osborne une marginale durant son enfance étaient celles qui, désormais, lui valaient des torrents d'éloges.

Après avoir passé des années à travailler comme experte en réseaux sociaux pour Virgin Mobile, où son talent a été salué par le fondateur de Virgin, Richard Branson, en personne, Talli gagne désormais sa vie en tant que conférencière. Les discours de Talli rappellent aux gens que juger une personne sur son apparence physique est souvent vain. Le message peut sembler bateau, mais ça reste un état de fait contre lequel elle lutte chaque jour. « J'ai toujours senti que je devais me prouver des choses parce que les gens me renvoyaient une image terrible de moi-même. J'ai envie de faire plein de choses, cuisiner, sortir, m'habiller comme si j'avais une vie normale, mais j'ai aussi envie de faire ces trucs, comme un gros doigt à ceux qui pensaient que j'en étais incapable. C'est OK de demander de l'aide, et je le ferai si j'en ai besoin, mais je veux aussi montrer aux gens que je peux me débrouiller toute seule et j'espère qu'en cela, c'est un message positif. » Graham Isador écrit (sans la langue) et vit à Toronto - @Presgang