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Si vous voulez vivre longtemps, arrêtez d’être triste et chiant

Un homme triste

Personne n’aime les gens tristes. Ces âmes perdues qui errent dans les villes une cannette de bière à la main, le regard noyé dans les contours de bâtiments grisâtres qui servent tantôt de logement, tantôt d’urinoir. À l’ère des stories Instagram et des open air électro, la vétusté de leur visage qui ne sourit plus et leur don à pulvériser tout instant conviviale les rend autre. Les gens tristes font peur, avant tout lorsqu’ils débarquent en soirée pour s’asseoir sur un canapé et ne rien dire, ou des choses extrêmement anxiogènes telles que « T’inquiètes, j’aime bien réfléchir seul dans mon coin » – laissant présager un possible mass shooting – avant de passer « Fake Plastic Trees » de Radiohead à trois heures du matin – laissant présager un possible mass shooting. À cet instant, l’abattre reste la meilleure alternative. Mais bonne nouvelle, vous n’allez sans doute pas avoir besoin d’en arriver là puisque cette personne risque de mourir bien avant vous, probablement en même temps que les fumeurs et les cocaïnomanes.

La semaine dernière, la revue scientifique Proceeding of the National Academy of Sciences (PNAS) a publié une étude dont les résultats affirment que l’optimisme allongerait considérablement l’espérance de vie. En gros, croire en l’avenir et en la possibilité d’un monde meilleur nous garderait prisonnier de cette existence morose bien plus longtemps que prévu – à l’inverse des gens défaitistes, qui eux se consument dans le découragement. Cependant, ce n’est pas la première fois que des études expliquent que l’optimisme aurait des bienfaits pour le corps. En 2014, une étude diffusée sur le Journal of the American Heart Association détaillait comment une certaine joie de vivre peut vous éviter la dépression et les maladies cardiovasculaires. Mais cela pourrait donc aussi avoir un rôle dans le rallongement de notre vie. J’y ai moi-même cru un instant.

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Pour en arriver à cette triste conclusion, les scientifiques ont analysé les données de 69 000 personnes, âgés de 58 à 86 ans, ainsi que plus de 1 400 anciens combattants américains, âgés de 41 à 90 ans. Tous les volontaires ont été suivis sur 10 à 30 ans en moyenne. Au début de l’étude, ils devaient répondre à un questionnaire pour évaluer leur optimisme. Les auteurs de l’étude ont ensuite pris en compte les facteurs tels que les problèmes de santé ou de dépression. Les résultats sont simples : les personnes les plus optimistes avaient une espérance de vie 11 % (pour les hommes) à 15 % (pour les femmes) plus longue que celle des personnes les moins optimistes. En effet, l’espoir ne semble pour autant pas réduire l’écart d’espérance de vie entre hommes et femmes puisque les plus joyeux d’entre deux décédaient quand même avant le sexe opposé.

Interrogée par The Guardian , Lewina Lee, auteur principal de l’étude à la Boston University School of Medicine, explique : « De nombreuses données suggèrent qu’une longévité exceptionnelle s’accompagne souvent d’une longue période de bonne santé et d’une vie sans handicap particulier. Nos conclusions suggèrent surtout que nous sommes capables de vieillir de manière seine en cultivant des atouts psychosociaux tels que l’optimisme ». Si ces chiffres restent intéressants et cette phrase très belle, il faudrait néanmoins les croiser avec d’autres critères. Les personnes les plus optimistes sont peut-être celles qui voyagent en jet privé, mangent du bœuf de Kobe au petit-déjeuner et sont équipées de plus de 500 000 followers sur Instagram. Être optimise est sans doute plus compliqué lorsque votre SMIC acquis en lavant les toilettes d’un aéroport se dissout dans une taxe d’habitation, une facture EDF et un ticket de métro. Dès lors, l’optimisme ne serait pas la cause d’un allongement de l’espérance de vie, mais sa conséquence.

Quoi qu’il en soit, nous ne sommes pas prêt de voir le rayon “développement personnel” des librairies et son best-seller Ronron-thérapie être remplacer par Comment en finir, partie 1 de sitôt. Au contraire, nous pourrions entrer dans une nouvelle ère où le bonheur serait une matière obligatoire à l’école, le sourire forcé cinq fois par jour et la dépression passible d’un an de prison ferme. Devenir happiness manager chez Orange deviendrait subitement le poste le moins convoité de France. Et pour votre pote triste qui plombe toutes les soirées que vous tentez d’organiser, contenez-vous donc de le regarder s’éteindre à petit feu, jusqu’à ce que l’amertume l’emporte.

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