La première fois que j’ai remarqué que ma sueur sentait la weed, je venais tout juste de coucher avec ma copine de l’époque. Amoureusement, elle appuya son visage contre ma poitrine. « Hé, tu sens la weed », me dit-elle. J’ai reniflé sous mon bras – merde, elle avait raison.
Il s’avère que je ne suis pas le seul à parfois produire une odeur corporelle aromatisée à la beuh. Après avoir fouillé sur Google pendant un moment, je suis tombé sur un forum et un fil de discussion reddit où davantage de gens parlaient de ce phénomène. Comme moi, la plupart d’entre eux étaient surpris. « Après avoir joué une partie, j’ai senti mon aisselle », écrit le Redditer RIP_MAC_DRE. « À ce moment-là, je fumais depuis environ deux ou trois ans et j’ai remarqué que je sentais une odeur d’herbe. J’ai trouvé ça drôle. »
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Je suis resté éveillé toute la nuit pour trouver des réponses sur le net. Mais mes recherches ne m’ont mené que vers une « top answer » de Yahoo, qui était en fait un guide sur la meilleure façon de se laver. N’ayant rien de mieux à faire, j’ai contacté les meilleurs biologistes et experts en cannabis pour mettre fin à ce problème d’odeurs une fois pour toutes.
Dr. Matan Shelomi, chercheur à l’Institut Max Planck d’écologie chimique en Allemagne, s’est penché sur la question exclusivement pour VICE et a comparé des études recensant les constituants chimiques individuels du cannabis et de la sueur humaine afin de rechercher d’éventuelles similitudes. Sur les 233 éléments présents dans le cannabis et près des 100 composant la sueur humaine, 11 sont identiques.
« Il semble que certains des composés chimiques associés à l’arôme de la weed se retrouvent également dans les chaussettes de sport pleines de sueur », a déclaré Shelomi. « La seule chose dont nous ayons besoin maintenant, c’est d’un nombre statistiquement significatif de volontaires et d’un laboratoire olfactométrique. »
Peu après, les découvertes scientifiques ont rapidement accéléré. Le Dr Shelomi n’a pas tardé à se rendre compte que l’odeur de cannabis provenait probablement des glandes sudoripares apocrines, au lieu des glandes sudoripares eccrines. La sueur des glandes eccrines est transparente et aqueuse et est créée pour refroidir le corps. La sueur apocrine lors de l’effort – comme le sexe ou le stress – en particulier autour des aisselles et des organes génitaux, a une odeur plus piquante.
« J’étais à l’école, sur le point de faire un exposé, quand ça m’a frappé » explique Trent du Kansas. « Finalement, j’ai découvert que la sueur sous mes aisselles ne sentait la weed que lors d’une situation stressante, ou un peu avant. »
Dr. Shelomi s’est servi de son témoignage pour fonder son hypothèse. « Si d’autres personnes partagent cette expérience, nous pouvons supposer qu’une odeur de sueur au cannabis est causée par des sécrétions apocrines. »
Le Dr. Justin Fischedick est chercheur à l’Institute of Biochemistry de la Washington State University et a une théorie différente. Selon lui, il existe un certain nombre de substances chimiques dans la weed appelées terpènes, qui font en sorte que votre transpiration sente également la weed. Les plantes séparent ces terpènes de leurs feuilles et de leurs fleurs afin d’attirer les pollinisateurs et de repousser les insectes phytophages. « Il semble que les sportifs pratiquant une activité remarquent que leur transpiration dégage parfois une odeur de cannabis » explique le Dr Fischedick. « Les terpènes, comme le THC, sont constitués de composés liposolubles, qui peuvent se déposer dans les cellules adipeuses et se libérer pendant l’exercice. »
Ce serait une bonne explication pour les gens qui fument régulièrement, mais je n’ai pas fumé d’herbe depuis des années. Peut-être que la quantité quotidienne de weed fumée lors de mes plus jeunes années a fait en sorte que ma sueur soit en permanence marquée par l’odeur. « Je ne serais pas surpris qu’une utilisation prolongée du cannabis puisse modifier votre odeur corporelle », déclare le Dr Shelomi. « Plusieurs personnes en ligne ont indiqué qu’elles avaient cessé d’en fumer depuis longtemps, mais qu’elles en sentaient encore l’odeur. »
Je ne tiens pas mettre les propos d’un expert en doute, mais ça me semblait impossible. Il semble par exemple plus probable que l’odeur soit causée par des plantes comestibles contenant les mêmes terpènes que le cannabis – une idée qui a également été abordée dans la discussion sur reddit. « Il peut y avoir des similitudes dans l’odeur », a écrit LarsHoneytoast. « Je pense que la beuh, la sueur et la laitue du marché ont toutes le même parfum. »
Je me devais de savoir si c’était correct, idéalement avec l’aide de quelqu’un dont le nom ne rappelait pas le sexe d’un poisson. « L’odeur du cannabis est produite par les terpènes qu’il contient », a déclaré le Dr Franjo Grotenhermen, directeur exécutif de l’Association internationale pour la médecine par les cannabinoïdes en tant que médicament (IACM). « La consommation d’autres plantes avec les mêmes terpènes peut entraîner une odeur similaire. »
Grâce aux amateurs de weed qui cultivent constamment de nouvelles variétés, il existe maintenant plusieurs types de beuhs contenant les mêmes terpènes que beaucoup d’autres plantes. Les variétés Cheesecake à la myrtille et l’Orange Bud en sont un bon exemple. Donc, il existe suffisamment de plantes pouvant vous rendre puant comme une plantation de weed cachée dans les montagnes.
Mais si les terpènes de weed sont si répandus, pourquoi n’y a-t-il pas plus de gens qui sentent le coffeeshop à 10 mètres ? Eh bien, l’odeur de la sueur n’est pas seulement causée par les terpènes, mais aussi par les bactéries qui décomposent les molécules de sueur en petites particules malodorantes. La sueur des glandes apocrines est donc un cocktail de minéraux, de phéromones et d’urée. La sueur à la weed est causée par une combinaison spécifique de ces différents composants, ce qui la rend inhabituelle, mais c’est quelque chose qui peut se produire.
Il se peut que pas mal de gens possèdent cette bonne combinaison de facteurs nécessaires à la production d’une odeur de weed dans la transpiration, même si elles n’ont jamais touché un joint de leur vie. Et il est également fort possible qu’elles ne le remarquent même pas, car elles ne connaissent sans doute pas l’odeur de la weed. Ou bien peut-être qu’elles reconnaissent l’odeur, mais cela ne les dérange pas assez pour qu’elles se mettent à chercher une réponse sur Google avant de décider de contacter de multiples scientifiques.
La seule chose qu’il me reste à faire, c’est de répéter ici le cliché scientifique selon lequel « davantage de recherche est nécessaire ». Et heureusement, le docteur Fischedick confirme. « Le seul moyen d’être certain des résultats, c’est de demander aux volontaires de fumer un gros joint, puis de faire de l’exercice, de collecter leur transpiration et de vérifier avec les appareils de mesure », dit-il.
Des volontaires ?
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