Chaque année, le mois de ramadan suscite la curiosité de pas mal de personnes non-musulmanes qui s’interrogent sur les règles à respecter ou simplement sur la signification de ce mois pour les musulman·es. En réalité, c’est propre à chaque personne qui le fait, comme tout ce qui touche à la spiritualité en général, d’ailleurs.
Afin de mettre en avant la pluralité de ce que signifie le ramadan, VICE a demandé à quelques personnes concernées d’expliquer pourquoi elles le font et pourquoi ce mois est important à leurs yeux.
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Tawsen (24 ans), artiste néo-raï
« Je fais le ramadan depuis tout petit. Je viens d’une famille pratiquante, donc j’ai “testé” quand j’étais jeune pour finalement le faire vraiment vers mes 13-14 ans, si mes souvenirs sont bons. Je le fais non seulement parce que c’est un des cinq piliers de l’islam et qu’on est censé·es le faire en tant que musulman·es, mais aussi pour l’ambiance qui va avec. C’est une ambiance assez spéciale et tu ne peux pas la vivre pleinement sans jeûner.
« D’un point de vue personnel, c’est une période de recueillement. Ça me vide l’esprit et ça m’aide à me concentrer sur moi-même et sur ma religion. »
Beaucoup de gens pensent que c’est juste une période où il faut arrêter de manger et boire, du coup, parfois, ils font des blagues pourries du style : “Coucou les musulmans, moi je mange de la glace !” Mais en réalité, c’est une période qui te pousse à être meilleur·e, à ne pas t’énerver, dire d’insultes, surconsommer de la nourriture, mais plutôt partager ce que tu as avec les personnes démunies etc.
D’un point de vue plus personnel, c’est une période de recueillement. D’ailleurs, j’arrête toute activité musicale pendant le ramadan. Ça me vide l’esprit et ça m’aide à me concentrer sur moi-même et sur ma religion. »
Fatima (19 ans), étudiante en communication et chanteuse hiphop
« J’ai pas de souvenir précis, mais je devais avoir 7 ans la première fois que j’ai fait le ramadan. Je voulais faire comme les grand·es, mais à l’époque, je comprenais pas le but de ce mois. Je me souviens que ma mère me disait que j’avais le droit de rompre mon jeûne avant les autres, genre à midi.
J’ai commencé à le faire pour de vrai vers mes 13 ou 14 ans, quand j’ai commencé à comprendre ma religion et que j’ai appris de moi-même le sens réel de la spiritualité. À 14 ans, je me cherchais et je me posais des questions existentielles. Et quand ce mois arrivait, je considérais que j’allais trouver les réponses. J’attendais notamment la nuit du destin (une nuit bénie) et j’en profitais pour parler avec Dieu et me confier. Tout le mal intérieur que j’avais accumulé durant l’année disparaissait.
« Ce mois est à la fois un anti-stress et un anti-dépresseur. »
Durant le ramadan, j’ai l’impression que je me retrouve enfin et que je réussis à me concentrer sur ce qui compte vraiment. C’est une pause en fait : je m’éloigne du monde et je prends du recul comme si je méditais pendant un mois. C’est important pour moi parce qu’on vit dans une société qui ne s’arrête pas et notre tête est toujours pleine. Je pense que le ramadan permet de voir la réalité sous un angle lucide et qu’il nous permet de devenir plus sage mentalement. Ce mois est à la fois un anti-stress et un anti-dépresseur.
Ça me fait toujours sourire quand des personnes non-musulmanes me posent des questions sur le ramadan car ce sont souvent les mêmes qui reviennent : “Et si t’avales ta salives, tu romps ton jeûne ?”, “Je pourrais jamais m’empêcher de manger ou de boire, c’est impossible.”, “Tu peux au moins mâcher un chewing-gum ?”, ou encore, “Quand tu te brosses les dents, tu dois faire super attention ?”. Ces personnes voient le ramadan comme une liste de règles rigides, mais pour moi, c’est surtout une question de self-control et de se prouver qu’on peut s’éloigner des choses futiles. »
Fatima-Zohra (25 ans), activiste et réalisatrice documentaire
« Je suis incapable de me rappeler de la première fois que j’ai fait le ramadan en entier, mais je me souviens avoir voulu envie de commencer quand j’étais toute petite donc mes parents me laissaient faire des demi-journées après l’école. J’avais envie de le faire car je voulais imiter “les grand·es”, et puis c’était un truc entre cousins et cousines d’essayer de faire le plus de jours possibles. En réalité, je pense que ce qui nous donnait surtout envie petit·es, c’est de participer à ces moments en famille quand on rompt le jeûne.
De l’extérieur, les gens ne voient que le jeûne. Mais en réalité, c’est l’aspect le plus simple – à part si t’es accro à la clope ou autre. Ceci dit, j’aime bien que des personnes non-musulmanes nous posent des questions sur le ramadan. C’est de la curiosité et c’est chouette d’échanger là-dessus.
Pour moi, un des plus beaux moments du ramadan, c’est la nuit du destin ; le fait de prier en famille la nuit et de trouver de nouvelles méthodes spirituelles. En général, y’a aussi la prière du ramadan à la mosquée mais ce n’est pas possible en ce moment.
« Ce mois me rappelle ce qui est au centre pour moi : ma famille, ma santé, ma foi, et être en accord avec mes valeurs. »
Je sais que ça peut paraître cliché parce que beaucoup de gens le disent, mais ce mois recharge vraiment mes batteries. Je ressens vraiment un avant et un après le ramadan. Y’a aucun autre mois où on accorde la même importance à notre spiritualité et à Dieu. Aucun autre mois où tu vas autant entendre des phrases bienveillantes telles que “c’est le ramadan, ne vous disputez pas”, ou “que dieu te guide”. Les gens sont cléments et ça se ressent. Et c’est pas parce qu’on est faibles ! C’est une période de non-jugement et de générosité. Puis y’a l’aspect familial : le fait de passer autant de temps en famille nous fait réaliser qu’en réalité, on devrait le faire en dehors du ramadan aussi. En gros, ce mois me rappelle ce qui est au centre pour moi : ma famille, ma santé, ma foi, et être en accord avec mes valeurs. »
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