L’affaire Cahuzac en 10 dates

Ce lundi à Paris, le procès de l’ancien ministre du Budget Jérôme Cahuzac reprend. L’ancien ministre de François hollande est accusé de blanchiment, de fraude fiscale et de « déclaration mensongère », pour avoir dissimulé des avoirs notamment en Suisse puis à Singapour.

À peine entré au gouvernement de Jean-Marc Ayrault, le site Médiapart révèle que ce chirurgien de formation aurait caché des centaines de milliers d’euros dans des paradis fiscaux.

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Le scandale est d’autant plus important que Jérôme Cahuzac est chargé justement de lutter contre la fraude fiscale, dans un gouvernement qui se veut exemplaire.

Pour avoir dissimulé 687 000 euros, et avoir minoré sa déclaration de revenus, Jérôme Cahuzac encourt une peine pouvant aller jusqu’à sept ans de prison et une amende de 1 million d’euros.

Nous résumons l’affaire en dix dates clés :

• 16 mai 2012

Président de la commission des finances de l’Assemblée nationale depuis 2010, Jérôme Cahuzac entre au gouvernement de Jean-Marc Ayrault en tant que ministre délégué au Budget. Il est alors chargé, entre autres, de lutter contre la fraude fiscale, notamment avec l’adoption de la troisième loi de finances rectificative pour 2012.

Jérôme Cahuzac dira en décembre 2014 que l’« erreur de sa vie » a été d’entrer au gouvernement en mai 2012.

• 4 décembre 2012

Mediapart publie une enquête affirmant que Jérôme Cahuzac a détenu « un compte non déclaré à l’Union des banques suisses (UBS) de Genève ».

Le site publie alors un enregistrement datant de 2000, où « Birdie » (son pseudonyme) s’inquiète de son compte « ouvert à l’UBS ». Le ministre du Budget nie les accusations dans un communiqué puis devant l’Assemblée nationale : « Je n’ai pas, je n’ai jamais eu de compte à l’étranger, ni maintenant, ni avant. »

Il continue pendant plusieurs mois à le nier. Il réaffirme « les yeux dans les yeux » ne pas avoir dissimulé des comptes.

Début janvier 2013

Après l’éclatement du scandale, le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire.

• 19 mars 2013

Le parquet déclare que la voix de l’enregistrement publié par Médiapart est probablement celle de Jérôme Cahuzac, selon l’expertise de la police.

Une information judiciaire est alors ouverte pour « fraude fiscale », « blanchiment de fraude fiscale » et « déclaration mensongère », car le ministre du Budget a omis de déclarer ses comptes offshore à la Commission pour la transparence financière de la vie Politique.

Dans la foulée, Jérôme Cahuzac quitte le gouvernement, affirmant être innocent.

• 2 avril 2013

« Dévasté par le remords », Jérôme Cahuzac passe aux aveux. Devant les juges d’instruction Roger Le Loire et Renaud Van Ruymbeke, il reconnaît détenir un compte à l’étranger. Il demande publiquement pardon sur son blog pour une « faute inqualifiable » et est immédiatement mis en examen. Quelques mois après, son compte à Singapour est fermé et les 687 000 euros qu’il contenait sont rapatriés.

Il se retire également de toutes ses fonctions électives et mène une vie éloignée du public, à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), où il a commencé sa vie politique en tant que député (de 1997 à 2012) puis en tant que maire (de 2001 à 2012).

• 1er octobre 2013

Alain Claeys, rapporteur PS d’une commission d’enquête parlementaire sur l’affaire, conclut que « la justice n’a ni été entravée, ni retardée ». Ce qui n’a pas empêché des membres UMP de la commission de contester cette appréciation.

Dix jours plus tard, le gouvernement crée la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et le parquet national financier.

La HATVP est chargée de recueillir les déclarations de patrimoine de 9 000 décideurs publics.

• Avril 2014

Patricia Cahuzac, également mise en examen, avoue l’existence d’un compte sur l’île de Man (un paradis fiscal qui se trouve entre l’Angleterre et l’Irlande), ouvert en 1997 à la Royal Bank of Scotland.

La dermatologue y avait placé ses avoirs à partir d’un compte à la banque BNP Genève, dont les avoirs ont été transférés à la banque suisse Gonet fin 2010 avant d’arriver sur l’île. Lors du rapatriement des fonds en France en 2014, plus de 2,7 millions d’euros se trouvaient à l’île de Man.

L’enquête du parquet met à jour une fraude fiscale « obstinée », « sophistiquée » et « familiale ». L’affaire semble remonter à 1992, lorsque le chirurgien et la dermatologue ouvrent une clinique spécialisée dans la pose d’implants capillaires. Pour garder l’anonymat, les clients payent en espèces. Jérôme Cahuzac ouvre alors, par le biais d’un « ami », un compte à la banque suisse UBS en 1992, puis un deuxième à son propre nom l’année suivante.

En 1998, il déplace ses avoirs vers la banque suisse Reyl, avant que le secret bancaire helvétique ne commence à être démantelé, en 2009. Les 687 000 euros qu’il y possédait sont alors envoyés à Singapour, un an avant qu’il soit nommé président de la Commission des finances au palais Bourbon. Ce compte à Singapour est ouvert à partir d’une société-écran panaméenne, détenue quant à elle par une autre entité domiciliée aux îles Seychelles.

• Juin 2015

Jérôme Cahuzac est renvoyé en correctionnelle. Doivent également comparaître devant la justice leurs conseillers, le suisse François Reyl et l’ex-avocat Philippe Houman, tout comme la banque genevoise Reyl, en tant que personne morale, et Mme Cahuzac.

Suite à une instance de divorce, celle-ci redevient Patricia Ménard à partir de novembre 2015.

• 8 février 2016

Ouverture du procès en correctionnelle, à Paris, qui est rapidement interrompu.

La défense pose une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) et le tribunal la transmet au Conseil Constitutionnel. La défense dénonçait alors une « double peine », concernant les poursuites administratives et pénales : l’ex-couple Cahuzac avait déjà accepté un redressement fiscal majoré de 2,3 millions d’euros, dont 500 000 euros de pénalités pour mauvaise foi.

Tout justiciable a le droit de demander une QPC et les avocats des Cahuzac avançaient que, selon le principe non bis idem, on ne peut pas être condamné deux fois pour les mêmes faits.

• 24 juin 2016

Les sages du Conseil constitutionnel donnent leur feu vert au cumul des poursuites pénales et de sanctions administratives, car « le recouvrement de la nécessaire contribution publique et l’objectif de la lutte contre la fraude fiscale justifient l’engagement de procédures complémentaires dans les cas des fraudes les plus graves ».

C’est en raison du montant, mais également des responsabilités de l’ancien ministre du Budget, chargé justement de lutter contre la fraude fiscale pour redresser les comptes publiques, que l’instance se dit favorable à la poursuite du procès en l’état.

• 5 septembre 2016

Réouverture de ce qu’on appelle le « procès du mensonge », prévu pour durer jusqu’au 15 septembre.

S’ils sont reconnus coupables, Jérôme Cahuzac et Patricia Ménard encourent une peine pouvant aller jusqu’à sept ans de prison et une amende d’un million d’euros.


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