FYI.

This story is over 5 years old.

Interview

10 questions que vous avez toujours voulu poser à un voiturier de luxe

« J'ai tout vu – des armes, des couteaux, de la drogue, tout »
Photos : Panos Kefalos

Cet article a été initialement publié sur VICE Grèce.

Ça fait cinq ans que Sotiris Tsiakoulis aide les plus grandes fortunes de Grèce et d'ailleurs à garer leur véhicule à proximité des bars et discothèques les plus sélectes du pays. Âgé de 27 ans, ce voiturier « de luxe » est rentré dans le milieu lorsque l'un de ses amis l'a rancardé pour un poste de voiturier auprès d'une galerie d'art. Peu de temps après, Sotiris s'est mis à bosser pour le compte du Skorpios, célèbre boîte de nuit de Mykonos, et du Sideradiko à Athènes. Son métier est assez simple à résumer : il doit garer des voitures luxueuses sans les abîmer, tandis que les propriétaires font ce que font les riches une fois rentrés dans une boîte.

Publicité

J'ai eu l'opportunité de discuter avec Sotiris pour en savoir plus sur sa carrière, et sur les bizarreries qu'il a pu vivre au cours des dernières années.

VICE : Qu'est-ce qui fait qu'un voiturier est doué ?
Sotiris Tsiakoulis : Être séduisant, bien habillé, et conduire avec habileté sont les choses les plus importantes. Quand je dis « conduire avec habileté », je sous-entends qu'il faut être à l'aise avec une voiture de luxe. Il est facile de perdre le contrôle de voitures surpuissantes. Aussi, il faut sourire sans arrêt. Vous êtes la première personne à accueillir les invités, et sourire est essentiel pour qu'ils passent une bonne soirée.

Et quelle est la chose la plus marquante que vous ayez vécue dans votre travail ?
Il y a deux ans, alors que je bossais à Mykonos, je suis tombé sur un mec bourré, qui m'a montré du doigt une Mercedes garée devant le club Skorpios. Il m'a demandé combien coûtait cette voiture, et je lui ai répondu qu'elle tournait autour 200 000 euros. Il m'a ri au nez et est parti. Trente minutes plus tard, il est revenu encore plus défoncé et s'est mis à pisser sur la bagnole. Quand j'ai voulu le dégager, il m'a dit : « Tu sais, l'argent ne fait pas le bonheur. » Et il est parti en me filant un billet de 100 dollars.

Sotiris, devant le club Sideradiko

Êtes-vous déjà tombé sur un objet particulièrement étrange dans une voiture ?
J'ai tout vu – des armes, des couteaux, de la drogue, tout. Un jour, je me suis assis au volant, et il y avait un fusil à pompe sous mes fesses. Quand vous bossez dans le monde de la nuit, vous rencontrez souvent des gens étranges. Une nuit, un type m'a conseillé de « faire très attention à [sa] voiture », m'affirmant qu'elle était remplie d'armes. J'ai évidemment pris ça comme une menace. Cinq minutes plus tard, les flics ont débarqué – il n'y avait pas d'armes dans la voiture, mais celle-ci avait été volée.

Publicité

Avez-vous déjà abîmé la voiture d'un client ?
J'ai été victime d'un accident à Mykonos, mais qui n'était pas de ma responsabilité. En gros, je faisais marche arrière au volant d'une très vieille décapotable, et le vent était tellement fort qu'il a ouvert la porte de la voiture contre un bolide hors de prix garé juste à côté. Je fais toujours très attention, contrairement à certains de mes collègues, qui ont déjà endommagé des voitures.

Et vous arrive-t-il de conduire la voiture de vos clients sans qu'ils le sachent, pour vous amuser ?
Oui, surtout si les voitures m'impressionnent. Une fois, je me suis amusé dans un parking entier avec une BMW M4. J'ai drifté sans m'arrêter pendant de longues secondes, il y avait de la fumée partout. Bien sûr, je ne sors jamais du parking.

À quoi ressemblent vos nuits « tranquilles » ?
Comme la plupart des jobs, il m'arrive souvent de m'ennuyer, surtout lorsqu'il n'y a pas grand monde. Là, je me contente d'attendre. En plus, moins de clients ça veut dire moins d'argent, et un patron en colère.

Arrivez-vous à sympathiser avec les clients ?
Oui, ça m'arrive. Parfois, je gare gratuitement les voitures de certains clients – qui sont avant tout des amis. Les gens très riches ne sont pas si différents des gens normaux – certains sont détendus et affables, d'autres introvertis.

La profession a-t-elle changé en cinq ans ?
Ça n'a rien à voir avec 2012, c'est clair. Il y a cinq ans, la crise n'avait pas encore totalement touché les riches Grecs – les pourboires étaient bien supérieurs à ceux que je touche aujourd'hui. Il m'arrivait souvent de recevoir 10 ou 20 dollars par client. Maintenant, c'est surtout deux ou trois dollars.

Et que faites-vous lorsqu'un client est bourré et qu'il tente de récupérer sa voiture ?
Je leur déconseille toujours de reprendre le volant. Il y a peu, un type complètement défoncé a tenté de conduire. Heureusement, j'ai réussi à le convaincre de laisser sa voiture, et il est passé le lendemain la récupérer. Parfois, je reconduis les clients moi-même jusque chez eux.

Mais parfois, et souvent à Mykonos, les gens sont tout simplement trop bourrés, et ne veulent rien entendre. Être très très riche et très très bourré ne réussit pas à certains, qui deviennent hyper arrogants. Ça met les voituriers dans des situations très gênantes.

Aimez-vous travailler la nuit ?
Oui, vraiment. Vous rencontrez des gens extrêmement différents. D'un côté de la rue, vous avez le couple discret, qui profite d'un dîner aux chandelles. De l'autre, vous avez des types fortunés qui dépensent des milliers d'euros dans de l'alcool. Et évidemment, la nuit, il est facile de se faire pas mal d'argent.