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Opinion

Arrêtez de brandir n'importe quel enfant africain sur vos photos Instagram

Instagram sert à beaucoup de choses, mais pas à ça. Et je ne pense pas que le monde ait vraiment besoin de tous ces « sauveurs blancs ».
Dipo Faloyin
London, GB
Stacey Dooley
Photo: Instagram / Stacy Dooley

Ne ratez plus jamais rien : inscrivez-vous à notre newsletter hebdomadaire et suivez nous sur Instagram. Je sais bien qu'il est difficile de voir un enfant noir sourire et résister à l'envie de le prendre dans ses bras pour partager sa joie, en particulier compte tenu de tous les défis qui entourent la jeunesse noire. Mais, important : vous n'avez pas le droit de prendre dans vos bras n'importe quel enfant noir qui traverse votre chemin. Et, encore plus important : ne les forcez pas à faire une photo avec vous.

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C'est un point qui mérite d'être dit et redit, car c'est malheureusement ce qu'a fait une célébrité du petit écran au Royaume-Uni. Sans doute aussi ce que font vos amis quand ils partent en voyage en Afrique, d'ailleurs. Il y a un mois, Stacey Dooley a publié une photo sur Instagram où elle brandissait un petit garçon ougandais avec la légende : « OB.SESSSSSSSSSSSED * émoji cœur brisé * ». Dooley a découvert le garçon alors qu'elle était sur un tournage pour Comic Relief, une organisation caritative. Tournage auquel il n'était pas nécessaire d'assister pour s'en faire un tableau précis.

Location. Ferme africaine.

La caméra effectue un gros plan sur un bébé qui pleure, des mouches tournant autour de sa tête.

Voix off : Matombi a huit ans, mais il n'en a pas l'air …

Dooley n'est pas la première occidentale à ne pas vanter son altruisme en vantant son altruisme, et elle ne sera certainement pas la dernière. À ce stade, c’est quasiment un rite de passage pour tous les voyageurs qui ont pris une année sabbatique et cherchent à justifier leurs vacances éternelles auprès de ceux qu'ils ont laissés au bureau. En réalité, il y a tellement de gens qui font la même chose que je me suis presque senti désolée pour elle lorsque le député travailliste David Lammy a cité son nom après avoir réclamé la fin du « complexe des sauveurs blancs. »

La réponse de la twittosphère à David Lammy - ce dernier disant tout haut ce que je pensais désormais être une opinion partagée par tous - m'a tristement rappelé que le bon sens est une qualité extrêmement rare. Des Blancs en colère à travers tout le pays ont pris la défense de Dooley, accusant le député d'être raciste (!) en introduisant du coup le concept de race, et de ne pas savoir apprécier le travail merveilleux que Dooley avait réalisé en osant s'enfoncer aussi loin dans la grande jungle Africaine. Une femme a même tweeté : « Ce monde a besoin de plus de "sauveurs", peu importe leur couleur. »

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Et honnêtement, comment pourrais-je répondre à ça ? Être contre les super-héros, c'est comme être contre les roulés-saucisse. C'est inacceptable, et il faut s'en offusquer ! Soyons clairs : les sauveurs sont des personnes formidables. Car elles sauvent des choses qui ont besoin d'être sauvées.

Mais la notion de « sauveurs blancs » ne se réfère pas à ça. Elle fait plutôt référence à un besoin très spécifique de la part de l’Occident de décrire l’Afrique comme un lieu de terre en ruines, de mouches porteuses de maladies et d’enfants qui n'ont jamais entendu parler de Noël. Ça renforce encore un peu plus l'idée que les Africains ne pourront jamais être la solution, qu'ils sont condamnés à l'impuissance et que le soleil et l'espoir n'apparaissent que lorsqu'ils sont bercés dans l'étreinte chaude et lumineuse de la blancheur. Cela centre les stars au-delà de ceux dont ils essaient soi-disant de changer la vie. Le jeune garçon au poste de Dooley n'est pas un accessoire et ne doit pas être traité comme tel.

L'imagerie est extrêmement importante. En tant que continent, l'Afrique fait face à de lourds défis. Nombre de ces défis sont universels en raison des ramifications du colonialisme et de la façon dont il a divisé une terre fertile et forcé des cultures extrêmement différentes à former des nations singulières contre leur volonté. C'est une chose à laquelle une majorité de pays doit encore faire face. Ces défis forment un espace où chaque esprit bien pensant peut venir offrir son aide, le cas échéant, sous la direction de personnes sur le terrain.

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Si c'est vous, et que vous vous demandez comment vous déplacer dans ce champ de mines sans vous faire traiter de raciste, allez-y, mais collez bien cette question sur votre bouteille de crème solaire indice 50 + : si j'offrais mon aide dans un refuge pour sans-abris à Bruxelles, comment est-ce que je me comporterais ?

Allez-vous demander à tout le monde d'arrêter de faire ce qu'ils sont en train de faire pour poser sur une photo où vous êtes la pièce maîtresse ? En voyant un enfant faire ses trucs d'enfant, allez-vous le tenir comme un trophée ? Je suppose que la réponse est non. Alors, résistez à cette envie stupide lors de votre promenade dans un village africain. Si vous avez envie de poster une photo de quelque chose, je vous recommande vivement les fruits. Un fruit, c'est incroyable. Postez des photos de fruits.

@DipoFaloyin

Cet article a été initialement publié sur VICE UK.