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Un druide nous raconte l’histoire occulte du jeu de la pomme dans l’eau

Les enfants qui reçoivent aujourd'hui des pommes à l'Halloween ignorent son sombre passé et les jettent instantanément.
Photo : Flickr/Denise Cross Photography

L'article original a été publié sur Munchies.

La pomme, malgré ses grandes qualités, a un sombre passé.

Dans beaucoup d'illustrations, le fruit défendu à cause duquel l'humanité est tombée en disgrâce aux yeux de Dieu, est la pomme. Coupez-la en deux et vous découvrirez une étoile à cinq pointes, un pentagramme, figure qu'on associe souvent au satanisme et aux sciences occultes. Plus récemment, on a utilisé des pommes dans des vidéos de métal pour illustrer le paganisme.

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Les enfants qui reçoivent aujourd'hui des pommes à l'Halloween ignorent son sombre passé et les jettent instantanément. Sans doute parce que leur taux de sucre est bien plus faible que les autres pièces de leur butin. On les aime d'ailleurs quand elles sont baignées dans le sirop. Ou quand elles dansent dans de grandes cuves devant des enfants aux mains attachées dans le dos, jouant un jeu de la pomme dans l'eau, classique à l'Halloween.

Bien que ce jeu soit généralement considéré comme un amalgame de traditions païennes romaines et catholiques, on a trouvé des preuves de son existence bien plus tôt dans l'histoire. Certains croient même qu'il faisait partie d'un rite de sacrifice humain.

Les auteurs de cette théorie affirment que la fête de Samain, fête religieuse celte qui a aussi lieu le 31 octobre, était le moment idéal d'offrir des humains aux Dieux. Des druides des îles Britanniques auraient forcé des villageois à attraper avec les dents une pomme dans un chaudron d'eau bouillante – et ce faisant se brûler le visage –, à défaut de quoi on les décapiterait et les brûlerait au bûcher. Une version violente de « vérité ou conséquence ».

Bien que ce soit une histoire idéale pour une soirée d'Halloween, sa véracité n'en est pas pour autant prouvée. On a donc invité Tony Locke, un rédacteur et druide des temps modernes, à nous parler du passé trouble du jeu de la pomme afin de comprendre le sens caché de la pomme.

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Photo : Flickr/Chris Costes

VICE : Salut, Tony. Si je connais les druides, c'est parce que Spinal Tap en parlait dans la chanson Stonehenge. Qui étaient-ils réellement?
Tony Locke : Les druides étaient une classe de la société celte qui avait beaucoup de rôles : conseiller religieux, astronome, guérisseur, poète ou historien. On les tenait en haute estime : ils étaient juste en dessous du chef ou du roi dans la hiérarchie sociale. Ils réglaient des disputes en jouant le rôle de juge dans le cas de litiges, parfois entre des tribus en guerre. Dans certains cas, ils ont mis fin à des batailles.

Comment est-ce qu'on devient druide?
J'ai suivi une formation auprès de l'ordre auquel je me suis joint. C'est une condition préalable à l'acceptation. La formation couvrait des domaines comme les traditions liées aux plantes, l'herboristerie, l'histoire des dieux et des déesses, les rites et rituels, et ainsi de suite. J'ai passé des examens écrits et oraux pour être admis dans l'ordre. Mais, pour être un druide, il faut suivre une voie, parfois sans même se rendre compte qu'on suit cette voie, jusqu'à un point qui semble être le sien.

« On coupe une pomme pour révéler son plus puissant symbole caché – le pentagramme –, une pratique qui existe toujours aujourd'hui, en particulier à la fête de Samain et à l'Halloween. »

Quelle est l'importance de la pomme dans les sciences occultes?
Dans l'histoire, la pomme a longtemps été vue comme un fruit magique, mais ce n'était pas un fruit unique avant le 17e siècle, environ. Avant, on désignait comme « pomme » tous les fruits venus d'ailleurs, même la tomate, couramment appelée « pomme d'amour ». On n'a jamais déterminé que la pomme a poussé dans l'arbre de connaissance de la mythologie chrétienne. Sa place dans la mythologie remonte à la Grèce antique et à l'Empire romain, où elle était considérée comme un symbole puissant de la déesse Pomona et une des favorites de Venus. C'est pourquoi elle est devenue le fruit de l'amour.

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Photo : Flickr/F_A

Est-ce que les pommes ont servi à jeter des sorts?
On les a utilisées pour jeter des sorts, dans des rites et dans des histoires depuis toujours : du jardin d'Éden à Blanche Neige. La pomme était sacrée pour de nombreuses sociétés et on s'en servait pour jeter des sorts de divination. Beaucoup de groupes païens l'utilisent encore aujourd'hui. On coupe une pomme pour révéler son plus puissant symbole caché – le pentagramme –, une pratique qui existe toujours aujourd'hui, en particulier à la fête de Samain et à l'Halloween.

« Samain, c'est le moment où la porte vers l'« autre monde » est ouverte pour communiquer avec les morts, un moment de divination. »

Samain, qu'est-ce que c'est et en quoi est-ce que c'est différent de l'Halloween?
C'est le festival celte qui marque la fin de l'été. Le mot signifie assez littéralement « la fin de l'été », dans le calendrier celte. C'est aussi un festival irlandais qui existe depuis des milliers d'années. L'Halloween est une fête chrétienne. On l'a intégrée au calendrier chrétien et appelée Toussaint, célébrée le 1er novembre, au 9e siècle.

Quel est le rôle de la nourriture à la fête de Samain?
C'est une fête en l'honneur des ancêtres. On prépare des plats pour les vivants et les morts. Bien sûr, ceux qu'on laisse pour les ancêtres n'étaient pas mangés, alors on les distribuait aux pauvres qui n'avaient rien.

Samain, c'est le moment où la porte vers l'« autre monde » est ouverte pour communiquer avec les morts, un moment de divination. C'est aussi le moment où on l'on fait descendre le bétail des collines pour l'hiver. Les animaux qui ne semblent pas assez fort pour survivre, on les abat pour se nourrir pendant l'hiver, une pratique qui existe encore dans certains endroits.

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La plupart des druides voient aujourd'hui la fête de Samain comme le début de la nouvelle année celte et, comme on est irlandais, on est toujours ouverts aux doubles célébrations. On prend donc deux bouchées de la pomme : la fête de Samain et le jour du Nouvel An.

Photo : Flickr/Rob Swytsun

Est-ce que le jeu de la pomme fait partie des traditions de Samain?
Ça ne fait pas réellement partie des traditions originales. Il a été ajouté à l'arrivée des Romains en Grande-Bretagne. Ils voulaient inclure leurs croyances dans les traditions des régions dont ils prenaient possession. Ils ont donc mélangé leurs coutumes et traditions à celles des Celtes.

Comme les Celtes vénéraient déjà le pentagramme, l'intégration du festival de Pomona – la déesse des vergers – au festival de Samain – un festival des récoltes – était une simple progression. À l'origine, on utilisait le jeu de la pomme dans l'art de la divination pour voir l'avenir des affaires de cœur et des mariages potentiels. Mais aujourd'hui, c'est devenu un jeu amusant populaire auprès des jeunes et moins jeunes les soirs de fête.

C'est vrai que le jeu de la pomme était un rite des druides au cours duquel les participants étaient brûlés ou décapités en guise de sacrifice humain?
Je n'ai jamais entendu ça avant. Ma réponse simple, c'est non. Je ne vois aucun « jeu » qui aurait consisté à brûler ou à décapiter des participants et qui soit devenu si répandu qu'il avait un rôle dans une société.

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Tout ce que je peux supposer, c'est qu'il s'agit d'une légende urbaine qui découle d'une vieille tradition scandinave : on plaçait une pomme à un bout d'un bâton ou d'une lance et une chandelle à l'autre bout. On suspendait ensuite le bâton au plafond et on le faisait tourner. Les participants devaient tenter de mordre dans la pomme sans être brûlés par la flamme ou la cire chaude ni être blessés par le bout de la lance.

Pour rendre le « jeu » plus intéressant, on bandait parfois les yeux des participants. Est-ce que c'est l'origine du « jeu » dont vous parlez? Je vous laisse le soin de trancher.

Photo : Flickr/Caleb Zahnd

Merci, Tony. C'était super intéressant.
Prends soin de toi et profite de la fête, quelle que soit la voie que tu suivras.

Cette entrevue a été légèrement éditée par souci de clarté et de concision.