Le Jour où je me suis fait virer

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Le Jour où je me suis fait virer

Serveurs, ouvriers, greffiers : plusieurs personnes nous ont raconté l'histoire de leur premier licenciement.

Si chaque génération pensait que celle qui lui succède est majoritairement composée de gros bébés pleurnichards, les gens du 18 ème siècle nous auraient probablement bien méprisés. Mais au vu de la conjoncture actuelle, on peut comprendre que certaines personnes passent une bonne partie de leur temps à se plaindre, ou que d'autres rechignent à aller travailler – particulièrement si elles ont choisi leur job par dépit.

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À l'heure où la jeunesse s'enfonce de plus en plus dans la pauvreté, beaucoup de personnes de mon entourage s'engagent dans des carrières, temporaires ou non, pour lesquelles elles n'étaient pas taillées. Et il arrive parfois que certaines d'entre elles se fassent virer, que ce soit à tort ou à raison. On a demandé à plusieurs personnes de nous raconter leur tout premier licenciement – voici ce qu'elles avaient à dire.

Howard Ryan
27 ans
Métier : Greffier au Ministère de la Justice de Londres

Un dimanche soir, mon agence intérim m'a appelé pour me dire qu'ils m'avaient trouvé un travail qui commencerait dès le lundi – du coup, j'ai bu quelques verres avec des potes pour fêter ça. Je suis arrivé au bureau le lendemain matin, et ils ont passé environ une heure à me détailler toutes les règles et procédures à suivre. Pendant environ un quart d'heure, j'ai complètement décroché. J'ai enchaîné trois cafés, j'ai chopé un carnet et je me suis rendu au tribunal, où devait se jouer une affaire de garde d'enfant.

J'ai écrit le nom des personnes impliquées et la date sur mon petit carnet, puis je me suis subitement endormi pendant l'espace de 30 secondes. Personne n'a remarqué, du coup j'ai continué à suivre l'affaire pendant cinq minutes, jusqu'à ce que je recommence à piquer du nez – jusqu'à ce que ma tête cogne la table. Quelques personnes ont remarqué. J'ai essayé de me maintenir éveillé pendant dix minutes de plus, mais alors qu'un des parents argumentait pour avoir plus de jours de garde, je me suis rendormi. Il paraît que j'ai même ronflé, pendant sept ou huit minutes.

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Quand je me suis réveillé, tout le monde était en train de me regarder. Je suis sorti prendre l'air et j'ai réussi à suivre le reste de l'affaire. À la fin de la journée, l'agence m'a appelé et m'a informé qu'elle ne me reprendrait pas, ce qui était plutôt prévisible. En tout cas, ils m'ont quand même payé.

Sam Walker-Smart
28 ans
Ouvrier

Après une année sabbatique accidentelle, je me suis retrouvé complètement en dèche. Alors que je m'apprêtais à entrer à l'université, j'ai cherché du boulot un peu partout, jusqu'à tomber sur un boulot d'usine où il fallait simplement empaqueter des trucs. Je devais commencer le jour de mon 19ème anniversaire. Je me suis levé vers 4 heures du matin et j'ai pris le bus pour me rendre dans une zone industrielle déprimante. En arrivant sur mon lieu de travail, j'ai croisé mon boss sur un chariot élévateur et j'ai vu des perceuses et des scies traîner un peu partout. Je me suis dit « Oh merde, c'était pas du tout prévu », prêt à m'enfuir pour de bon, avant de me faire une raison.

Finalement, la journée a plutôt bien commencé : thé, biscuits, bavardage. J'ai dû déplacer plein de trucs excessivement lourds, et en l'espace de quelques minutes, j'étais devenu complètement épuisé. Mon boss m'a ensuite demandé de scier une planche, et j'ai pensé « Ça, c'était pas du tout indiqué dans la brochure ». J'ai quand même réussi à scier quelques planches, avant de me mettre à somnoler – il devait être 7h30 du matin. J'ai continué à scier machinalement, jusqu'à ce que je bute sur quelque chose et que je me rende compte que j'étais en train de scier mon propre pouce. Il y avait du sang partout.

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J'ai sursauté et couru vers le mec, qui a clairement pensé que j'étais un sombre crétin. Je lui ai expliqué que la brochure précisait juste que je devais déplacer des cartons, et qu'on s'était tous les deux fait entuber. Du coup, il m'a laissé partir. Le truc, c'est qu'il ne m'a pas filé de pansement et que j'ai titubé vers l'arrêt de bus en répandant du sang partout sur mon chemin – et j'ai fini par dévorer un burger dans un fast-food à 9 heures du mat'. Un bel anniversaire, en somme.

Aaron Evans
28 ans
Métier : barman

Je me suis fait licencier parce que je me suis comporté comme une épave. Je me suis pointé un vendredi, deux heures à la bourre, coké comme jamais. J'ai bu pendant toute la durée de mon service, et j'ai bien failli m'évanouir au beau milieu de la journée. J'ai envoyé un message à mon dealer pour qu'il me ramène de quoi tenir jusqu'à la fermeture. Le soir, je suis ressorti avec des collègues et j'ai fait une nuit blanche – et je me suis repointé au taf le samedi, toujours complètement coké. J'ai vraiment honte de moi quand j'y repense.

On m'a renvoyé chez moi parce que j'étais « inapte à travailler ». Aussi, un de mes collègues a fait référence au fait que j'avais passé une bonne partie de la journée précédente à faire des allers-retours aux toilettes. La semaine suivante, un de mes managers m'a pris à part pour une « petite discussion ». Bien entendu, il m'a défoncé avant de me virer sans ménagement. Pour ma défense, c'était un gros cokehead doublé d'un hypocrite.

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Sean Saunders
24 ans
Caissier

J'avais 16 ans, et je venais de décrocher un petit boulot au supermarché de ma ville, en pleine période de fêtes de fin d'année. Mes employeurs m'ont fait regarder une vidéo pseudo-motivante sur l'éthique du magasin, mais ils ne m'ont pas vraiment formé. Comme je ne suis pas complètement stupide, j'ai appris quelques trucs sur le tas – scanner les produits, appuyer sur des boutons, gérer la caisse, etc. Mais certains produits – comme les citrons verts – étaient associés à un code bien précis, et rien n'était indiqué sur la caisse. Il fallait tout apprendre par cœur. Pour les caissiers en panique, il y avait quand même un bouton qui permettait d'appeler un responsable.

Lors de mon deuxième jour, un client voulait acheter une dinde congelée, laquelle n'avait pas de code-barre. Je lui ai gentiment dit : « Je suis désolé monsieur, mais je ne peux pas scanner cette dinde. Est-ce qu'il serait possible que vous alliez en chercher une autre ? », mais il s'est mis à me hurler dessus : « Mais je veux cette dinde ! » J'ai essayé de lui expliquer que celle qu'il avait sélectionnée ne passerait pas, tout en appelant désespérément mon responsable en pressant le bouton prévu à cet effet.

Le mec s'est mis à hurler et à m'insulter – « Tu dois être un sacré con alors ! Si tu ne sais pas scanner une dinde, file-la moi putain ! » – et j'ai fini par craquer. J'ai jeté la dinde sur lui. Il était tellement choqué qu'il a arrêté de gueuler. Le problème, c'est que mon responsable m'a vu en train de lui balancer la dinde, ce qui est plutôt normal vu que cela faisait une bonne minute que j'essayais de l'appeler. Après, je tiens à préciser que je ne suis pas un monstre, je ne lui ai pas balancé la dinde en pleine face non plus. Disons que ça ressemblait plutôt à une passe au basket. Bref, mon responsable est parti le calmer, avant de me convoquer dans son bureau. Il m'a gentiment dit : « Eh bien, euh… je vais devoir te virer. Tu as jeté une dinde sur un client. » C'était plutôt justifié, j'imagine.

Anton Lisigurski
23 ans
Métier : serveur

Je travaillais dans un bar londonien qui fermait ses portes à 1 heure du matin et proposait des boissons gratuites à tous les privilégiés restants. Souvent, des gens ramenaient de la coke, d'autres se mettaient à danser sur le comptoir – on ne filtrait pas vraiment les clients. Un soir, c'était l'anniversaire de quelqu'un et le bar était bondé. Il y a eu une dispute entre un manager et un autre barman, et on nous a interdit de distribuer des boissons gratuites pour le reste de la soirée.

À ce stade, j'étais malheureusement complètement ivre et j'ai eu un trou noir total. Je me suis réveillé le lendemain matin avec des inconnus dans mon lit, et j'ai réalisé que j'avais laissé mon sac au boulot. Je suis revenu au bar et j'ai constaté que tous les managers et les autres serveurs avaient un comportement étrange à mon égard. Je me suis dit que j'avais dû faire quelque chose de mal, sans oser leur demander quoi pour autant. Le lendemain, mon manager m'a fait monter dans son bureau et m'a expliqué que j'avais volé plusieurs bières dans le frigo pour les fourrer dans mon sac. Pour couronner le tout, j'ai laissé mon sac rempli de bouteilles juste devant son bureau.

@Daisy_Field / @george_f_heaven