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Music

Régis (Turner) est un con

Dans un lien de cause à effet assez troublant, la musique du Français Régis Turner est à la fois bête à manger du foin et belle à pleurer. On écoute son nouveau disque en avant-première ici.
Marc-Aurèle Baly
Paris, FR
Régis Turner, le syndicat des scorpions, premiere
© Sébastien Alouf

« Maligne et polyvalente, citadine et tout-terrain à la fois ». C'est l’accroche que l’on peut lire sur le site flambant neuf de Fiat à propos de la Fiat Panda, la voiture pratique et futée qui hante de près ou de loin les chansons et la vie de Régis Turner. Mais si le véhicule en question « fait le taf » et déploie selon ses constructeurs des trésors d’ingéniosité, on ne peut pas dire que la description s’applique exactement à son occupant dont on vous parle aujourd'hui. Ou alors pas jusqu’au bout : si l’une est plutôt débrouillarde, l’autre est du genre niquedouille.

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Car Régis est un con. Mais attention, pas un con du genre de ceux qui font la fête jusqu'à 10 heures du mat' au mépris de toute bienséance voisine, mais plutôt de ceux qui s’entêtent à se prendre des mandales sentimentales monumentales dans la gueule et à chanter ensuite leurs peines de cœur sur des synthés Yamaha claqués. Le tout en vous regardant droit dans les yeux, sans effet de manche ni (trop) de pédales d’effet.

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C'est en général le propre des timides que de vous balancer leur détresse ou leurs poussées de sève au visage parce qu’ils ne savent pas trop quoi en faire. Mais Régis a plus d'un tour dans son sac. Un peu trop vite rattaché à cette vague française « d'agents du maussade », comme l'ont cartographiée nos confrères de Gonzai, et qui compte en ses rangs des gens aussi divers et variés que Ventre de Biche, Colombey, Noir Boy Georges ou Rouge Gorge, il a su trouver un moyen de découper le fond de la case où on l’avait rangé. Car à force de tourner en rond, de répéter toujours les mêmes paroles, de rajouter des loops sur des loops et des mots sur les maux, il a fini par se perdre dans ses propres machines et y trouver un certain vertige.

Son nouveau disque n’est que ça : des boucles, des couches, des répétitions, peu de paroles pour un petit traité oral et sonore de l’ennui et de la mélancolie aussi précis que dépréciatif. Une joliesse étrange, comme sur « Si je Ferme Les Yeux » par exemple, où il répète les mêmes paroles pendant tout le morceau comme un mantra pas du tout convaincu de lui-même. Il n’y a jamais vraiment de climax ni de résolution dans la musique de Régis Turner, juste une angoisse en suspens dont notre nigaud magnifique n’arrive pas à se dépêtrer. Mais une angoisse qu’il a faite sienne, car il sait qu’elle sera le seul vrai compagnon de route qu’il pourra avoir. À défaut de gagner la bataille, c’est au moins déjà une solution de repli.

Le nouvel album de Régis Turner, Un Rêve Dans Un Rêve, sort la semaine prochaine sur le Syndicat des Scorpions et Indian Redhead. Il est en écoute ci-dessus.

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