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Crime

Déjà marqué par la guerre et les cyclones, le Yémen fait face à une invasion de sauterelles

La combinaison des pluies diluviennes (dues aux cyclones) et l’insécurité permanente créent des conditions dramatiques, parfaites pour une invasion d’insectes sans réponse gouvernementale pour pouvoir enrayer la crise.
Une nuée de sauterelles dans le désert du Néguev en Israël, mars 2013. (Photo par Jim Hollander/EPA)

Alors que le Yémen entre dans son huitième mois de conflit sanglant et vient de subir deux cyclones historiques au cours des dernières semaines, l'ONU annonce que le pays se retrouve face une nouvelle menace : des hordes de sauterelles.

Les sauterelles du désert sont présentes par intermittence au Yémen, où elles attendent des sols humides pour se reproduire. Bien que le Yémen soit le pays arabe le plus pauvre du monde, les autorités yéménites responsables de l'agriculture ont toujours plus ou moins réussi à contenir les effets des invasions de sauterelles. Ces robustes insectes peuvent voler près de 160 kilomètres par jour en se laissant porter par le vent, et sont capables de détruire n'importe quelle plantation dans le pays.

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La combinaison des pluies diluviennes (dues aux cyclones Chapala et Megh) et l'incessant vide sécuritaire créé le cocktail parfait pour une invasion de sauterelles couplée à l'absence de réponse gouvernementale face à cette crise.

Avant le cyclone Chapala du 3 novembre, l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) observait de faibles niveaux de reproduction des sauterelles au Yémen.

« Elles n'ont pas besoin de beaucoup de pluie pour survivre, explique Keith Cressman, responsable du programme de prévision du développement des sauterelles à la FAO. « Si elles ont 25 millimètres d'eau par mois, cela leur suffit pour se reproduire. »

Le cyclone Chapala, qui a touché le sud du Yémen avec une rare intensité le 3 novembre, a apporté près de 200 millimètres d'eau dans certaines zones. Ces niveaux exceptionnels de pluviométrie permettent aux sauterelles femelles de bénéficier d'un sol humide pendant 6 mois pour déposer leurs oeufs, explique Cressman.

Les sauterelles du désert femelles peuvent pondre trois fois uniquement dans leur vie — à chaque fois, elles peuvent déposer environ 100 oeufs dans le sol. La majorité de la ponte meurt avant l'éclosion ou avant d'avoir leurs ailes. Mais une sauterelle peut tout de même donner naissance à une vingtaine de sauterelles viables. À ce rythme-là, le Yémen pourrait se retrouver submergé par des invasions de sauterelles dans des proportions bibliques d'ici le printemps prochain.

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« Le pire scénario serait que les équipes chargées des études des taux de reproduction dans la zone touchée par le cyclone ne soient pas en mesure de le faire. Ainsi, il sera impossible de connaître la situation en termes de sauterelles », explique Cressman. « De plus, les vents du cyclone ont probablement amené des sauterelles dans des zones où elles ne devraient pas se trouver, elles peuvent se reproduire sans contrôle. Vous pouvez avoir une ou deux générations de lancées. »

Les pluies de novembre peuvent aussi avoir aidé un certain type végétation à se développer — une végétation qui permet aux sauterelles de maturer et de se développer.

D'après la FAO, une petite nuée de ces sauterelles serait capable de dévorer de quoi nourrir 35 000 personnes en seulement une journée.

Le Yémen compte depuis des années sur l'importation, pour la plupart des produits alimentaires. Si le secteur agricole yéménite — déjà fortement touché par la guerre — se trouvait encore affaibli, la vie va encore se compliquer pour les quelque 24 millions de Yéménites. Près de 80 pour cent de la population a besoin d'une aide humanitaire. Avant le cyclone Chapala, les Nations unies avaient établi que 10 gouvernorats du Yémen sur 22 étaient « un échelon avant le niveau de famine ».

La FAO avertit que les pluies saisonnières dans la corne de l'Afrique voisine pourraient créer des problèmes semblables. Après avoir ravagé les récoltes yéménites, de larges essaims pourraient profiter des vents et ravager les récoltes agricoles en Éthiopie, à Djibouti et en Somalie. En 2007, un petit essaim a volé jusqu'au Kenya, qui a connu à l'époque sa première invasion d'insectes depuis près d'un demi-siècle. Dans certains cas extraordinaires, les sauterelles sont capables de traverser des océans entiers. Certaines ont voyagé d'Afrique jusqu'en Amérique.

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Suivez Samuel Oakford sur Twitter : @samueloakford