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Administrer de la méthamphétamine à un cerveau artificiel est une super idée

Les « organes sur puce » permettent d'étudier en direct les réponses physiologiques du corps humain.
Illustration : Wyss Institute

Dans un article publié ce lundi 20 août dans Nature Biotechnology, une équipe de scientifiques décrit comment elle a étudié l’impact neurologique de la méthamphétamine à l’aide d’un cerveau artificiel sur puce de polymères.

L’étude a été réalisée par Ben Maoz, Anna Herland et Edward Fitzgerald au Wyss Institute for Biologically Inspired Engineering de l’université Harvard. Elle démontre les derniers progrès des organes sur puce, une technologie qui permet de simuler le fonctionnement d’organes en intégrant des cellules humaines sur des puces microfluidiques.

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Les organes sur puce permettent d’observer les effets de nouvelles molécules et stimuli. Dans ce cas précis, la subtance étudiée était la méthamphétamine. « Nous avons choisi cette drogue parce qu’elle est l’une des plus addictives et qu’elle fait des milliers de morts, explique Maoz dans un mail adressé à Motherboard. Ce qui étonnant, c’est que nous ne savons pas grand-chose d’elle en dépit de ces statistiques tragiques. C’est la raison pour laquelle nous avons chercher à utiliser ce nouveau système pour dévoiler les effets métaboliques de la meth sur différentes parties de [l’unité neurovasculaire]. »

En d’autres termes, ces organes artificiels permettent d’observer en direct un cerveau défoncé — ou une simulation, au moins. Grâce à eux, nous pourrons peut-être comprendre les effets des substances psychotropes les plus répandues et donc concevoir des traitements anti-addiction plus efficaces. Certains chercheurs pensent qu’ils ouvrent aussi la voie à des traitements capables de cibler plus précisément diverses zones du cerveau.

L’équipe du Wyss Institute a cherché à reproduire les rouages de la barrière hémato-encéphalique. Ce filtre semi-perméable est le gardien du cerveau : il laisse les substances utiles comme l’eau et le glucose passer du sang aux neurones et bloque les molécules potentiellement dangereuses.

Pour simuler ces échanges, les scientifiques ont connecté une puce garnie de neurones à deux puces simulant le fonctionnement de la barrière hémato-encéphalique à l’aide d’astrocytes, de pérycites et des cellules endothéliales, les trois types de cellules qui gouvernent à la barrière hémato-encéphalique. Ils ont ensuite injecté du sang et du liquide cérébro-spinal artificiels dans le circuit, permettant ainsi d’y introduire des molécules. Les fluides passaient par la première puce hémato-encéphalique avant d’arriver à la « puce-cerveau », elle-même reliée la deuxième puce hémato-encéphalique.

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La méthamphétamine est connue pour augmenter la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique. Au cours de l’expérience, 1,5 millimolaire de meth a été introduit dans le système ; environ un dixième de cette dose a traversé la puce hémato-encéphalique pour aller s’accrocher aux neurones de la puce simulant le cerveau. Dans un cerveau véritable, tout se passe de la même manière.

Les organes sur puce servent aussi la recherche en neuropathologie. Des cellules de patients atteints par la maladie d’Alzheimer ou victimes de lésions cérébrales traumatiques pourraient être intégrées à des puces. Une maladie pourrait également être déclenchée artificiellement grâce à des manipulations génétiques.

Pour le moment, Maoz, Herland et Fitzgerald développent de nouveaux types d’organes sur puce dans leurs laboratoires, respectivement à l’université de Tel Aviv, à l’Institut royal de technologie de Stockholm et à l’université d’Uppsala, en Suède.

« Il y a déjà un certain nombre d’études qui utilisent notre système et nos concepts, tant au Wyss Institute que dans nos laboratoires indépendants, rapporte Maoz. Nous essayons de concevoir un micro-humain sur puce, avec plus d’organes et […] nous souhaitons créer un système d’organes sur puce qui proviendront d’un seul individu. »

Autrement dit, peaufiner la médecine personnalisée en créant un « mini-moi-sur-puce ».