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Les cheveux incoiffables sont le produit d’une mutation génétique

Le syndrome de Struwwelpeter, ou syndrome des cheveux incoiffables, est caractérisé caractérisé par la pousse de fibres capillaires crépues, sèches, fines, blondes et vaporeuses.

« La tignasse de merde » est un concept permettant de qualifier un désordre capillaire de sévérité variable. Nous sommes tous portés à qualifier notre chevelure de la sorte à un moment ou à un autre de notre existence, mais pour certaines personnes, il s'agit hélas d'un état chronique. Or, le fait d'avoir un vieux buisson au sommet crâne serait le résultat d'une mutation génétique.

L'attention d'une généticienne de l'Université de Bonn a été attirée par un type de cheveux très particulier, que l'on qualifie parfois par le vocable « Syndrome de Struwwelpeter » (en hommage au héros du conte d'Hoffmann, Der Struwwelpeter), caractérisé par des fibres capillaires crépues, sèches, très fines, blondes et vaporeuses.

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Der Struwwelpeter, Struwwelpeter Museum, Francfort. Image: Wikipedia/Struwwelpeter Museum

Le professeur Regina Betz, spécialiste des origines génétiques des problèmes capillaires, s'est intéressée à ce problème après avoir observé une dizaine de cas similaires : les personnes concernées possédaient des cheveux à l'aspect synthétique, ressemblant à des cheveux de Magic Troll, ces figurines des années 90. La scientifique a séquencé le génome de ces individus, pour s'apercevoir qu'ils avaient en commun une mutation de trois gènes responsables de la formation et de la structure des cheveux.

« Ces mutations nous permettent de comprendre selon quels mécanismes se forment les cheveux sains, et comment certains troubles de la formation de la fibre capillaire peuvent apparaître » explique Betz dans un rapport.

Betz, accompagnée d'une équipe internationale de chercheurs, a publié ses résultats dans l'American Journal of Human Genetics, affirmant qu'elle était la première à avoir mis en évidence le syndrome des cheveux incoiffables et des désordres génétiques.

La littérature médicale est relativement pauvre sur ce sujet. Le problème a été décrit pour la première fois en 1973 par Dupré et al., puis en 1982, une étude allemande a mis en évidence que ce syndrome pouvait être partagé par six membres de la même famille. Une centaine d'autres cas suggèrent également que ce trouble est de nature héréditaire.

Les chercheurs s'accordent à dire que le problème apparait au cours de l'enfance, puis s'améliore légèrement avec l'âge. Certains experts estiment que le syndrome devrait être associé à la dysplasie ectodermique, une famille de 180 désordres génétiques affectant le développement des cheveux, des dents, des ongles et des glandes sudoripares. Cependant, le diagnostic clinique n'était pas assorti de preuves moléculaires jusqu'à aujourd'hui, selon Betz. Par ailleurs, « la plupart des personnes atteintes du syndrome des cheveux incoiffables cherchent rarement de l'aide auprès d'un médecin ou d'un hôpital » ajoute-t-elle.

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Un enfant atteint du syndrome des cheveux incoiffables. Image: University of Bonn

Après séquençage du génome de 11 personnes atteintes de la maladie, Betz et ses collègues ont observé des changements dans les gènes PADI3, TGM3 et TCHH. Les deux premiers codent pour la production d'enzymes, tandis que TCHH code pour une protéine qui, lorsqu'elle est associée à des filaments de kératine (la protéine à l'origine de la structure des poils, des plumes, ou encore des cornes d'animaux) contribue à former la fibre capillaire.

« PADI3 modifie la protéine TCHH de la tige du cheveu de telle manière que les filaments de kératine puissent y adhérer » explique Fitnat Buket Basmanav Ünalan, l'auteur principal de l'étude, dans un communiqué. « L'enzyme TGM3 produit le lien nécessaire à cette adhésion »

Chez les personnes victimes du syndrome de Struwwelpeter, l'un de ces gènes sera mis hors-jeu par une mutation, donnant à leurs cheveux cet aspect si caractéristique. L'équipe a testé ces résultats en laboratoire à partir de cultures de cellules de souris. En manipulant les gènes PADI3 et TGM3, les chercheurs ont fait naître des souris aux moustaches tordues et au pelage ondulé.

Bien qu'il n'existe aucun traitement pour ce problème à l'heure actuelle, cette nouvelle étude pourrait réconforter les personnes dont les cheveux tendent à se confondre avec des virevoltants dans le désert du Texas, en faisant savoir que l'aspect de leur tignasse n'est pas le produit d'une quelconque négligence. Si ce trouble si étrange n'est associé à aucun problème de santé particulier, même s'il peut susciter l'anxiété et le stress en raison des moqueries d'autrui, notamment durant l'enfance. Le conte de fée d'Hoffmann, Der Struwwelpeter, était d'ailleurs destiné à avertir les jeunes garçons des conséquences possibles d'une mauvaise hygiène, alors qu'il est pourtant inspiré par l'observation de cas d'ectodermie dysplasique. Comme les maladies de peau, ce genre de trouble peut susciter le rejet, l'isolement social et la dépression. Tout ça pour des cheveux indisciplinés.