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Ce que les talibans réclament pour signer un traité de paix avec le gouvernement afghan

Les talibans ont pointé plusieurs éléments : le retrait des troupes étrangères d'Afghanistan, la libération de prisonniers, et le retrait de leurs membres de la liste de sanction de l’ONU.
Les forces de sécurité afghanes inspectent le site d'une attaque suicide d'un taliban. (Photo par Rahmat Gul/AP)

Lors des premières négociations de paix avec le gouvernement de Kaboul, les talibans ont soulevé plusieurs points : la présence de troupes étrangères en Afghanistan, la libération de prisonniers, et le retrait de leurs membres de la liste de sanction de l'ONU. C'est ce qui est ressorti ce jeudi de cette première phase de discussions entre le gouvernement et les Talibans, d'après des officiels.

Les deux camps se sont rencontrés ce mardi à Muree, au Pakistan, dans la banlieue d'Islamabad. Ils devraient se retrouver à nouveau pour continuer les négociations à la fin du mois du Ramadan. Les émissaires du gouvernement engagés dans les discussions ont confié ce jeudi aux journalistes, lors d'une conférence de presse, que des listes de demandes ont été échangées. Les points clés des prochains tours de discussions ont aussi été fixés. Les deux camps ne savent pas encore où est-ce qu'ils se retrouveront pour négocier, mais un membre de la délégation gouvernementale a confié que cela pourrait se dérouler en Chine.

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Le vice-ministre des Affaires étrangères, Hekmat Karzai, qui menait la délégation gouvernementale, a mis relevé les sujets exposés par les talibans, ajouté que les prochaines discussions ne seraient pas conditionnées par ces sujets.

Les négociations de cette semaine pourraient être la première étape pour mettre un terme à 13 années d'un conflit dévastateur. Celui-ci a commencé en 2001 quand des talibans avaient été chassés du pouvoir par une coalition internationale menée par les États-Unis.

Les discussions de cessez-le-feu sont aussi prévues au programme de la prochaine session de négociations, mais un membre de la délégation, Haji Din Mohammad, a déclaré que les opérations militaires contre les talibans vont continuer pour le moment. De la même manière, les talibans ont refusé de suspendre le flot des attaques, et ont revendiqué deux attaques suicides qui ont fait un mort et trois blessés ce mardi.

À lire : Des talibans ont attaqué le Parlement afghan

On assiste à une recrudescence de la violence en Afghanistan depuis que la majorité des forces américaines et étrangères se sont retirées du pays au début de l'année. Les combats se sont intensifiés en avril, quand les talibans ont lancé leur offensive de printemps. Les soldats locaux sont désormais en charge de la sécurité du pays. Ils éprouvent les plus grandes difficultés à combattre les Talibans et ont perdu beaucoup d'hommes dans le conflit.

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D'après le ministre afghan des Affaires Étrangères, les discussions de ce mardi représentent la « première étape vers la paix, » dans un communiqué publié ce mercredi — ajoutant que l'objectif était d'obtenir un arrêt des violences durable. « Nous espérons que les négociations vont permettre de sécuriser une paix décente et une stabilité durable dans le pays et la région, » précise le communiqué.

La déclaration du ministre est accompagnée d'un mot de remerciement pour le Pakistan qui a facilité la rencontre, mais aussi pour la Chine et les États-Unis — qui avaient des émissaires sur place.

La Mission d'assistance des Nations unies en Afghanistan (MANUA) s'est réjoui des discussions et a invité les deux camps à poursuivre vers une solution durable. « Sur le long terme, la paix n'est pas un luxe, mais elle est bien nécessaire, » explique le chef de la MANUA, Nicholas Haysom. « Je salue cette rencontre en face-à-face entre les deux camps. Il s'agit de la seule manière de faire des progrès vers un accord négocié et de parvenir à la paix que l'Afghanistan mérite. » Haysom a néanmoins précisé que le processus pourrait être long et semé d'embûches.

Pour le moment, il est encore difficile de dire si ces négociations peuvent réellement déboucher sur une fin des combats. Le commandement taliban semble être divisé sur le souhait d'aboutir à un accord de paix. Des porte-parole des talibans ont récemment rappelé leur opposition au gouvernement afghan. Mais ceux qui ont participé aux discussions de ce mardi avaient reçu l'approbation directe du leader Mullah Akhtar Mohammad Mansoor, d'après des membres de la délégation.

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L'influence et la présence de l'organisation terroriste État islamique (EI), rivale des talibans, grandissent dans le pays. Nombre de commandants talibans ont quitté l'organisation pour rejoindre l'EI et faire allégeance du calife auto-proclamé Abou Bakr Al-Baghdadi. En janvier l'EI avait annoncé que l'Afghanistan, et le Pakistan, faisaient partie de sa province de « Khorosan ».

À lire : Les talibans demandent à l'organisation État islamique de ne pas toucher à l'Afghanistan

Les deux groupes islamistes se sont affrontés depuis. Ces dernières semaines, l'EI est parvenu aussi à conquérir de larges territoires qui appartenaient auparavant aux talibans, notamment dans la province orientale de Nangarhar. En juin, l'EI a capturé et décapité des combattants talibans.

Des inquiétudes sur l'influence et les recrutements de l'EI pourraient motiver les Talibans à négocier avec le gouvernement afghan. Ils cherchent effectivement à consolider leur position, alors qu'ils se retrouvent sous la menace de l'EI. Mansour a envoyé une lettre ouverte à Al-Baghdadi le mois dernier dans laquelle il explique que son groupe « ne veut pas voir d'interférences dans ses affaires, » insistant sur le fait qu'il n'y avait la place que « pour un drapeau, un commandement, et un mandat » dans le combat pour établir la loi islamique en Afghanistan.

À lire : Abandonnés par la France : Le témoignage d'interprètes afghans de l'armée française

Suivez John Beck sur Twitter : @JM_Beck 

Les forces de sécurité afghanes inspectent le site d'une attaque suicide d'un taliban. (Photo par Rahmat Gul/AP)