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Quebec

Ce qu’on apprend dans un cours de drague pour immigrants au Québec

Conclusion : le Québécois est trop mou et la Québécoise est trop dure.

Immigrer, ce n'est jamais facile. Il y a un million d'embûches à l'intégration complète dans son pays d'adoption, que ce soit la langue, la culture, l'accès au marché du travail, et j'en passe. On dit souvent que le meilleur moyen de comprendre une culture, c'est de sortir avec quelqu'un qui est né dans celle-ci. Mais comment faire si les techniques de drague sont dans son nouveau milieu complètement différentes de ce à quoi on est habitué?

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Le Salon de l'immigration et de l'intégration au Québec se tenait la semaine passée au Palais des congrès de Montréal et tentait de répondre à cette question-là, entre autres. Il y avait plein d'ateliers : comment préparer son C.V., déménager en région et celui qui a capté notre attention, draguer au Québec.

En apprenant cette nouvelle, je me suis autoproclamé immigrant de service et je me suis rendu au Palais des congrès, calepin en main, prêt à enfin tout apprendre pour draguer les Québécoises.

En arrivant, je me rends compte que je n'étais clairement pas le seul à être intrigué. Nous étions une trentaine, de tous horizons et de tous âges, pour des motifs plus ou moins différents. Une dame âgée y était pour transmettre les connaissances qu'elle allait acquérir à son neveu de vingt ans, lasse de le voir incapable de cruiser comme du monde. Une jeune polonaise en relation depuis sept ans avec un Québécois est venue s'assurer qu'elle n'était pas seule à mal comprendre les incongruités du dating au Québec.

La discussion est animée par Régine Coicou, une aimable et charmante femme d'origine haïtienne, installée au Québec depuis plusieurs années. Elle est coach de vie et a écrit deux livres sur les relations amoureuses. C'est weird pour moi de l'entendre parler de relations amoureuses parce qu'elle me rappelle un peu ma mère, mais je mets ça de côté et j'ouvre grand les oreilles.

Elle commence par raconter sa première expérience de date au Québec, et son incompréhension, à l'époque, du concept du « splittage de bill ». Bien qu'elle convienne que la technique peut avoir ses avantages, elle soutient que dans une perspective de fréquentation, c'est mieux que l'homme paie à la première date et elle affirme que la majorité des Québécoises pensent comme elle. Selon elle, quand l'homme québécois est gentil (parfois trop), cela devient sa technique de drague primaire. S'il paye, c'est un moyen efficace de faire comprendre qu'il y a un intérêt amoureux.

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Ensuite, un bref survol des caractéristiques de l'homme québécois. J'apprends donc que le Québécois moyen est « moins macho », une nouvelle qui m'étonne, parce que, dans mon expérience, ce n'est pas l'instinct du mâle alpha qui manque au Québec. Il serait aussi apparemment doux et aurait souvent l'impression d'être « castré » dans ses relations amoureuses. Il a tendance à ne pas aimer les débats, est en général passif et prend mal le rejet, ce qui l'empêche de faire le premier pas. La population masculine serait donc rendue paresseuse.

Les femmes québécoises, de leur côté, se lamentent de la passivité des hommes québécois; c'est pourquoi elle apprécie le côté plus macho des immigrants. Elles ont, d'après la conférencière, aussi tendance à être plus Germaine (un jeu de mots qui veut dire qu'elle gère et qu'elle mène), c'est-à-dire plus autoritaires et demandantes. Elles hésiteraient moins à prendre les devants et à aller vers l'homme (puisqu'il ne le fera pas), un concept que la grand-mère d'une collègue de Mme Coicou, qui est de la discussion, croit pouvoir expliquer. « Ma grand-mère disait : "On n'avait pas le choix, les hommes étaient partis dans le bois une bonne partie de l'année. Il fallait donc se dépêcher pour trouver celui qu'on voulait marier et avec qui on voulait bâtir une famille avant qu'il retourne dans le bois. »

D'après Mme Coicou (et plusieurs des hommes présents dans la salle, apparemment), autre chose joue contre les femmes québécoises : le concept de « la bulle ». La bulle est l'espace personnel d'une personne, une barrière invisible qui délimite son espace personnel, territoire qu'il ne faut pas enfreindre. Bien qu'elles se plaignent que les hommes québécois soient trop mous pour faire les premiers pas, elles n'apprécient pas non plus quand ils insistent trop, car cela « pète leur bulle ».

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Si la femme québécoise veut trouver l'amour, il faudrait donc, d'après Mme Coicou, qu'elle « sorte de sa bulle », un concept très québécois, ou à tout le moins occidental. Lors de ses sorties de groupe avec ses clientes tentant de trouver l'amour, elle affirme avoir constaté que, dès qu'elles se faisaient approcher sur le dancefloor, les femmes québécoises reculaient automatiquement, préférant établir une sorte de périmètre de sécurité infranchissable autour d'elles. Cependant, elles seraient plus réceptives devant les hommes immigrants, qui n'ont pas de notion de bulle et ne savent donc même pas qu'il y a quelque chose qu'ils peuvent péter. Cette assurance charmerait, une fois que les femmes ont fait le deuil de leur bulle.

Car l'homme immigrant serait plus macho et plus sûr de lui. Il s'affirme, a confiance en ses habiletés de séducteur et, surtout, ne prend pas mal le rejet. Si la femme ne veut pas de lui, c'est elle qui perd quelque chose, et non pas le contraire. Lorsque la conférencière prononce ces mots, je regarde autour de moi pour voir si quelqu'un d'autre partage son opinion, et on dirait qu'il n'y a que moi qui ne suis pas d'accord avec cette affirmation.

Je me rends vite compte que je suis probablement rendu trop québécois et que ça ne s'applique pas à moi. J'ai soudainement envie de texter à toutes mes ex pour leur demander si je suis trop mou, mais j'y pense une fraction de seconde et je me dis qu'elles me répondraient assurément oui, sans hésitation.

Mais la femme immigrante, elle? Assurément, ça doit être rafraîchissant pour elle de ne pas se faire siffler en traversant la rue, de ne pas se faire harceler par une armée de dudes sur le dancefloor? À en juger par les histoires de Mme Coicou et des sourires approbateurs de beaucoup des femmes dans la salle, non, c'est plus déconcertant qu'autre chose. En fait, explique la spécialiste, c'est que dans plusieurs pays, notamment dans les cultures afro-caribéennes, les hommes ne seraient pas séducteurs nécessairement dans le but de séduire, c'est simplement un trait de caractère. Donc, lorsqu'une femme danse avec un homme ou se fait aborder par lui dans un bar, elle n'assume pas nécessairement que ça finira au lit. De la même manière que l'homme québécois prend le rejet personnel, la femme immigrante ne prend pas le flirt personnel.

Je dois vous l'avouer, je ne suis pas sûr d'avoir tout compris. Après tout, je suis un immigrant, mais je suis quand même né d'un père québécois et je suis ici depuis 20 ans. Donc c'est quoi mon deal? Suis-je vraiment trop mou? Est-ce que je pète des bulles?

Je ne me reconnais dans aucune des descriptions… Peut-être, aussi, que cet atelier s'adresse à des gens plus vieux que moi, des gens d'une époque où pour draguer, on abordait les gens dans la vraie vie (ouache!), plutôt que de simplement glisser dans des DM. Ou peut-être que je ne suis pas aussi cérébral que ça et que mes techniques de drague sont plus subtiles. En tout cas, je suis entré dans cet atelier-là avec la ferme intention de devenir le roi de la drague, mais j'en suis ressorti plus confus qu'autre chose.

Billy Eff est sur internet ici et .