FYI.

This story is over 5 years old.

Party

De jeunes musulmans racontent leur première brosse

« J’ai vomi sur sa blonde. Il y avait des morceaux de poulet frit Kentucky. »
Image by Ben Thomson

En Occident, prendre une bière avec son père est un rite de passage. Pour la plupart des musulmans, comme mes amis et moi, c'est une fantaisie taboue. Taboue, mais pas impensable, parce que, même si ceux qui suivent le droit chemin le nie, les musulmans avec lesquels j'ai grandi ont tous pris une ou deux gorgées avant que leur vie ne soit qu'oumma, dîn et haqq.

En fait, presque toute ma jeunesse, j'ai fait le party avec des musulmans. Ils aimaient peut-être boire parce que l'alcool était un fruit défendu, à cause de la pression des amis ou par pur hédonisme. Qui sait? Qui les juge? Pas moi. Mais ma grande curiosité m'a poussé à rencontrer ceux qui se sont éloignés de la voie à suivre et à leur poser des questions sur leurs flirts avec le péché. Pourquoi? Comment c'était? Et comment on se sent après?

Publicité

Moey, 29 ans, d'origine afghane

La première fois, c'est quand je suis sorti avec mes cousins plus vieux pour fêter mes 16 ans. J'ai bu une Corona. Avant, je me rappelle que j'étais très nerveux. Je me sentais comme si le monde entier allait tomber et exploser sous moi. J'ai pris une première gorgée, ça avait un goût de merde. Ils m'ont dit d'ajouter un quartier de citron dans la bouteille. Ça avait encore un goût de merde.

J'ai continué à boire pareil. Après la quatrième, je crois, j'ai marché vers un bar de l'autre côté de la rue et je me suis concentré très fort pour marcher en ligne droite, parce que j'avais l'impression que mes jambes ne pouvaient plus soutenir mon corps. Je ne voulais que m'étendre, mais j'essayais de me tenir droit devant mes cousins. Ils m'ont fait entrer discrètement dans le bar et, à l'intérieur, mon cousin Hakim m'a présenté à sa blonde. Je me suis dit que c'était la fille la plus sexy au monde. Elle avait les cheveux blonds et portait un top tube. Elle me parlait comme si j'étais un petit garçon, mais je m'en fichais tant que tout le monde dans le bar voyait qu'elle me parlait. Je ne sais pas pourquoi, mais je faisais comme si c'était ma blonde.

À un moment donné, Hakim m'a demandé si je voulais des shooters. Je lui ai répondu « pourquoi pas? » Les shooters étaient cent fois pires que la bière. Je pense que c'était de la tequila ou quelque chose comme ça, peu importe. J'ai vomi sur sa blonde. Il y avait des morceaux de poulet frit Kentucky. Tout le monde riait. Sauf elle. Je suis sorti avec mon nouveau chandail Cotton On couvert de vomi. En rentrant, on est passés par la maison d'un ami de mon cousin. Ils m'ont donné des vêtements de rechange et m'ont rapidement déposé chez moi pour retourner au bar.

Publicité

Je me souviens d'avoir été dégoûté quand je suis rentré et que je me suis vu devant le miroir. Après cet incident, mon père m'a interdit de rentrer plus tard qu'à minuit jusqu'à mes 21 ans. J'ai prié cinq fois par jour pendant quelques années, juste à cause de la honte. Je ne voulais plus jamais boire. Mais il m'est arrivé plus tard de prendre des wet pussy shots avec les copains.

Abz, 26 ans, d'origine iraquienne

La première fois, c'était après le foot. On est allés chez mon ami égyptien et tous les gars avaient prévu de prendre des verres dans le spa. J'étais gêné de dire que je ne buvais pas pour des raisons religieuses, alors j'ai cédé à la pression et enfilé des cocktails. Ils avaient un goût de boisson gazeuse au citron. J'ai commencé à en sentir les effets. Ensuite, quand on est allés dans le spa, on a pris des shooters. Les gars m'ont convaincu d'appeler la plus belle fille de l'école. Elle ne voulait rien savoir de moi. J'ai essayé de sauver mon orgueil en lui disant que sa meilleure amie était plus belle qu'elle. C'était pitoyable et embarrassant. Elle m'a raccroché la ligne au nez devant toute l'équipe, alors j'ai continué à boire.

Pour une raison ou une autre, j'ai complètement oublié que je devais rentrer. Tout ce temps, je ne voulais pas que ça se termine, j'étais heureux. Puis, la réalité m'a rattrapé. Tous les gars s'en allaient, un par un. Tout à coup, c'était à moi de partir. Je me rappelle avoir beaucoup parlé en mal de mes parents et de la religion. Les gars étaient tous autour de moi, comme s'ils me soutenaient, mais, le jour suivant à l'école, ils se sont tous payé ma tête.

Publicité

Quand je suis arrivé à la maison, ma prononciation était relâchée et je devais avoir mauvaise haleine parce que ma sœur, assise à côté de moi, s'est levée et est partie. Mon père a poliment demandé à tout le monde de monter à l'étage. Il était 20 heures 30 ou 21 heures. Personne chez nous ne se couchait si tôt. Je savais ce qui m'attendait. Ma seule porte de sortie était de m'enfuir comme un lâche. Dès que mon père est redescendu, je me suis mis à pleurer. J'ai dit que j'étais déprimé, que je ne savais pas quoi faire de ma vie et que tout le monde me détestait. Je pense que j'étais vraiment encore sincèrement un peu en colère que la fille m'ait raccroché la ligne au nez, alors ça n'a pas été trop difficile d'être en colère.

Noorzia, 24 ans, d'origine libanaise

La première fois que j'ai pris un verre, c'est quand mon amie Sarah a eu son permis de conduire. On a fait un tour en voiture et, comme elle venait d'avoir 18 ans, on est allées acheter de l'alcool. On a pris quatre bouteilles de Vodka Cruiser et on est revenues chez elle. Sa mère était très cool et nous a même préparé un plateau de fromages. On a ouvert les bouteilles en regardant un film. Je pensais que ce serait comme du poison, qu'à la première gorgée, je serais aspirée en enfer. J'y ai goûté et j'ai vraiment aimé la saveur. C'était très doux et sucré. Je me suis sentie confiante. Il n'y a pas eu de problème. Personne n'a été blessé.

On a passé une belle soirée à envoyer des textos à des gars et à parler de n'importe quoi. Je n'avais pas honte et je ne me suis pas sentie coupable du tout. Je me sentais responsable et plus adulte. Ça m'a fait reconsidérer ma position sur la religion et ça m'a un peu mise en colère que mes parents évitent les différentes expériences que le monde a à offrir parce qu'ils ont grandi dans une culture qui leur disait que de mauvaises choses leur arriveraient à leur mort. On s'en fout de ce qui arrive après la mort. Si vous êtes une bonne personne avec des principes, je suis sûre que tout ira bien.

Publicité

Hassan, 22 ans, d'origine turque

Pouvez-vous croire que j'ai pris de la drogue bien avant ma première gorgée d'alcool? Quand j'étais jeune, mon père me disait sans arrêt à quel point il détestait l'alcool, alors c'était profondément enraciné dans mon cerveau. Donc, pendant que tout le monde buvait, moi, je faisais des lignes de speed. C'était un peu bizarre parce que les gars étaient saouls alors que moi, j'étais en état d'hypervigilance. Je devais aussi parler sans arrêt.

Un soir, ma blonde et moi, on a passé un très mauvais moment et on a rompu, et mon revendeur de speed était à l'extérieur de la ville. Je suis donc allé m'acheter une bouteille de Johnnie Walker, je me suis assis dans mon auto devant la maison et j'ai commencé à boire. Ça me brûlait la gorge, mais je voulais me mettre K.O. À la moitié de la bouteille, je me souviens m'être demandé comment on pouvait aimer boire ça. J'ai été vraiment saoul et j'ai vomi partout dans l'auto.

Je me suis réveillé le lendemain matin dans mon lit avec la pire gueule de bois. J'ai remercié Dieu d'avoir réussi à me rendre dans mon lit en un seul morceau. Mais ma mère est ensuite entrée dans ma chambre en pleurant. J'ai pensé que quelqu'un était mort. Apparemment, j'avais perdu conscience dans la cour arrière. Ils ont trouvé mon portefeuille et mon téléphone à côté de mon auto. Les portes étaient grand ouvertes. Ce n'était pas beau à voir. Ils ont dû réveiller mon père au milieu de la nuit pour qu'il me porte jusqu'à mon lit. Je me suis senti comme si j'avais trahi toute ma famille. Après, mon père ne m'a pas adressé la parole pendant à peu près un an. Je l'ai profondément blessé. Encore aujourd'hui, il me critique et me regarde sévèrement quand quelqu'un parle d'alcool. Mieux vaut s'en tenir au speed, non?

Suivez Mahmood Fazal sur Twitter.