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Pourquoi le projet d'Étoile de la Mort des États-Unis a échoué

De toute façon, le plus gros canon de l'Histoire n'aurait jamais été suffisamment précis.
Capture d'écran : Youtube.

Cet article a initialement été publié sur War Is Boring.

À une époque pas si lointaine, les Etats-Unis ont investi des milliards de dollars dans leur programme de défense anti-missile « Star Wars ». On ne sait pas encore exactement dans quoi sont passés ces milliards, ces informations étant encore classées secret Défense, et on ignore en fait presque tout des armes spatiales exotiques qui ont été conçues vers la fin de la Guerre Froide.

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L'un de ces concepts, baptisé « Have Sting », aurait été le plus gros canon de tout notre système solaire – s'il avait été réellement fabriqué.

L'historien de l'aérospatiale Scott Lowther a publié quelques excellents diagrammes de Have Sting, un canon électrique orbital de la taille de la Station Spatiale Internationale. Après avoir étudié un rapport de General Electric sur le sujet, Lowther a pu faire quelques déductions concernant les caractéristiques du canon.

« Cet appareil semble être équipé de tout ce dont un tel système aurait besoin, de l'alimentation au contrôle thermique en passant par tous les capteurs nécessaires », affirme-t-il.

Un prototype de railgun du Bureau de Recherche Navale. Photo: US Navy

Dans un canon "normal", un propulseur chimique se dilate et envoie un projectile le long d'un tube en métal. Dans un canon électrique (ou railgun, en anglais), des champs électromagnétiques pulsés remplacent le propulseur chimique et font accélérer un projectile conducteur jusqu'à des vitesses extrêmes.

Les champs pulsés se génèrent le long d'une paire de rails (d'où le nom anglais) et le projectile circule sur ces rails comme un surfeur dans une vague.

Plus les rails sont longs, plus l'arme peut générer d'énergie électrique, et plus le projectile va vite. Les projectiles tirés par Have Sting auraient pu atteindre une vitesse de l'ordre de 56.000 km/h. À une telle vitesse – équivalente à celle d'une météorite se dirigeant vers la Terre – un projectile de la taille d'une canette de bière pourrait vaporiser l'ogive la plus solide.

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Le rapport originel ne détaillait pas les dimensions de l'appareil. Mais son réacteur, dont on connaît le design, permet à Lowther de spéculer. Il aurait fallu un treillis de 80 mètres de long pour supporter l'accélérateur électromagnétique de Have Sting, son réacteur nucléaire, une batterie de réservoirs cryogéniques, et des radars à commande de phase aussi gros que des chapiteaux de cirque.

Le générateur SP-100 de General Electric aurait généré 100 kilowatts, suffisamment pour alimenter le canon en temps de paix. Mais en temps de guerre, il lui faudrait encore plus de jus. Un réacteur à multi-megawatts aurait été trop lourd à transporter, alors les concepteurs se sont tournés vers une alternative.

L'un des plus gros problèmes qui se pose aux ingénieurs dans le domaine du vol spatial consiste à trouver un moyen d'injecter des tonnes de carburant et de comburant dans un moteur de fusée. L'équipe de Wernher von Braun à Peenemünde a trouvé la solution qui est toujours utilisée aujourd'hui : la turbopompe.

Un railgun spatial comme Have Sting pourrait aussi envoyer des cargaisons diverses et variées vers la Lune et d'autres planètes, comme une sorte de fusée réutilisable et autonome.

Dans une turbopompe, les différents carburants se mélangent et s'enflamment, mais au lieu de produire une poussée, ils font tourner une turbine à gaz qui actionne une pompe à fuel. On peut parfois voir des turbopompes en action lors des lancements de fusées, en prêtant attention aux petites flammes d'échappement proches des moteurs.

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La turbopompe a inspiré la création du turbogénérateur, où la pompe est remplacée par un générateur électrique. Au lieu de consommer des tonnes de carburant par seconde, l'appareil génère des megawatts d'électricité. Le turbogénérateur de Have Sting aurait pu générer jusqu'à 90 megawatts – plus de deux fois la capacité du sous-marin futuriste USS Zumwalt.

Pour stocker de l'hydrogène et de l'oxygène liquides, destinés à alimenter le turbogénérateur, Have Sting aurait eu besoin de vastes réservoirs ressemblant un peu à des thermos et équipés d'écrans solaires ainsi qu'un système de réfrigération performant. On ne peut que supposer qu'une sorte de système de ravitaillement orbital aurait été mis en place pour renouveler le contenu des réservoirs.

Mais vu ce à quoi était destinée l'arme, le ravitaillement orbital aurait posé quelques problèmes pendant la Troisième guerre mondiale.

Un tir d'une puissance de 33 mégajoules, par le railgun de l'US Navy. Photo: US Navy

Un énorme canon n'a de valeur que s'il est suffisamment précis. La plupart des illustrations du projet "Star Wars" ne s'embarrassent pas de représenter de véritables systèmes de visée. « Des systèmes de détection de cette ampleur ne sont presque jamais représentés sur les dessins, mais ils seraient absolument nécessaires, juge Lowther. Les cibles visées se déplaceraient rapidement, elles seraient très petites, et situées à des milliers de kilomètres de distance. »

Have Sting comptait trois énormes antennes réseau à commande de phase de 60 GHz à son extrémité, ressemblant à des yeux de libellule. A priori, c'est à peu près tout ce que l'on saura de Have Sting avant un bon moment. Lowther a demandé plus d'informations en vertu du Freedom of Information Act, mais comme il le dit lui-même, « les chances d'obtenir plus de détails sont minces. »

En attendant, on peut imaginer de possibles dérivés de cette technologie. Les railguns font partie de l'imaginaire des passionnés de l'espace depuis bien longtemps déjà. Il faudrait toutefois modifier tout un tas de traités internationaux avant que les Etats-Unis ou un quelconque autre pays puisse fabriquer et utiliser un tel appareil.

Un railgun spatial comme Have Sting pourrait aussi envoyer des cargaisons diverses et variées vers la Lune et d'autres planètes, comme une sorte de fusée réutilisable et autonome. En théorie, il pourrait également bombarder un astéroïde se dirigeant vers la Terre avec des munitions suffisamment précises pour modifier sa trajectoire sans le transformer en tas de débris incontrôlables.

Mais il se peut qu'au final, le turbogénérateur soit le legs majeur du projet "Star Wars". Une génération nous sépare désormais de la fin du programme, et les lasers et autres railguns existent bel et bien. La demande d'armes légères et très puissantes ne peut que croître à l'avenir. Les navires de guerre du futur sépareront sans doute l'hydrogène et l'oxygène de l'eau pour alimenter des armes exotiques dotées d'une puissance de feu extraordinaire.

Évidemment, il est du devoir des militaires de s'assurer que les plans de tels appareils ne tombent pas entre de mauvaises mains. Et par pitié, n'installez pas de système de refroidissement là où n'importe quel pilote de X-Wing déterminé pourrait l'atteindre.