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Culture

Cherchez l’erreur dans les photos d’Esther Hovers

Cette femme qui se retourne sur son passage et cet homme qui court sans raison apparente sont peut être des criminels en puissance.
Toutes les images sont issues de la série « False Positive » d'Esther Hovers.

Des scènes de rue tout à fait ordinaires qu'on pourrait faire défiler avec ennui — jusqu'à remarquer des détails intrigants qui nous poussent à réexaminer ces photos avec soin. La série « False Positive » d'Esther Hovers est un « où est Charlie » à taille humaine version « cherchez l'erreur ». En gros, un peu ce à quoi jouent des « caméras de surveillance intelligentes » en direct. Un homme qui en poursuit un autre dans la rue peut s'apparenter à une scène de vol. Un attroupement d'individus homogène peut également paraître suspect. Mais qui sommes-nous pour juger ?

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Si en général on se garde bien de se mêler de ses affaires, les milliers d'yeux de ces super-caméras qui nous observent dans les moindres recoins de nos villes modernes cherchent quant à elles à repérer ces comportements inhabituels, considérés comme des « anomalies ». Des algorithmes se chargent de les détecter et les transmettre ensuite aux autorités compétentes. La photographe néerlandaise Esther Hovers s'est intéressée à cette surveillance de masse et à ces « comportements déviants » en particulier.

Pour sa série exposée au Festival Circulation(s) au CentQuatre à Paris, elle s'est elle-même muée en espion, se postant dans le quartier d'affaires de Bruxelles avec son Nikon D700 posé sur un trépied. Et d'attendre qu'une scène correspondant aux huit « comportements anormaux » qu'elle a listé se matérialise sous ses yeux. Elle n'hésite pas non plus à les provoquer, en demandant à un passant d'adopter telle ou telle attitude. Hovers avoue s'être déjà fait virer de son poste d'observation, passant à son tour pour une suspecte. L'arroseur arrosé, en somme. Elle dit avoir eu l'idée de cette série suite à à un séjour à Paris où elle a pu observer les comportements des passants dans le quartier de La Défense, comme elle l'explique à Fotografia Magazine.

Hovers superpose ensuite dans Photoshop plusieurs de ces images prises sur une même scène. « C'est pourquoi elles semblent avoir été mises en scène, en quelque sorte, parce qu'il y a plus d'un seul instant dans une même image », raconte-t-elle à Wired. Hovers expose ses photos aux côtés des schémas de flux « normaux » qu'à mémorisé le logiciel des caméras. Son projet a ainsi pour double but de poser la question de la normalité des comportements dans l'espace public ainsi que l'omniprésence de la surveillance de masse et sa sophistication.

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« Ce qui me frappe c'est que [ces comportements déviants] sont si proches de ce que l'on considère comme normal », dit encore Hovers au magazine américain. Celle qui se dit influencée par des photographes comme Paul Graham ou Paulien Oltheten, mais aussi par les chorégraphies d'Anne Teresa De Keersmaeker, est pourtant partagée sur les problématiques de libertés personnelles et de sécurité publique que soulève ce système de surveillance. Si elle se dit sceptique, elle « comprend aussi le besoin de prévention et de sécurité ». Big Brother n'est plus très loin.

Vous pouvez voir la série « False Positive » au Festival Circulation(s), au CentQuatre à Paris, du 26 mars au 26 juin 2016. Un aperçu est également disponibles sur le site d'Esther Hovers.