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Au Royaume-Uni, avoir un herpès peut vous causer de sérieux ennuis

En matière de rupture, il est impossible de faire pire que David Golding. Quand sa copine a découvert qu'il lui avait refilé un herpès, elle l'a largué, porté plainte et n'a eu aucune pitié quand il est parti en prison.

Un type et son bouton de fièvre, conséquence du virus de l'herpès. Photo : Wikimedia Commons

En matière de rupture, il est impossible de faire pire que David Golding. Quand sa copine a découvert qu'il lui avait refilé un herpès, elle l'a largué, porté plainte et n'a eu aucune pitié quand il est parti en prison. David Golding a été condamné à une peine de 14 mois ferme pour avoir transmis le virus. La sévérité de la sentence s'explique par l'accusation de lésion corporelle grave portée à l'encontre de Golding – qui a plaidé coupable. Habituellement, une telle peine n'est prononcée qu'en cas d'attaque à l'arme blanche ou d'agression, et non pas quand quelqu'un a transmis une maladie qu'environ 25% de la population britannique sexuellement active a déjà.

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Évidemment, les associations médicales ont exprimé leur mécontentement face à ce verdict et affirmé qu'il stigmatisait cette maladie « insignifiante ». Les mêmes organismes se sont indignés lorsque le tribunal a rejeté l'appel interjeté par Golding. Treacy, le juge d'appel, accompagné de deux autres collègues, a déclaré que, même si le prévenu avait agi « imprudemment plutôt que délibérément », sa condamnation originelle était appropriée. Néanmoins, sa peine a été réduite à trois mois de prison.

J'ai passé un coup de fil à Marian Nicholson, directrice de l’association Herpès, afin d'avoir l'avis d'un spécialiste sur ce verdict.

Marian Nicholson, directrice de l’association Herpès

VICE : Que pensez-vous de la décision du juge concernant le rejet de l'appel de David Golding ?
Marian Nicholson : Je trouve cela très choquant.

La sentence est-elle disproportionnée ?
Je préfère ne pas commenter la durée de la peine car je ne m'y connais pas assez en droit. En revanche, je pense que cette affaire est néfaste pour l'intérêt public ; le juge a même admis que Golding n'avait pas transmis délibérément le virus à sa petite amie.

La décision du juge de rejeter l'appel de Golding constitue-t-elle une menace pour ceux qui risqueraient de se retrouver dans la même situation ?
Bien sûr. C'est une catastrophe car les gens risquent de se méprendre sur la maladie. Les médecins spécialisés sont d'accord avec nous sur ce point. Ces docteurs font partie des meilleurs d'Angleterre et sont tous horrifiés par cette affaire ridicule.

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L'herpès génital est très commun. Il est quasiment impossible de prouver qui vous l'a refilé ; n'importe qui ayant un bouton de fièvre et adepte du sexe oral pourrait le transmettre aux organes génitaux de son partenaire. Cette accusation signifie que toute personne atteinte de cette maladie pourrait se retrouver sur le banc des accusés.

Pensez-vous que la sentence originelle et le rejet de l'appel soient liés à l'idée qu'on se fait de l'herpès ?
D'un point de vue médical, les boutons de fièvre sont vraiment insignifiants. Jusqu'à l'invention des médicaments antiviraux au début des années 1980, ils n'étaient pas forcément vus d'un mauvais œil, où qu'ils soient sur le corps. Aujourd'hui, n'importe quel docteur qui connait cette maladie vous dira qu'il vaut mieux l'attraper sur les parties génitales que sur le visage où ils représentent un plus grand danger.

Il est donc préférable d'avoir un herpès génital ?
Oui, et ce n'est pas une bonne nouvelle quand on a dépensé des millions pour développer les médicaments antiviraux. La médisance envers le virus a été créée par les sociétés pharmaceutiques qui vendent des traitements contre l'herpès génital. Après en avoir fait toute une histoire, ces entreprises ont poussé les mères atteintes de la maladie à accoucher par césarienne, mais elles n'ont rien fait pour empêcher celles ayant des boutons de fièvre d'embrasser leurs nourrissons.

Pourquoi n'a-t-on pas encore réussi à normaliser cette maladie ?
D'un point de vue médical, cette maladie est peu importante. C'est pourquoi il n'y a jamais eu de réelle concertation pour la dédramatiser – contrairement à ce qu'on a vu avec le sida dans les années 1980. C'était important avec le VIH car c'est une maladie mortelle, et les gens doivent la connaître pour pouvoir la traiter. On ne peut pas demander aux médecins de faire la même chose pour les boutons de fièvre car ils savent que ce n'est pas grave. Malheureusement, les juges sont tout aussi mal renseignés que la population dans son ensemble.

Pensez-vous que les choses puissent s'empirer suite à cette affaire ?
Je ne pense pas. Les gens nous appellent en s'inquiétant de ne plus jamais trouver de partenaire depuis la mise en place de notre ligne d'assistance téléphonique en 1985.

Que faudrait-il faire pour que la situation s'améliore ?
Il faudrait éduquer les gens. Statistiquement, à l'âge de 25 ans, sept personnes sur dix sont porteuses du virus. À l'âge de 35 ans, il serait très difficile de trouver une femme qui ne soit pas porteuse du virus. Si vous avez eu sept partenaires, vous pourriez avoir un herpès simplex de type 2 [qui, la plupart du temps, donne lieu à un herpès génital]. Si vous ne pensez pas l'avoir, c'est parce que seulement une personne sur cinq a des symptômes assez graves pour qu'on lui diagnostique la maladie. Si on suit la logique des juges dans l'affaire Golding, cela revient donc à faire paraître un cinquième de la population devant la Cour.

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