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FRANCE

Le suspect de la décapitation en Isère nierait toute motivation religieuse

En garde à vue, Yassin Salhi a donné des explications sur ses actes, à commencer par l’assassinat de son employeur. Une photographie de celui-ci aurait été envoyée en Syrie.
Photo by Emmanuel Foudrot/Reuters

Ce lundi à la mi-journée, Yassin Salhi, principal suspect de l'attaque de l'usine Air Products et de la décapitation de son patron vendredi dernier en Isère, est toujours en garde à vue dans les locaux de la police antiterroriste de Paris où il a été emmené ce week-end après une perquisition en sa présence à son domicile ce dimanche. Il aurait déclaré aux enquêteurs ne pas avoir agi au nom de la religion, rapporte l'AFP, citant une source proche du dossier.

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Le principal suspect (linge blanc sur la tête) de l'attaque de vendredi, encadré ce dimanche par la police française à son arrivée chez lui pour une perquisition en sa présence.

Arrêté et mis en garde à vue vendredi, Yassin Salhi a avoué samedi soir avoir assassiné et décapité Hervé Cornara, son employeur, puis avoir accroché sa tête à une grille de l'usine Air Products avant de projeter son véhicule sur le bâtiment pour provoquer une explosion en chaîne, faisant deux blessés. Lors des interrogatoires de ce week-end,Yassin Salhi a également évoqué des problèmes à son travail et au sein de sa famille, rapporte la chaîne iTélé.

Un salarié de l'usine où travaillaient Salhi et son patron a fait état d'un différend entre eux deux. Deux jours avant l'attaque, Salhi aurait renversé une palette chargée de matériel informatique, ce qui aurait déclenché le conflit. Une source proche de l'enquête, citée par le journal Le Monde, évoque également des menaces de divorce de la part de la femme de Salhi, et le fait que celui-ci reproche à son épouse de ne pas être assez religieuse. D' après iTélé, le principal suspect de l'attaque aurait affirmé « avoir voulu se suicider en réalisant un coup médiatique ».

À lire : Attaque en Isère, le récit de la journée

Dans les heures qui ont suivi l'attaque, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a fait savoir que Salhi avait fait l'objet d'une surveillance pour radicalisation entre 2006 et 2008, puis entre 2011 et 2014 pour ses liens avec la « mouvance salafiste ».

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Un enquêteur estime dans Libération que « L'intention première de Salhi semble bien de tuer son patron mais, puisqu'il est fortement radicalisé depuis dix ans, il l'a fait selon l'imagerie djihadiste. »

Une photo envoyée en Syrie

Les premiers éléments de l'enquête indiquent que Yassin Salhi s'est pris en photo avec la tête décapitée de son patron. L'image a été envoyée via l'application WhatsApp. Le destinataire final, selon les enquêteurs, serait un certain « Yunes-Sébastien », un Français qui a rejoint la Syrie en novembre 2014. Cet homme serait, aux dires de Salhi, son « seul ami », qu'il aurait gardé de son passage à Pontarlier et Besançon, dans l'Est de la France. À cette époque, les enquêteurs pensent que Salhi côtoyait un prêcheur particulièrement radical et accusé d'avoir participé à un attentat en Indonésie, surnommé « Grand Ali ».

Salhi aurait également crié « Allah akbar » (Dieu est le plus grand) aux pompiers qui l'ont maîtrisé alors qu'il manipulait d'autres bouteilles de gaz, pendant l'attaque, ont indiqué des sources proches du dossier. En ce qui concerne les tissus retrouvés à côté de la tête de la victime et sur lesquels des inscriptions ont été retrouvées, ils sont « marqués de la Chahada » —la profession de foi de l'islam — a déclaré le procureur de la République de Paris, François Molins, le soir de l'attaque.

Un point d'ombre concentre particulièrement l'attention des enquêteurs : en 2010 ou 2011, Yassin Salhi aurait confié à une connaissance être allé dans une école coranique en Syrie, rapporte Libération, qui précise que les services de renseignement n'ont pour l'instant « aucune trace » de ce séjour.

La mère et la soeur de Salhi auraient, quant à elles, affirmé que celui-ci s'est rendu en Syrie en 2009. C'est pour vérifier son parcours et retrouver son passeport que les enquêteurs ont emmené Salhi à son domicile de Saint-Priest, en région lyonnaise, ce dimanche. Ils n'ont finalement pas retrouvé le passeport, que Salhi dit finalement avoir « brûlé lors d'un séjour au Maroc », rapporte Le Monde.

Si le doute est encore de mise sur les motivations exactes du geste de Yassin Salhi, certaines réactions politiques qui ont suivi son attaque étaient plus tranchées. Le Premier ministre Manuel Valls s'est notamment attiré les critiques de la gauche en évoquant, dimanche, une « guerre de civilisation ». Il avait déjà parlé de « terrorisme islamiste », peu après l'attaque, alors que le président François Hollande ne parlait que de « terrorisme » sans ajouter de qualificatif.

Suivez Matthieu Jublin sur Twitter : @MatthieuJublin

Photo by Emmanuel Foudrot/Reuters