Musique

Comment vivre sur le précipice du succès, selon Spanish Love Songs

Parfois, l’instabilité a ses effets positifs.
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J’avais inclus Schmaltz, le deuxième album du groupe punk rock californien Spanish Love Songs, dans mes 25 meilleurs albums parus en 2018. Lorsque j’ai découvert le groupe en 2015, il recevait souvent le même commentaire : trop de ressemblances avec les Menzingers. Mais je sentais qu’il y avait au-delà des similarités quelque chose de spécial chez Spanish Love Songs, un peu comme s’ils avaient trouvé une formule secrète pour créer un style musical particulier et contagieux, qui distille en chanson l’esprit « Pabst & jean jackets » que je romance tant.

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Après avoir connu une excellente année l’an dernier, accumulant les tournées et les critiques positives par rapport à leur album, le groupe a récemment signé un contrat de disques avec la légendaire étiquette Pure Noise. Pour sa première sortie sur ce nouveau label, Spanish Love Songs a sorti Losers, un 7 pouces de deux chansons, qui traitent surtout de l’instabilité qui vient avec cette phase dans sa carrière musicale : entre être constamment en tournée, mais aussi devoir garder un emploi régulier pour survivre.

Alors que le groupe est présentement en tournée en Europe, après laquelle il effectuera un passage à Montréal pour le festival Pouzza le week-end prochain, je me suis entretenu avec Dylan, le chanteur et parolier du groupe, pour qu’il m’en dise plus sur ses moyens de survivre à cette instabilité.

VICE : Salut Dylan! Vous avez passé une bonne partie de l’année dernière à tourner. À quel moment avez-vous trouvé le temps d’enregistrer ce 7 pouces?
On a eu l’idée de le faire et on a commencé à travailler dessus le 8 janvier, et on devait l’envoyer à notre maison de disques le 2 février! Donc, on a dû faire ça le plus vite possible, à des moments où on avait des trous dans nos horaires de travail respectifs.

Comment vivez-vous cette période où vous tournez beaucoup? Vous venez de signer un contrat de disques, et pourtant vous devez rentrer à la maison et avoir des emplois réguliers?
On fait ce qu’on peut pour rester à flot! C’est certain que c’est un peu bizarre, mais on ne va pas non plus se plaindre, vu qu’on a l’opportunité de vivre notre rêve pendant la moitié de l’année. Je crois que c’est la norme pour beaucoup de groupes, ce qui choque souvent les gens, mais ce n’est qu’un autre boulot, pour nous. On n’a pas à s’asseoir derrière un bureau pendant la moitié de l’année, ce qui nous convient. C’est difficile parfois, mais l’important est d’être capable de reconnaître lorsqu’on est heureux dans les deux situations, en tournée et lorsqu’on retourne au travail, sinon on ne finit que par vouloir l’autre chose.

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Sur Schmaltz , un thème majeur était que vous n’êtes pas encore aussi connus, ou en mesure de faire ça à temps plein, comme certains de vos amis. Est-ce que ce rêve semble se concrétiser maintenant?
Je crois qu’on le voit à l’horizon, bien qu’on en soit encore loin. Le groupe est plus important pour nous que nos désirs individuels, et bien entendu on voudrait pouvoir faire ça de nos vies. Mais on en est assez près pour prendre la décision stupide de continuer à le faire, ce qui nous met certainement dans une position très privilégiée.

Tu sais, c’est terrifiant de naviguer nos options pour réussir à continuer de faire ce qu’on fait, mais jusqu’à maintenant on s’est dit screw it, et on fonce comme on peut jusqu’à tant qu’on réussisse, et ça fonctionne.

Quels sont les plus grands changements que vous avez dû faire dans vos vies pour pouvoir continuer à faire partie de ce groupe?
Déjà, j’ai déménagé de Los Angeles, où je vivais depuis 10 ans, donc ça, c’était assez majeur! Je ne paye donc plus un loyer de fou alors que je suis parti en tournée une bonne partie de l’année, mais je n’ai plus vraiment de maison.

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Meredith vient de renoncer à son emploi de rêve. C’était un excellent job, et elle a choisi le groupe à la place. Je crois qu’on a tous dû faire des croix sur certains trucs majeurs dans nos vies.

Est-ce que c'est une décision assez facile à prendre pour vous, vu que vous avez toujours voulu faire de la musique?
C’est une décision difficile. C’est très stupide comme choix que de renoncer à sa sécurité et sa stabilité pour aller être dans un groupe. Mais en même temps, c’est le truc auquel la plupart d’entre nous sont bons, donc, à un moment, tu dois faire face à la réalisation que le truc auquel tu es bon ne paye pas très bien, et tu ne peux qu’en rire et profiter de l’instant.

Parlant de ce à quoi tu es bon, tu es connu pour tes paroles tristes et autodérisoires. As-tu peur que, si ton rêve se concrétise, tu ne sois plus suffisamment triste pour pouvoir continuer à en écrire?
J’imagine qu’on le découvrira bientôt! [rires] Mais non, je ne crois pas, car beaucoup de cette tristesse ne vient pas de mes rêves ou mes attentes, et a plutôt à voir avec la manière dont je pense et je ressens certaines choses, mais je n’ai pas non plus peur d’être ouvertement content. Et de toute façon, mon rêve de pouvoir faire de la musique à temps plein ne changerait pas grand-chose au fait que ça reste une vie quand même difficile. La vie reste ce qu’elle est, donc je crois que, niveau paroles tristes, ça continuera de bien aller. Ou plutôt de ne pas bien aller!

Billy Eff est sur internet ici et .

Spanish Love Songs seront en concert à Montréal le vendredi 17 mai au Katacombes, dans le cadre du festival Pouzza.