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Sports

Célia, la tatoueuse officielle des rugbymen

La seule femme qui arrive à les faire chialer tout en les rendant plus beaux.
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J'étais un peu en avance sur notre heure de rendez-vous. Installée dans ma voiture, j'ai vu Célia arriver de loin. Alors que je ne l'avais jamais rencontrée, j'aurais pu la reconnaître entre 1000 ! On peut dire qu'elle a le profil de l'emploi : jambes, poitrine, bras tatoués, l'allure sportive et un tempérament de fonceuse qui se devinait déjà dans sa démarche.

Célia, du haut de son mètre 63 et de ses 55 kg, tatoue les joueurs de rugby. Faut dire, qu'elle sait y faire pour appâter ces gars. Sa boutique, située en face du mythique stade Mayol de Toulon, est un peu un musée du rugby. Maillots dédicacés, vitrine de trophées, photos des rugbymen qu'elle a tatoués… Tout est fait pour que les joueurs ne se sentent pas dépaysés. « Le premier joueur emblématique que j'ai tatoué, c'est Gaël Fickou il était alors encore Seynois (il y reste jusqu'en 2009, ndlr). » Depuis, elle ne compte plus les pros qui se sont allongés sur sa table. « Le monde du rugby est petit, c'est comme une famille, le bouche-à-oreille a très bien fonctionné. Maintenant, ils traversent la France entière pour venir dans ma boutique. » Bien qu'elle soit « extrêmement fière » d'avoir tatoué plus de 50 joueurs professionnels, dont David Attoub (Lyon), Ikapoté Fono (Biarritz Olympique), Uini Atonio (La Rochelle), Maxime Machenaud (Racing 92), et beaucoup d'autres, il manque cependant un joueur à son lourd palmarès : « Je kifferais tatouer Sébastien Chabal, mais malheureusement je n'ai pas eu cette chance », regrette-t-elle.

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Sa spécialité ? Elle n'en a pas vraiment mais les tracés fins, les écritures bibliques, les figures polynésiennes sont les tatouages les plus demandés par les joueurs. Un travail tout en finesse qui contraste avec le gabarit hors normes de ses clients. « La plus grosse pièce que j'ai faite pour un joueur, c'était un demi dos que j'ai réalisé pour Olivier Milloud, ça a pris la journée ! » Si tous ces joueurs se bousculent chez Célia c'est certes grâce à ses doigts de fée et son diplôme des Beaux-arts, mais aussi parce qu'elle parle rugby. « Du lever au coucher je pense rugby, c'est mon mode de vie mais aussi celui de ma famille. On est sept jours sur sept sur le pré.» Ancien pilier d'une équipe féminine, elle aimerait désormais jouer à un poste de trois-quarts. « C'est un poste qui me correspond moins mais j'ai perdu plus de 50 kg en 2 ans, je ne peux plus assurer mon rôle de pilier. » En attendant de pouvoir reprendre les entraînements, elle coache son fils et sa fille qui travaillent dur pour atteindre le niveau professionnel. « J'ai un diplôme d'État d'entraîneur de rugby qui me permet de bien conseiller mes enfants », mais aussi de créer une complicité avec les grands gaillards du circuit souvent « très timides et peu loquaces ». « Pendant que je les tatoue je mets un match ou un reportage sur le rugby à la télé, ils oublient un peu la douleur. C'est surprenant de la part de bonhommes comme ça, mais beaucoup chouinent dès que je pose l'aiguille ! Alors je fais tout pour les chouchouter ! » Et c'est sûrement là l'une des clés de sa notoriété.

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Elle est tellement populaire que certains profitent des matches au stade Mayol pour venir se faire une petite beauté. « Ils viennent après la fin du match. J'ouvre la boutique spécialement pour eux, il m'arrive de fermer à 3 heures du matin, mais en contrepartie je vis mon rêve au quotidien ! Et puis je ne vais pas rater une occasion de côtoyer des beaux gosses », s'amuse-t-elle.

Quand ils ne se déplacent pas, c'est elle qui va jusqu'à eux. « Une semaine par mois je baisse le rideau et je pars faire la tournée des clubs du Top 14 pour tatouer les gars ». Mais sa tournée elle ne la fait pas uniquement pour tatouer le peu de joueurs qui ne sont pas encore griffés 'Célia'. Elle en profite pour prendre des photos et recueillir des anecdotes qu'elle compile dans un livre dont la sortie est prévue en avril prochain. « Des liens étroits se sont créés avec beaucoup de joueurs, ils m'hébergent chez eux quand je suis de passage dans leur ville, ils donnent des conseils à mon fils… » Certains, comme Christian Califano lui font même des cadeaux inestimables : « Christian m'a offert sa cape qu'il avait reçue en 1999 pour sa sélection en équipe de France contre la Nouvelle-Zélande. Dans une carrière, tu l'as qu'une seule fois un truc comme ça ! Ca reste un moment très fort de ma vie ! »

Si, la plupart du temps, elle tatoue gratuitement les joueurs, elle reçoit en contrepartie des tenues de sport, des crampons et des maillots dédicacés. « J'en garde toujours un pour ma collection personnelle, qui compte aujourd'hui 400 maillots, et l'autre je le vends afin de remettre l'argent à une association. » Et deux lui tiennent particulièrement à cœur, "La vie de Tehanie" et "Le sourire de Lucie", dont elle est membre.

« Je manque de temps pour être bénévole, c'est ma façon de contribuer à des associations. Le reste des équipements que je ne donne pas, je les offre à des minots issus de milieux défavorisés. T'imagines même pas les yeux qu'ils ont quand je leur apporte des sacs entiers de vêtements de joueurs… C'est mon plus grand bonheur de pouvoir leur faire plaisir ! »