La polio sera probablement éradiquée avant la fin de l’année

Nous serions sur le point d'éliminer l'une des maladies les plus redoutables au monde : la poliomyélite.

Le virus préhistorique pourrait bientôt rejoindre la variole, éradiquée en 1980, dans le paradis des maladies infectieuses dont l'humanité a réussi à se débarrasser. Selon l'Organisation Mondiale de la Santé, la polio pourrait être rayée de la surface de la Terre d'ici un an.

Cette année, le Pakistan et l'Afghanistan auront été les seuls pays à connaître des cas de polio héritée de souches sauvages (par opposition aux souches destinées aux vaccins). Ayant enregistré respectivement 2 cas pour l'un et 7 cas pour l'autre, on reporte donc 9 cas de poliomyélite seulement dans le monde en 2015.

L'OMS estime que même si on observait une recrudescence de cas dans les mois à venir, la maladie, qui affligeait des milliers d'enfants de paralysie il y a encore peu, serait bientôt inoffensive.

« Il faut rester très attentifs, bien sûr, mais nous pensons que nous sommes sur le point d'atteindre ce moment où la transmission du virus sera tout à fait interrompue ; probablement à la fin de cette année, ou à la fin de l'hiver début 2017, » explique Michel Zaffran, à la tête du programme d'éradication de la polio à l'OMS.

La maladie, qui se propage par contact humain, affecte avant tout les zones où les conditions d'hygiène sont mauvaises. L'OMS concentre donc ses efforts sur les territoires où le virus est encore présent, comme la capitale pakistanaise Karachi, ainsi que deux autres zones pauvres dans le pays.

En Afghanistan, 47 quartiers ont été mis sur liste prioritaire pour tests et vaccination. Les soignants et agents de santé de l'OMS doivent composer avec le fait que 32 de ces quartiers sont contrôlés par des forces anti-gouvernementales. Hélas les conflits politiques dans la région ont déjà interféré avec les campagnes de vaccination.

La diminution spectaculaire des cas de polio est en grande partie due à un effort mondial pour éradiquer la maladie : depuis 1988, 2,5 milliards d'enfants ont été vaccinés. La dose de vaccin oral, qui est le plus fréquemment administré, coûte seulement 10 centimes aujourd'hui.

La forme injectable du vaccin est plus sûre à certains égards, car elle contient une version inactive du virus qui est tout à fait incapable de muter pour devenir infectieuse. Un milliardaire indien à la tête d'une entreprise pharmaceutique a commencé à vendre ce vaccin injectable à perte en 2013, et les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies américains affirme que cette initiative sera probablement suivie par d'autres firmes pharmaceutiques, jusqu'à ce que les cas de polio issus de souches sauvages soient parfaitement éradiqués.

Pendant ce temps-là, entre le 17 avril et le 1er mai, 150 pays passeront du vaccin oral au vaccin injectable. Le vaccin d'origine, trivalent, protège contre trois types de polio, tandis que le nouveau, bivalent, protège contre deux types seulement.

On pourrait donc se demander si, de ce point de vue, le changement vaut le coup. Pourtant oui : un type de souche, le poliovirus sauvage de type 2, n'a pas été observé depuis 1988. En revanche, dans ces circonstances exceptionnelles, par exemple si la population n'a pas été vaccinée de manière adéquate, le virus vivant du vaccin oral peut muter et infecter de nouveau des individus. Ce risque ne doit pas être négligé.

Dans 90% des cas d'infection, le poliovirus sauvage de type 2 était responsable de l'épidémie. C'est pour cette raison qu'il a été le premier visé par le programme d'éradication.

Selon l'OMS, on a reporté environ 350 000 cas d'infection en 1988, et seulement 359 en 2014. Si la maladie était réellement éradiquée, cela constituerait une victoire sans précédent pour la médecine moderne, et une preuve qu'un effort international parfaitement coordonné peut avoir des résultats impressionnants en matière de santé.