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Téhéran est en plein « Airpocalypse »

La topographie, la circulation, les vieilles voitures, et la mauvaise qualité du carburant ont provoqué cette pollution de l’air, qui a contraint les autorités iraniennes à demander aux habitants de ne pas sortir de chez eux.
Photo de Abedin Taherkenareh/EPA

Ce lundi, le niveau de pollution de l'air à Téhéran a battu des records, ce qui a motivé les autorités à demander aux 14 millions d'habitants de la ville de ne pas sortir de chez eux.

L'Air Quality Index, qui permet de contrôler les niveaux de pollution dans la capitale iranienne, a placé ces derniers jours en « alerte rouge », ce qui indique que la qualité de l'air est dangereuse pour tout le monde — pas seulement pour les personnes sensibles, comme les personnes âgées ou les enfants.

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« Le niveau de qualité de l'air aujourd'hui était de 162. Téhéran a atteint le niveau d'alerte rouge », a déclaré un responsable de l'Air Quality Control Company aux médias. « Respirer dans ces conditions est considéré comme inadapté pour tout le monde. »

L'agence de presse affiliée à l'État, Tasnim News Agency, a rapporté que le niveau avait atteint sept fois le maximum recommandé par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) — c'est le deuxième taux le plus haut depuis que l'année a commencé en mars (le nouvel an iranien étant célébré fin mars).

Les autorités sanitaires ont estimé qu'en 2012, la pollution avait contribué à la mort prématurée de 4 500 personnes à Téhéran et de près de 80 000 personnes au niveau national.

À lire : En Chine, l'air est tellement pollué que la vente de bouteilles d'air pur canadien explose

La topographie iranienne a contribué à aggraver le problème de la pollution à Téhéran, selon Armin Sorooshian, un ingénieur environnemental de l'université d'Arizona.

« Les montagnes empêchent toute ventilation et bloquent le vent qui pourrait nettoyer la zone. Ainsi, les polluants s'accumulent, comme dans une cuvette », a expliqué Sorooshian. Ces conditions sont exacerbées l'hiver, dit-il, à cause de l'inversion de températures qui se forme à la surface.

Même si les mesures restent loin derrière les taux qu'a connu la ville de Pékin le mois dernier — elle avait atteint 50 fois les taux recommandés par l'OMS — les autorités ont annoncé qu'elles allaient essayer de trouver une solution à ce problème.

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Le mois dernier, le leader suprême de l'Iran, l'Ayatollah Ali Khamenei, a rendu public une liste de 15 suggestions liées à l'environnement. Adressée au président Hassan Rohani, la lettre appelait à des investissements accrus dans les énergies propres et dans la diplomatie environnementale.

Sur son blog, la vice-présidente de l'Iran et directrice de l'Organisation pour la protection de l'environnement, Masoumeh Ebtekar, notait que ces politiques représentaient des « stratégies de haut niveau » qui allaient « définir les grandes lignes et le contenu des politiques majeures dont nous avons besoin pour l'environnement en Iran. »

Khamenei a en particulier recommandé le développement des transports publics propres. Les émissions des véhicules sont en effet les plus gros contributeurs de la pollution de l'air.

Même si les rejets industriels et les activités des entreprises sont des causes importantes pour la pollution de l'air, on estime que la pollution des véhicules contribue à 80 pour cent à la pollution de l'air de la ville de Téhéran, comme d'autres grandes villes du pays.

Selon David Michel, un membre non-résident du Stimson Center, la pollution des véhicules soulève quatre principaux problèmes : le nombre de voitures à Téhéran, l'ancienneté de ces véhicules, le type de carburant utilisé, et la quantité de carburant brûlé.

« Les routes de Téhéran ont une capacité de moins d'un million de voitures, mais il y a désormais plus de 3,5 à 4 millions de voitures dans la ville », explique Michel. « Ce n'est pas non plus Cuba, mais les voitures sont vieilles et ne possèdent pas les technologies de contrôle des émissions qui existent aux États-Unis et dans les pays occidentaux. »

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La qualité du carburant brûlé pour les transports en Iran a souffert, dans une certaine mesure, des sanctions qui ont limité la capacité du pays à raffiner son propre pétrole. Comme alternative, les Iraniens ont eu recours à des mélanges pétrochimiques dans l'essence, afin d'augmenter l'approvisionnement général.

En 2012, des chercheurs de l'université de Téhéran ont estimé que les voitures sur les routes du pays émettaient en moyenne 26 tonnes de dioxyde de carbone par jour, et que les transports urbains consommaient environ 178 millions de litres de diesel et 4 milliards de litres d'essence par an.

La grande quantité de carburant brûlé dans la ville et dans tout le pays est, selon Michel, en partie due aux subventions offertes par les autorités. « Les consommateurs ne paient que cinq ou dix pour cent de ce que leur coûterait leur carburant en l'absence de telles subventions », dit-il.

Selon le représentant résident adjoint du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), Balasubramaniam Murali, la pollution de l'air en Iran a beaucoup nui au développement du pays, à Téhéran et ailleurs.

« Cela a fait fermer des écoles, fait augmenter les coûts de santé, et a réduit la productivité au sein de la population active », explique Murali, qui ajoute que tout le personnel des Nations unies en Iran avait travaillé de chez lui mardi à cause de la pollution de l'air.

Selon lui, le gouvernement agit de bonne foi en mettant des objectifs environnementaux, comme la réduction de la pollution de l'air, à son agenda.

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Pour la première fois, dit-il, le schéma de développement qu'a envisagé le PNUD aux côtés des autorités iraniennes va inclure les maladies non-transmissibles, et la pollution est listée comme l'une des priorités.

« C'est le gouvernement qui demande cela — il n'y a aucun doute », ajoute Murali. « C'est clairement un champ de développement qu'ils considèrent comme une priorité, et on constate que des choses sont faites pour faire face à ce problème. »

Un mouvement international vers les énergies renouvelables et durables pourrait également encourager le pays à aller dans la bonne direction.

« L'Iran fait partie de ces exemples de pays qui souhaitent faire leur transition énergique, qui pousse beaucoup de pays producteurs d'énergies fossiles à regarder de plus près les énergies renouvelables et à réduire leur propre utilisation d'énergies fossiles », dit Michel. Le fait que l'Iran devrait dorénavant agir sur ce problème, a-t-il ajouté, « a à voir avec la visibilité des problèmes comme la pollution de l'air, particulièrement quand les écoles ferment et que les gens ne peuvent pas aller travailler. »

Suivez Eva Hershaw sur Twitter : @beets4eva