FYI.

This story is over 5 years old.

Stuff

Des livres flingués à lire en portant un masque

Nous y sommes ; cette inévitable période de l’année où la télévision nous assomme de films sur le thème d’Halloween – et par conséquent la période où je ne cesse de me demander à quel moment il est devenu si difficile d’écrire un bonne histoire d...

Photo : Jonnie Craig

Nous y sommes ; cette inévitable période de l’année où la télévision nous assomme de films sur le thème d’Halloween – et par conséquent la période où je ne cesse de me demander à quel moment il est devenu si difficile d’écrire un bonne histoire d’épouvante. Tout ce qui se vend en ce moment traite de comment il est facile de hacker un ordinateur ou s’inspire de mythes ancestraux vus et revus. C’est sympa, cool, distrayant et tout le tintouin, mais merde, j’aimerais bien flipper pour de vrai un jour. Si les gens commençaient par balancer tous leurs livres de Stephen King par la fenêtre et se mettaient à lire de vrais bons romans flingués, ce serait déjà un bon début. Voici ma liste toute personnelle de livres incontournables, ceux qui foutent vraiment, vraiment la trouille.

Publicité

The Marbled Swarm de Dennis Cooper

Seul Dennis Cooper est capable de faire d’un truc glauque et tordu un truc plaisant. Cannibalisme, corps qui prennent leur pied en se faisant réduire en en bouillie, maisons reliées par des passages secrets douteux et enlèvements d’enfants sont au rendez-vous ; à quoi s’ajoute une narration similaire à celle de Burgess dans Orange mécanique, mais sans le côté « Soignez-Moi. » Peu de gens sont capables de pondre des fictions aussi angoissantes que celles de Dennis Cooper à l’heure actuelle. Sapez vous comme l’un de ses personnages pour Halloween, et disparaissez.

The Orange Eats Creeps de Grace Krilanovich

Si j’avais suffisamment de thunes, j’achèterais une tonne de son livre et je fourrerais un exemplaire dans le lit de tous les mioches qui ont l’âge d’être fan de Twilight. Il est question de vampires, mais Robert Pattinson est remplacé par des mecs aux allures de G.G. Allin qui puent autant que BOB dans Twin Peaks. On y rencontre des punks à chien, des flics timbrés, des cassettes VHS morbides, des trips à la kétamine, le tout desservi par des phrases du genre : « Àchaque fois que j’inspire ma peau devient poussière, mon corps rétrécit dès que je respire. »

La Jalousie d’Alain Robbe-Grillet

La Jalousie est aussi creepy que l’oncle muet que votre mère vous interdit de voir seul. Le point de vue est extérieur, le narrateur ne participe pas à l’histoire – il se trouve juste que sa femme passe beaucoup trop de temps loin de lui, avec un autre homme – et c’est ce qui est le plus sinistre ; la manière dont l’histoire est racontée, plutôt que l’histoire en elle-même. Tout comme Hitchcock sous sédatif, aussi dingue que les couleurs des films de Tarkovski, ce livre tape sévèrement sur le ciboulot.

Publicité

Maximum Gaga de Lara Glenum

Un tas de poèmes enchaînés les uns aux autres, aussi grossiers que les dessins animés japonais que vous n’aviez pas le droit de regarder quand vous étiez petit. Il y a des personnages qui s'appellent Minky Momo et Traumadome, et tout semble en permanence soit sur le point d'exploser, soit sur le point de s’envoyer en l’air avec soi-même.Je pense que Mussolini se aurait pu se branler sur ce livre, en marmonnant : « Bordel incroyable/grosses putes bien baisées/lèche-culs du Normopathe/s'écrase dans le canyon de jambon. »

Mopus d’Oisín Curran

L’un des livres les plus injustement négligés de ces dix dernières années, sur un type nommé Bluebottle qui cherche son chien blanc 24 heures durant, sur un terrain cauchemardesque plein de fantômes et d'air déformé.C’est moins terrifiant que hanté, en fait, et surtout, ça remet en question toutes les théories que vous aviez sur la manière dont une histoire peut être relatée. Ce bouquin fait des trucs avec le sens que vous n’auriez jamais crus possibles, ce qui a pu inciter les gens à établir des comparaisons avec Joyce et Beckett. Mais sérieux, c’est le genre de machine à fiction implacable que vous devriez lire. La toute première phrase est : « Tout commence dans le noir, avec les cliquetis des feuilles et deux oiseaux qui parlent, des fleurs invisibles éclosent. »

The Changeling de Joy Williams

Complémentaire de Mopus et assez éloigné des autres travaux de Joy Williams, The Changeling suit une femme ivre dans une maison remplie de gosses sauvages qui essaient de happer son esprit. Comme d’habitude, Williams a une aptitude déconcertante à cerner ses personnages sans se noyer dans une tonne de descriptions et de détails chiants. Ici, la réalité se mélange à la magie, de manière à ce que personne ne puisse vraiment tout élucider. Les fans de Kelly Link et Virginia Woolf devraient se lancer dans cet œuvre dans les plus brefs délais.

Publicité

Cows de Matthew Stokoe

Cet ouvrage est plein de sang de vache, de décharges électriques et d’ouvriers qui s’adonnent à des parties de jambes en l’air pendant des heures, entourés de machines agricoles. Le narrateur est un type qui vit avec sa mère énorme qui le nourrit de bouffe pourrie jusqu'à ce qu’il devienne de plus en plus mal en point et que les vaches lui ordonnent de tuer. Je m’imagine Lars Von Trier lire ce livre et être dégoûté de Burger King à tout jamais. Ça dit des choses très bizarres et en même temps très simples, du genre : « Rien ne remplacera jamais l’extase de devenir quelqu’un d’autre. »

Windeye de Brian Evenson

Tous les livres de Brian Evenson pourraient figurer sur cette liste : de sa première petite collection biblique d’histoires tranchantes, Altmann’s Tongue, à son récent roman de science-fiction à vous démonter le cerveau, Immobilty. Le roman d’épouvante est, entre ses mains, désapé jusqu’à se retrouver dans son plus simple appareil : froide logique, narration cadrée. À tel point qu’en le lisant, vous en oublierez qui vous êtes réellement. Windeye est un de ses ouvrages les plus récents et certainement le plus barré, avec des histoires dans lesquelles les organes du corps sont doués d’une volonté propre et où les gens se griffent jusqu’à la mort à des kilomètres les uns des autres. Nous avons clairement affaire au meilleur romancier d’épouvante des temps modernes.

Publicité

Chair électrique de Claro

Chair électrique est un roman de Claro, et une explosion de bizarrerie. Il s’agit d’un type persuadé de descendre de Houdini et qui voyage çà et là en expérimentant des putains de trucs avec des cadenas, des animaux chelou et de l’électricité. Dès la première page, Claro annonce la couleur stylistique – cet homme n’a peur de rien – et entraîne le lecteur dans une série de machinations fantasmagoriques narratives, aussi précises et intrigantes que les vibrations d'un corps sur le papier. Ce livre va loin, il va profond, et ne regarde pas un instant en arrière.

The Complete Butcher’s Tales de Rikki Ducornet

Ce livre ressemble au musée Mütter sur papier, regorgeant de plusieurs douzaines de mini-histoires alliant mutilations, asiles de fous, vêtements insensés, lits délabrés, livres sacrés, phrasé chelou, décapitations et tous les autres canons de l’étrange. Ducornet est la meilleure pour ériger des petits musées bizarres de fétiches, en quelque sorte ce que pourrait vous raconter votre grand-mère sénile une fois morte.

Twilight de William Gay

Le dernier livre de ce type s’est fait défoncer par une trilogie merdique connue de tous, et puis, il est mort. Il était un peu le Cormac McCarthy des bois. Regardez un peu la tête qu’il a. Il mangeait sûrement avec des couverts en argent rouillés. Ça craint qu’il soit mort. Cet ouvrage parle d'un croque-mort pervers qui profite des corps de défunts, dans une minuscule ville où personne d’autre ne peut s’occuper d’eux, et ils sont entourés par la forêt et niqués par les produits chimiques, et les habitants essaient de découvrir qui est enterré et où. Ça donne envie de ne pas mourir tout de suite.

Publicité

À lire aussi :

Les Chants de Maldoror du Comte de Lautréamont

The Haunted Hillbilly de Derek McCormack

Unclean Jobs for Women and Girls d’Alissa Nutting

The Melancholy of Anatomy de Shelley Jackson

Waste de Eugene Marten

Paysage de fantaisie de Tony Duvert

Ville fantôme de Robert Coover

Tongue Party de Sarah Rose Etter

Plus de conseils de lecture :

SIX LIVRES QUE J’AIME OU QUE J’AIMERAIS ENSEIGNER – Des tips littéraires fournis par Claro et Yves Adrien