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Mon mari, ce délinquant sexuel

J'ai épousé un homme inculpé pour agression sexuelle – voici toutes les manières dont cet épisode de son passé affecte notre vie aujourd'hui.

En 2001, six mois avant que Gretchen ne rencontre son mari David, ce dernier a été inculpé pour agression sexuelle. Après une nuit de beuverie, la police a trouvé David avec une amie sur la chaussée. Tous deux étaient ivres et à moitié dévêtus – la jeune femme était inconsciente, et David a pris la fuite en voiture quand il a vu les policiers débarquer. Gretchen* raconte que David a d'abord cru qu'il allait être arrêté pour conduite en état d'ivresse. Il a finalement été inculpé pour « pénétration sexuelle à l'aide d'un objet étranger sur une victime inconsciente » – « l'objet étranger » étant sa main*.

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David a écopé d'une peine de six ans de prison – dont trois avec sursis – qu'il a purgée en Californie. En outre, il passera le restant de ses jours listé en tant que délinquant sexuel. 14 ans après l'incident, presque tous les aspects de sa vie de couple sont influencés par les événements de cette nuit-là.

Gretchen est particulièrement inquiète du vote d'une nouvelle loi qui rendra le voyage hors du pays difficile pour les personnes listées comme délinquant sexuel. La loi vise ceux dont la victime était mineure – ce qui n'est pas le cas pour David. En revanche, beaucoup de gens listés disent se heurter à un mur lorsqu'ils essayent de voyager, peu importe l'âge de leurs victimes.

Dans les paragraphes qui suivent, Gretchen nous parle de son mariage, de ses voisins et à quoi pourrait ressembler le futur pour elle et David.

***

Quelques mois après le début de notre relation, David m'a raconté son histoire. J'avais 18 ans à l'époque. Il en avait 22. J'étais très jeune et, forcément, un peu choquée. Sur le coup, je lui ai quand même dit : Tu ne peux pas aller en prison pour ça. Vous étiez deux gamins stupides. Tu n'es pas un monstre. Tu n'es pas un pervers qui traîne dans les parcs le soir. J'ai pensé que l'on finirait par oublier cette histoire.

Or, cela n'est jamais arrivé.

Il a fini par aller en prison un an et demi après notre rencontre, au moment où il a décidé de plaider coupable, car il ne voulait pas faire durer l'agonie – en majeure partie pour sa mère et moi. Pendant qu'il était en prison, je terminais mes études. J'allais lui rendre visite le week-end, mais il m'a demandé de me concentrer sur mes cours et de ne pas m'inquiéter pour lui.

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Encore aujourd'hui, il me dit que la prison était la partie la plus facile de cette mauvaise expérience. Il me dit que même en ce moment, la vie est plus difficile parce qu'il ne sait jamais à quoi s'attendre. Nous nous inquiétons en permanence ; dès que nous rentrons à la maison, nous avons peur que les voisins aient planté des pancartes sur la pelouse ; dès que la sonnette retentit, mon cœur bat à cent à l'heure. Nous vivions dans un état de peur permanent.

Nous n'avons jamais réussi à devenir amis avec nos voisins. Nous essayons de faire profil bas, mais les policiers viennent parfois faire des visites de routine afin de s'assurer que David habite bien ici. Nous craignons que les gens commencent à s'intéresser à ce qui se trame chez nous en voyant la police frapper à notre porte.

Les trois premières années que nous avons vécues ici, sa photo n'était même pas sur le registre du site listant les délinquants sexuels. Il aurait fallu se rendre directement au commissariat pour apprendre quoi que ce soit sur lui. Mais un jour, sa photo et son nom ont été placardés sur le site. Après ça, les flics nous ont dit que David n'avait pas le droit d'habiter à moins de 600 mètres d'une école. Nous venions d'acheter une maison, située à 615 mètres de l'école la plus proche. Dieu merci, nous n'avons pas eu à déménager.

Chaque jour apportait son lot de surprises désagréables.

Nous voulions vraiment être parents. Mais à mesure que les lois évoluaient, nous avons réalisé que ce n'était pas très responsable d'élever un enfant dans ces circonstances – difficile d'expliquer à un enfant que son père n'a pas le droit de le chercher à l'école ou que ses camarades de classe ne peuvent pas venir à la maison.

Nous sommes tous les deux à cran à cause de cette nouvelle loi qui visite à limiter les voyages pour les anciens déliquants sexuels. Lorsque nous avons découvert qu'ils envoyaient des notifications vers d'autres pays, nous avons trouvé un moyen de contourner le processus. Nous habitons non loin de la frontière avec Tijuana, et je me suis dit : Essayons de nous rendre là-bas en avion, on verra bien ce qui se passera. Mais bien entendu, quand nous retournons aux États-Unis, David est harcelé sans arrêt par la douane. Ils ne peuvent rien faire, parce qu'il n'enfreint pas la loi, même s'ils insistent pour savoir comment il est arrivé ici. Parfois, ils fouillent même dans ses affaires ; ils cassent tout et lui demandent s'il possède des ordinateurs, dans quel pays il s'est rendu et avec qui. C'est assez gênant de se faire harceler dès qu'on rentre dans son propre pays.

Maintenant, avec ce qui est train de se passer, nous avons l'impression d'être au pied du mur. Doit-on prendre nos affaires et partir ? Nous ne savons pas si c'est la meilleure chose à faire. Nous sommes très proches de nos familles ici. J'ai ma propre entreprise. Financièrement parlant, nous nous portons plutôt bien. Nous avons le choix entre rester en Californie en espérant que les lois finissent par changer un jour, ou quitter le pays et ne plus jamais en parler. C'est une punition qui ne se terminera jamais.

* Gretchen plaide que David et la jeune femme étaient tous deux consentants et que la police a mal jugé la situation. D'après le procureur, la jeune femme était inconsciente dès le début et David a perpétré « une agression sexuelle sur une personne vulnérable ».

Tous les noms ont été changés.