FYI.

This story is over 5 years old.

Drogue

Après des années à fumer de la weed dès le matin, j’ai enfin combattu mon addiction

Il m'a fallu environ huit fausses promesses, un compte en banque vide et une réprimande de ma grand-mère – mais j'ai réussi.

Photo via

Au cours de ces six dernières années, j'ai commencé chacune de mes journées de la même manière. Après une longue bataille contre mon réveil, j'ouvre péniblement les yeux, et je me répète les mots suivants : « Je ne fumerais pas de joint ce matin. » Ensuite, j'essaie de m'autoconvaincre que je passerai la journée à écrire, plutôt que de succomber à mes pulsions cannabiques.

À mesure que je m'extirpe de mon lit, je continue de me répéter ce mantra, jusqu'à ce que j'arrive devant l'étagère Ikea où se trouvent mes biens les plus précieux. Un médaillon de sorcier noir et doré qui appartenait à ma grand-mère y est suspendu. Au sommet de l'étagère trône un petit éléphant décoratif offert par Ashley, ma meilleure amie. Cet éléphant est pourvu d'un compartiment secret, et à l'intérieur, il y a une pierre de jade rouge. Selon Ashley, la jade rouge aurait le pouvoir de combattre les hésitations et la peur. C'est sur cette même étagère que repose ma pipe en verre bleu marine. Alors que les derniers mots de mon mantra s'échappent de mes lèvres, j'attrape la pipe et je la remplis d'herbe, avant de la fumer en me promettant que ce sera la dernière.

Publicité

Cela faisait environ six ans que je fumais dès le réveil. Je fume de l'herbe tous les jours depuis dix ans. J'ai commencé à 16 ans – et j'en aurai 27 d'ici quelques semaines.

Quand j'en ai l'occasion, je fume au moins trois fois par jour : une fois le matin, une autre l'après-midi – et un nombre incalculable de joints en soirée selon le matériel dont je dispose. Je fume pour faire passer les moments les plus ennuyeux de ma journée, comme la préparation de mon petit-déjeuner, ma douche, mes courses et mon trajet jusqu'au boulot.

Parfois, j'ai l'impression de ne plus du tout être défoncé – je suis simplement dans un autre état d'esprit. Alors que je ne suis pas la personne la plus productive qui soit, je suis ce qu'on appelle un pothead fonctionnel : même défoncé, je peux facilement lire, écrire, conduire, faire le ménage et tenir une conversation. Disons que je préfère souvent ne pas m'embarrasser de ces activités.

Malgré mes nombreux mantras, j'ai passé beaucoup d'après-midis défoncé – et mon travail en a indéniablement souffert. Pour moi, une journée productive consiste à envoyer quelques mails, bosser quelques heures sur mon boulot de glandeur à temps partiel, et écrire pendant deux à trois heures. Mais trop souvent, au lieu d'écrire, je finis par fumer et rigoler bêtement devant des vidéos Pornhub, tout en mangeant une quantité indécente de fromage et de chips. Puis je me rends compte qu'on est déjà vendredi, et que je mérite évidemment une petite pause après ma semaine de dur labeur.

Publicité

Je me dis que c'est OK : ma vie n'est pas vraiment déprimante. J'ai un master, des piges régulières, un boulot, une partenaire sexuelle, des amis et un appartement très bien situé. Je fais (parfois) ma vaisselle. Je me rassure en me disant que, de toute évidence, je ne suis pas un drogué.

Au lycée, j'avais pris un cours de psychologie en option. J'ai écrit un rapport qui consistait à expliquer si la weed était addictive ou non. Mon but était de mettre en évidence quelques données scientifiques qui réfutaient l'idée que la weed puisse gâcher mon intelligence et me transformer en légume. J'ai trouvé exactement ce que je voulais : il n'existe pas de dépendance physique à la weed – seulement une dépendance psychologique. Des centres de soin comme celui de Toronto disent que l'herbe peut engendrer des problèmes de motivation et, pour ceux qui arrêtent, une perte de l'appétit, des angoisses et d'autres effets secondaires.

J'ai toujours mis un point d'honneur à réfuter ces arguments. Je me disais que la weed agissait comme un médicament, et que je ne pouvais pas en être dépendant. Puis plus tard, je me suis demandé pourquoi une plante que les Hommes consomment depuis depuis des milliers d'années pouvait-elle contrôler mes actions ?

Désormais, je peux admettre que j'ai été psychologiquement dépendant à la weed pendant dix ans. Je fume si j'ai besoin de manger, de dormir, de me détendre, de me calmer, de m'amuser, d'oublier une mauvaise expérience, de me masturber, de faire des courses, de mater la télé ou de créer quoi que ce soit. Fumer engourdit mes douleurs, m'aide à oublier mes problèmes et offre une toute nouvelle dimension aux morceaux de Sublime.

Publicité

Ces dernières années, les effets négatifs de la weed ont commencé à outrepasser les aspects positifs. Je me suis progressivement rendu compte que ma mémoire commençait à me faire défaut. Quand je suis défoncé, j'ai souvent plein de bonnes idées (je sais que tous les potheads le disent, mais c'est vrai) – mais bien entendu, ces idées s'évaporent aussi vite qu'elles sont apparues. Je ne pouvais plus rien épeler. Je n'étais plus aussi vif d'esprit qu'il me semblait l'avoir été auparavant. J'étais paranoïaque et nerveux à souhait. Ma capacité d'attention n'excèdait pas les trente secondes.

Mes amitiés ont commencé à en souffrir, une caractéristique certaine de l'addiction. J'ai régulièrement fait des faux plans parce que j'étais trop défoncé pour sortir de chez moi. Les gens que j'avais l'habitude de voir ont arrêté de m'envoyer des messages, probablement parce qu'ils en avaient marre que je sois toujours en retard (et aussi parce que je ne me souvenais jamais des histoires qu'ils me racontaient). J'ai toujours surveillé mon poids et à mon alimentation, mais j'étais en train de devenir gros et pauvre à force de m'empiffrer de plats à emporter devant Netflix.

Au cours des trois dernières années, j'ai commencé à voir mes mensonges se confondre avec mes excuses. Je me suis fourvoyé malgré moi. Mais le début de la fin de ma servitude volontaire est venue il y a six mois, alors que je rendais visite à ma grand-mère. J'ai fumé pendant qu'elle dormait.

Publicité

« Je sais très bien reconnaître l'odeur de la weed, » m'a-t-elle dit le lendemain. « Regarde-toi. Tu ne peux même pas te tenir à ton emploi du temps. Il faut que tu mettes de l'ordre dans ta vie. » Naturellement, j'ai d'abord pensé qu'elle était chiante et qu'elle devrait arrêter de se mêler de ce qui ne la regardait pas. C'est la façon dont j'ai toujours agi quand quelqu'un me suggérait d'arrêter.

Mais il y a un mois, la veille de l'équinoxe, j'ai décidé que j'étais enfin prêt pour savoir ce qui m'arriverait si j'arrêtais. Ma dernière réserve s'est épuisée, et je n'ai appelé personne. Plein de raisons poussent les gens à arrêter. J'étais malade de ma paranoïa et de mes angoisses, de mon manque de productivité et de ma flemme. J'ai longtemps eu peur d'arrêter parce que je m'inquiétais de ne plus savoir quoi faire de moi-même, mais le temps était venu.

Du coup, comment je me sens aujourd'hui ? Étonnamment bien par rapport à ce que je craignais. Je m'attendais à être davantage angoissé, à me sentir irrité et à avoir des nausées pendant quelques semaines. Heureusement, je ne suis pas plus méchant qu'à l'accoutumée. Mon appétit s'est sensiblement amoindri, mais je vois ça comme un point positif.

J'essaye de ne pas me réjouir trop bruyamment de ma nouvelle condition, de crainte de passer pour un enfoiré d'hypocrite bienpensant. Mais je suis surpris du nombre de problèmes que j'ai réglés depuis que j'ai arrêté. J'ai mis un point d'honneur à revoir plus souvent mes amis, et je me suis même fait de nouveaux potes depuis que je n'ai plus la trouille de parler à des inconnus. J'ai envoyé des pitchs à des nouvelles publications. J'ai toujours été du genre à m'éparpiller, et aujourd'hui, je prie l'univers pour qu'une journée contienne davantage d'heures. Maintenant, j'ai la sensation d'avoir plus de temps pour écrire, pour cuisiner et lire des livres.

Ne vous méprenez pas. Une existence sans weed n'est pas la seule possible. Je ne prêche pas pour une vie sobre. J'aime toujours la weed. Et elle me manque. La seule différence est que désormais, j'ai un sentiment de contrôle.