En tant que queer et victime de la crise du logement, je peux facilement me mettre à la place de ceux qui ont rencontré quelqu’un sur Tinder, ont décidé que c’était le bon à sa coiffure et se sont embarqués dans un premier rendez-vous qui n'a jamais pris fin. Qui a déjà emménagé avec quelqu'un au bout de deux semaines de relation, avant de réaliser que certaines de ses habitudes étaient infernales à vivre ?
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Par le passé, ces « emménagements avec quelqu’un qu’on connait à peine » arrivaient de temps à autres. Parfois, ça marchait, parfois non – on connait tous quelqu’un dont les parents se sont installés ensemble après trois jours, et sont aujourd’hui mariés depuis 25 ans – tant mieux pour eux. Mais avec la récente épidémie de Covid-19 les couples qui viennent de se rencontrer doivent choisir entre ne plus se voir pour une durée indéterminée, ou bien faire le grand saut et s’engager ensemble dans le confinement.Alors, ils en sont où ceux qui ont choisi la deuxième option ? On a interrogé quelques personnes qui ont décidé d’affronter la crise ensemble alors qu’il y a encore trois mois (ou moins), ils étaient de parfaits inconnus.On s’est rencontrés sur Tinder fin-janvier. Ni lui ni moi ne voulions coller d’étiquette à notre relation, on prenait simplement notre pied et du bon temps ensemble. Pour vous replacer le contexte, je vis seule depuis presque deux ans et ça me va très bien – je travaille à la maison et ça me plait. Alors, que quelqu’un vienne passer quelques nuits chez moi par semaine, c’était déjà une sacrée étape.Vers la fin-février, il m’a fait comprendre que la chambre qu’il sous-louait était horrible et qu’il voulait trouver un autre logement. Il m’a alors demandé s’il pouvait rester chez moi deux ou trois semaines et j’ai accepté. Et puis, tout à coup, c’était déjà la mi-mars et le confinement, donc bon, pas le moment idéal pour trouver un appart. En plus, il a perdu son boulot à cause du virus, donc il passe tout son temps dans mon appart avec vraiment pas grand-chose à faire.
Milly, 29 ans
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On s’entend bien et on en profite. On mange beaucoup de fromage et on boit beaucoup de vin rouge, on couche ensemble et je dois reconnaître que c’est mieux que d’être seule. Par contre, je me sens privée de l’excitation de l’étape « lune de miel », de mon indépendance (que je chéris tant), et je dois prendre sur moi et faire abstraction de tous ses petits tics agaçants qui m’irritent, ce qui ne serait sûrement pas arrivé si on avait eu un début de relation normal.On se voyait pour la quatrième ou cinquième fois quand je suis allée passer le weekend chez lui. On a dîné avec ses colocs super sympas, mais le lendemain l’un d’entre eux lui a écrit qu’un de ses proches collègues était peut-être atteint du coronavirus et qu’ils devaient tous rester confinés pendant deux semaines, par précaution, selon les recommandations en vigueur.J’avais alors l’option soit de partir et ne pas revenir soit de rester. On a tous les deux décidé que je devais rester. J’avais aussi côtoyé le coloc en question, donc ça semblait être la solution la plus responsable, plutôt que de ramener le virus chez moi ou à quelqu’un d’autre. C’est donc notre situation depuis maintenant six jours, ce qui est vraiment long quand on ne peut pas sortir de l’appart.Cela ne se passe pas trop mal pour l’instant. On travaille depuis la maison dans des salles séparées pendant la journée, et on cuisine et regarde des films le soir. J’ai toujours pas trouvé le truc qui cloche, ce qui est plutôt bon signe, et on ne manque pas de sujets de conversation. En fait, je crois qu’il me plaît encore plus. Ça paraît très intense, mais toute la situation est intense, pas notre relation seulement.
Lily, 24 ans
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Gina, 26 ans
Oli, 31 ans
Grace, 23 ans
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Leila, 28 ans
C’est bizarre qu’on vive ensemble maintenant alors que notre relation n’est pas encore très sérieuse ? Enfin, j’imagine qu’elle le devient. Mais je suis contente d’être ici parce que chez moi je vis dans un studio et au moins chez lui je peux bouger dans plusieurs pièces différentes. Il a aussi beaucoup de livres, plutôt bien, non ? J’sais pas, il est trop mignon quoi. J’ai acheté plein de jeux de société et il me plaît vraiment, j’espère que quand je me sentirai mieux on pourra bien en profiter.C’est quand-même marrant d’avoir fait tout ça ensemble sans s’être jamais dit « je t’aime » ni rien. On est en couple depuis deux semaines, mais j’ai failli recracher du thé quand le travail lui a répondu en disant : « nous souhaitons une bonne convalescence à ta conjointe ».— Leila, 28 ans.