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Les skaters belges et leur recherche d’évasion

Le skater et photographe Daniil Lavrovski a photographié l'épicentre de la scène skate belge pendant toute son enfance. Nous lui avons parlé de ses images, du lien entre la photographie et le skateboard, et d’évasion.

Toute la culture et l'art de vivre de la scène locale du skate est à découvrir dans notre série VICE « LE SKATE EN BELGIQUE ».

Vous savez ce qui serait génial ? Un endroit où nous pourrions nous évader à chaque fois que notre cerveau nous bombarde de questions existentielles anxiogènes. D’après le photographe et skater brugeois Daniil Lavrovski (22 ans), un tel lieu existe déjà: le skatepark.

Vendredi dernier, il a exposé pour la première fois Rising Sun, une série de photos dans laquelle il a capturé la liberté et l’insouciance de la scène skate belge, avec un regard assez cru. On y trouve un mélange de photos iPhone, tirages analogiques et numériques.

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Je l’ai appelé pour en savoir plus sur ses photos, le lien entre la photographie et le skateboard, et sur ce fameux besoin d’évasion qu’on trouve dans la scène skate belge.

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Toutes les photos par Daniil Lavrovski.

VICE : Quand as-tu commencé à photographier des skaters ?
Daniil Lavrovski: J’ai toujours fait ça, aussi loin que je m’en souvienne. Mon amour pour la photographie est né avec le skateboard. Je skate depuis l’âge de dix ans et déjà tout jeune, je voulais capturer cette communauté de skaters autour de moi. À treize ans, j’empruntais sans arrêt l’appareil de ma mère pour faire des vidéos et prendre des photos. C’était un simple compact de quatre mégapixels, mais je l’ai toujours. Il y a deux ans, j’ai fait une série sur Dour avec cet appareil, certaines images ont même été publiées dans un magazine. Ce n’est qu’à seize ans que j’ai acheté mon premier reflex.

Ça fait plus de dix ans que tu photographies la scène skate belge. Pourquoi en faire une expo seulement maintenant ?
J’étudie la photographie à Bruxelles et on nous a demandé de réaliser des séries autour de sujets spécifiques. C’est hyper difficile, fastidieux et souvent artificiel. Beaucoup d’étudiants choisissent un sujet au hasard et essayent de fournir une explication artistique. Je n’aime du tout pas ça, mais ça m’a forcé à me demander : quel est monsujet? À ce moment-là je me suis rendu compte que j’avais déjà travaillé inconsciemment sur une série tout au long de ma jeunesse. J’avais encore plein d’images de mes amis skaters, prises au fil des ans. Des moments drôles, des moments plus chill, des visages qui attirent le regard et captent l’attention. J’ai fait une sélection à partir de ces images d’archives et c’est ainsi que Rising Sun a vu le jour.

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Pourquoi avoir appelé cette série Rising Sun?
J’écoutais House of the Rising Sun de The Animals, une chanson que j’adorais quand j’avais dix-sept ans. Soudain, j’ai pensé : un lever de soleil est le début de quelque chose de nouveau. Cela m’a fait penser à cette étape de la vie dans laquelle mes amis skaters et moi nous trouvons maintenant. Nous sommes aussi à l’aube de quelque chose de nouveau. Nous avons plus de vingt ans. En tant qu’adolescents, on profitait simplement de la vie et un rien nous amusait. Maintenant, ça commence à devenir plus sérieux. On commence tous à se poser des questions du style : qu’est ce que je dois faire avec ma vie ? Je prends des photos et c’est cool, mais vers où ça me mène ? Et je remarque que les mêmes questionnements surgissent chez mes amis. Ils sont tous à la recherche d’eux-mêmes, de ce qu’ils veulent faire ou de qui ils veulent être dans la « vraie » vie. Rising Sun c’est une sorte de retour en arrière vers l’insouciance de la jeunesse, mais en même temps les images arrivent à renvoyer la réelle signification du skatepark. C’est un endroit où vous vous retrouvez avec vos amis pour échapper aux soucis et questionnements sur « l’avenir » ou la « vraie vie ». C’est une échappatoire.

Faire du skate, ça serait donc une forme d’évasion?
Oui, le skate est une sorte d’évasion. Un skatepark est une bulle dans laquelle vous êtes isolé de tous vos soucis. Vous vous focalisez sur le plaisir pur plutôt que sur des choses trop sérieuses. L’ambiance du skatepark y contribue fortement : il n’y a pas d’âge pour faire du skate, donc toutes les générations s’y croisent, se parlent et s’amusent. C’est assez rare d’arriver à mettre les différentes générations sur un tel pied d’égalité. J’aime ça, cette ambiance. Ca garde vos pensées fraîches et vous conforte dans le fait que vous avez une vision différente de la vie. Le skateboard est thérapeutique. La meilleure sensation pour moi c’est de prendre ma planche, mettre de la musique et rouler au hasard dans les rues.

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Justement, cette sensation de liberté qu’offre le skate, tu l’as pourtant transposée dans des images assez sombres.

Oui, les gens disent parfois qu’ils trouvent mon travail assez sombre et un peu dur. Ca étonne beaucoup car je suis une personne super optimiste en fait. Je pense que c’est parce qu’avec la photo, comme avec le skate, je peux exprimer mes frustrations les plus profondes. En fait je pense que si je suis si serein c’est parce que justement je peux extérioriser mes angoisses et mes pensées sombres dans la photographie.

Les photos, tu les as prises dans plusieurs villes ?
Oui, principalement à Bruges, mais aussi à Anvers, Bruxelles et même Ostende. Il y a aussi des images prises à Copenhague. C’est aussi le truc avec le skate. Les gens ne comprendront jamais, mais nous allons souvent très loin pour trouver un stupide banc sur lequel faire nos tricks. A cause de ça, les skaters ont une perception complètement différente de la géographie. Nous pouvons reconnaître des villes comme Barcelone, Los Angeles ou même Helsinki en voyant simplement la photo d’une rampe. Chaque bout de ville devient une possibilité. C’est ça qui rend aussi le skate et les skaters si créatifs.

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