Lous and the Yakuza
Culture

La Vida Lockdown 1 : Lous and the Yakuza parle solitude et nuits blanches

« Si je pouvais je vivrais seule, Loin des problèmes et des dilemmes, Na na na na na. » - Ton souhait a été exaucé, Lous.
Souria Cheurfi
Brussels, BE

Suivez nos lives « La Vida Lockdown » sur Instagram tous les mercredis à 17 heures.

Comme il faut bien s’adapter au contexte actuel, on s’est dit qu’on ferait bien quelques interviews avec des artistes depuis notre canap’, en live sur Instagram - pas si mal ce homeworking. C’est ainsi que pour le premier épisode de La Vida Lockdown, j’ai invité l’artiste bruxelloise Lous (Lous and the Yakuza) à papoter avec moi sur la release de son nouveau clip « Solo », ses futurs projets, le confinement, tout ça tout ça.

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Je lui avais donné rendez-vous à 17 heures, mais après avoir meublé cinq longues minutes d’attente solo en live - moment de solitude, bonjour - j’ai dû partir à sa recherche. Elle dormait. Je peux comprendre, c’est le confinement pour tout le monde. Bref, elle a fini par me rejoindre, toute fraîche, sans artifice. Petit récap’ de notre conversation pour celleux qui l’ont loupée.

VICE : Salut Lous. Ça va, t’as fait une petite sieste ?
Lous : Je suis vraiment désolée. En fait je vis la nuit. J’ai passé la nuit à peindre et là je dormais. Je suis beaucoup plus disponible et open la nuit en fait. Je vis la nuit et je dors la journée.

J’allais te demander comment s’est passée ta journée mais du coup raconte-nous ta nuit.
J’ai bossé, j’ai peint… Je fais ma life la nuit quoi !

Tu le fais avec qui ton confinement ?
Solo. Je ne vois vraiment personne, je respecte le confinement à fond. De toute façon j’habite dans un quartier où y a personne à part des vieux. C’est désert.

C’est courageux de ta part. Ça fait presque deux semaines que les premières mesures de confinement ont été prises. T’as fait quoi le dernier soir avant tout ferme ?
En fait j’étais à Paris donc j’ai juste fait en sorte de rentrer à Bruxelles au plus vite. Justement, j’ai vu la situation en France avant de partir, donc ça fait un bail que je suis confinée moi ! Et puis j’ai tout de suite capté vers où on allait en Belgique.

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C’est quoi qui te manque le plus ?
J’aurais jamais cru dire ça un jour, mais c’est le taf dans la musique, et mon équipe bien sûr. Je pensais jamais dire ça parce que, honnêtement c’est difficile à gérer, ça ne s’arrête jamais. Je cours tout le temps et j’ai jamais le temps pour rien. Mais là ça me manque.

Tu me dis que tu vis la nuit, mais j’imagine qu’en temps normal c’est pas possible. T’as complètement changé de train de vie avec le confinement ?

Ouais c’est clair qu’en temps normal, je ne peux pas me permettre ce genre de trucs. Du coup oui, mon rythme est assez différent en ce moment. J’ai plus de temps pour moi, pour mes peintures… Et en tant qu’architecte d’intérieur, je bosse sur un gros projet ; c’est assez excitant.

T’arrives à rester en contact avec tes proches ?
Oui ça va. J’ai appelé une de mes meilleures amies pendant genre cinq heures.

Je vois que tu fais des lives tous les soirs avec Krisy - tu nous as pas attendu ! C’est important de rester présente sur les réseaux pour ton public ?
Oui. Comme il voulait faire la promo de son projet et moi du mien, on s’est dit pourquoi pas faire ça ensemble. En fait, avec Krisy, on s’appelle de toute façon tous les jours pendant des heures… C’est mon gars sûr. Du coup autant partager ce moment avec le public. C’est chill on aborde plein de sujets différents.

[ Lous allume sa clope. OKLM ]

Yseult le fait aussi avec Claire Laffut. Tu penses que la situation renforce la solidarité de la scène ?
Yseult elle donne tellement à la scène. C’est un truc de ouf. Elle donne énormément de force autour d’elle, parce qu’elle a une telle énergie. Du coup forcément elle continue malgré le contexte et c’est super. Mais je manière générale je ne sais pas… J’imagine que ça doit avoir un effet sur certain·es oui. Je pense que ça ramène surtout à la réalité. Ça nous remet bien à notre place.

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Les conséquences sur la scène artistique sont lourdes. Tu les ressens, niveau taf et thunes ?
Ben le truc, c’est je ne mise pas tout sur la musique. Je suis un peu sur tous les fronts et puis j’ai mon boulot en tant qu’archi’ d’intérieur donc honnêtement, je ne suis pas trop mal en point.

T’as quand même décidé de sortir le clip de « Solo » alors que beaucoup de releases on été reportées…
Honnêtement, la question ne s’est même pas posée. Avec mon équipe, on s’est juste demandé comment on allait faire, mais pas si on allait le faire. Évidemment, niveau presse c’était un peu plus compliqué, mais on l’a fait. Là je bosse sur d’autres projets. Je compte pas mettre tout en pause à cause de la situation.

Après, c’est un bon timing pour parler de solitude j’imagine… Dans « Dilemme » aussi tu dis « Si je pouvais, je vivrais seule ». C’est un peu des hymnes au confinement tes sons.
Oui clairement, c’est assez actuel ! Mais en fait c’est marrant parce que je n’avais pas fait le lien entre les deux sons, c’est après qu’on me l’a fait remarquer. Faut croire que je parle pas mal de solitude.

Autre sujet dans « Solo », tu dis : « Pourquoi le noir n’est-il pas une couleur de l’arc-en-ciel ». Tu peux développer ?
En gros, ça veut dire ; « pourquoi est-ce qu’on ne marche pas à côté des autres », tout simplement. Après j’ai reçu des commentaires un peu cons du style : « Ouais, le noir c’est pas une couleur ! ». Merci Einstein. Ou encore : « Ben, le blanc non plus, il est pas dans l’arc-en-ciel. » Mais l’idée, c’est pas d’opposer le noir au blanc, c’est juste une image pour illustrer le fait qu’on n’a pas tou·tes les mêmes opportunités dans la vie. En tant que femme noire, je suis bien placée pour le savoir et aborder ces sujets.

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T’as souvent vécu le racisme personnellement ?
D’office. Je pense que toute personne de couleur le vit à un moment ou un autre, pas forcément du racisme agressif ou direct, mais au moins des micro-agressions. Perso, j’ai vécu les deux. Je me suis déjà faite insultée de négresse, dans ma gueule. Et un jour j’ai même été expulsée d’un aéroport. Ça faisait des heures qu'on faisait la file, et là y a quelqu'un qui nous dépasse tou·tes. Du coup, je m'interpose ; c'est pas normal tu vois ? Et là, la fille du check-in me dit : « C'est toujours pareil avec vous. » Du coup je demande : « Qui ça, “vous” ? » et elle me répond : « Les Noir·es. » Du coup, c'est monté dans les tours et on m'a virée de l'aéroport.

En général, ma réaction à ce genre de comportement, c’est toujours l’explication. J’essaye de garder mon calme et d’expliquer pourquoi c’est raciste et pourquoi ça craint en fait. Mais ce coup-ci, c’était trop.

Je capte. C’est pas toujours évident de garder son calme dans ces cas-là. Ceci dit, le débat est de plus en plus mis en avant et perso je vois une évolution.
C’est clair. On en parle et on dénonce de plus en plus. Ça avance dans le bon sens comme tu dis. Mais y a encore du taf et, même dans l’industrie musicale, perso, je suis l’une des rares à avoir eu de la chance à ce niveau-là jusqu’ici, mais tou·tes mes potes racisé·es ont des histoires à raconter.

Donc là tu viens de sortir ce clip. Tu prépares d’autres projets de chez toi ?
Grave. Je suis déjà sur le deuxième album alors que je vous ai même pas encore livré le premier!

**Le second épisode de La Vida Lockdown aura lieu de 1/04 à 17h avec Peet du 77 sur l'Instagram **de VICE Belgique.