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Avec le prêtre catholique qui fait les meilleurs Martini

Au quotidien, le Père Dailey est prêtre et avocat. À ses heures perdues, c’est un passionné de mixologie qui se fait des purs cocktails et critique James Bond.

Je me rappelle très bien de la seule fois où j’ai vu mon rabbin boire de l’alcool. Il s’était enfilé une larme de Manischewitz – un vin kasher – après avoir récité le kaddish. De l’autre côté du spectre théologique et alcoolisé se trouve le Père William Dailey. Au quotidien, Dailey est prêtre et avocat. Mais à ses heures perdues, c’est un passionné de cocktails et un excellent mixologue amateur qu’on peut voir dans le livre publié par Death & Co et sur Tales of the Cocktail.

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Entre deux copies de droit qu’il corrige pour le centre d’éthique et de culture de Notre Dame, le Père Daily a discuté Martini et sang du Christ avec moi.

MUNCHIES : Boire fait souvent partie de rites religieux. Comment faire la différence entre l’acte spirituel et la consommation plus « fun » ? Père William Dailey : Pour les catholiques, le vin fait partie de la célébration de l’Eucharistie. C’est une commémoration de la Cène. Dans la liturgie, nous croyons qu’il devient vraiment le sang de Jésus. Après, comme le dit Saint Thomas, les sens sont trompés. L’absorption d’une petite quantité de ce précieux sang est plus une révérence qu’un geste social. La sensation et l’aspect sont différents et ce n’est pas le même genre de célébration.

Le samedi soir, la plupart des gens boivent alors que le dimanche matin, ils doivent aller à l’église. Est-ce que ce comportement influe sur le nombre de fidèles ? Je pense effectivement qu’avoir une messe le dimanche soir encouragerait plus de paroissiens de moins de 40 ans à se manifester – pour des raisons liées au comportement que vous mentionnez. En des temps éloignés, les églises organisaient des cérémonies le samedi à minuit pour permettre aux travailleurs de finir leur boulot, d’aller à la messe et de boire un coup ensuite. Comme nous avons moins de prêtres, nous sommes peut-être moins accommodants aujourd’hui.

Avez-vous déjà pris un verre avec vos fidèles ? Bien sûr ! Mes collègues de Notre Dame viennent régulièrement aux messes que je préside. J’ai baptisé leurs enfants, je les ai mariés, j’étais présent à l’hôpital quand un de leur proche était sur le point de décéder. Ils me demandent souvent si je vais « m’en jeter un ce soir ». Je suis ravi de les accueillir chez moi ou de profiter de leur hospitalité.

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Le Père William Dailey, Tomas Estes et Don Lee lors de la cérémonie des Tales of the Cocktail awards. Photo avec l’aimable autorisation de William Dailey.

Est-ce qu’un bar offre la même sensation de communauté qu’une église ? Absolument ! Un bar avec une clientèle régulière et agréable est un endroit où l’on peut trouver du plaisir dans les bons moments ou du réconfort et des conseils dans ceux plus difficiles. J’en ai fait l’expérience à New York dans des endroits géniaux comme Death & Co ou PDT. Sur le campus de Notre Dame, il y a ce rade que nous avons appelé « Chez Murph » du nom du barman, derrière le zinc depuis des décennies. Dans une église, on va célébrer la naissance d’un enfant, pleurer la disparition d’un être aimé, mais aussi trouver une forme de communion avec d’autres et offrir ou recevoir du réconfort.

Qu’est-ce que vous recherchez dans un bar ? Je cherche d’abord un lieu où l’on peut avoir une conversation. Une atmosphère chaleureuse et – si possible – calme pour moi c’est le « must ». Parfois pour y amener des amis et discuter, d’autres fois seul avec le barman. J’ai tendance à privilégier les bars qui ont du bon Vermouth et qui sont plutôt versés dans l’art du Manhattan ou du Martini. Je ne recherche pas un menu avec des tonnes de cocktail et des sirops faits maison, même si ça ne m’embête pas. Pour moi, le plus important, c’est le respect des classiques et l’ambiance. Si un bar fait qu’un client se sent comme chez lui, c’est bien mieux que de savoir comment faire un Oaxaca Old-Fashioned façon Phil Ward.

Comment réagissez-vous face aux attitudes amorales qu’on trouve parfois dans les bars ? Je n’ai jamais été le témoin de ce genre de comportements – peut-être parce que je n’ai choisi que des bons spots. Généralement, je tombe toujours sur des barmen et des clients responsables qui ne sont pas là pour se mettre des caisses. Une fois, un barman m’a offert de la cocaïne. C’était à Manhattan. Bon, il ne savait pas que j’étais prêtre, mais c’était gênant ! Aujourd’hui, le bar n’est plus ouvert, ce qui est moins surprenant – pour info, c’était un de mes collègues de Notre Dame qui avait choisi le lieu et pas moi.

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Dans les bars, on a souvent des conversations philosophiques avec des inconnus, façon thérapie. Est-ce que vous répondez en tant que Père Dailey ou simplement Bill, compagnon de boisson ? Je ne cache jamais le fait que je suis prêtre. Je le mentionne même s’il y a un moment propice pour le faire. Si je ne suis pas en uniforme, ça arrive qu’un client me demande ce que je fais. Parfois, c’est le barman qui m’appelle « mon Père » et les gens comprennent immédiatement.

Est-ce que vous allez dans des bars vêtus de votre col romain ? Est-ce qu’on vous y accueille différemment que si vous étiez rentré avec un t-shirt ? De temps en temps, on va me payer un verre. Les gens sont curieux, notamment quand je suis dans un endroit comme Death & Co, mais la plupart du temps, on me traite comme une personne lambda. Que je sois vêtu de mes habits cléricaux ou pas. Je reconnais que dans les années 1950, un prêtre avec son col n’aurait jamais payé son verre, les autres clients lui auraient offert tournées sur tournées. Les temps changent. C’est lamentable (rires)

Vous vivez maintenant à South Bend. Est-ce que votre consommation varie par rapport à Manhattan ? Les magasins de spiritueux et d’alcool ont une excellente sélection ici, mais les bars n’ont pas encore découvert le grand Vermouth, donc j’évite généralement les cocktails. Si je vais dans un bar de South Bend, je prends souvent un verre de vin. Grâce aux livres de Jim Meehan (PDT Cocktail Book), de Death & Co et de Robert Simonson sur le Old Fashioned, j’ai réussi à me faire des verres pas dégueu à la maison.

C’est quoi votre cocktail signature ? J’aime faire des Martini, spécialement pour les gens qui n’en ont jamais eu pas secoué. Quand ils goûtent ça pour la première fois, c’est une révélation ! C’est drôle de les voir se rendre compte que ce qu’ils ont appris de James Bond est complètement faux.

Merci pour cette conversation.

Pour plus de Vice, c’est par ici.